Deux ans et demi de siège, près de deux millions de morts dont la moitié de civils : le siège de Leningrad est l’un des épisodes les plus meurtriers de la Seconde Guerre mondiale. Dans le discours officiel, cette histoire de famine, de froid et de mort a été convertie en un exploit glorieux.
Intellectuel russe influent et figure clé du néo-eurasisme, Alexandre Douguine prône une alliance entre la Russie et les anciennes républiques soviétiques contre l’Occident. Son aura, bien que limitée politiquement, a marqué des courants conservateurs et nationalistes en Russie et certains cercles proches du pouvoir.
Réécrite, instrumentalisée, défigurée jusqu’à l’abject dans les discours, sanctifiée par la religion, les médias et l’école, l’histoire en Russie rend la guerre non seulement légitime, mais aussi moralement pure.
Comment enquêter sur ce que pensent et se disent les Russes de la guerre en cours ? Les échanges observés en ligne, malgré toutes les limites de l’observation à distance, montrent qu’il est possible de parler en Russie, mais impossible de dire la guerre.
La résilience de l’économie russe, en dépit de la guerre et des sanctions, conduit à s’interroger : quels en sont les facteurs et les limites ?
Pour Poutine, une population nombreuse est une preuve de puissance. Or les politiques natalistes mises en place en Russie depuis vingt ans se sont traduites par un échec, lequel explique aussi sans doute l’invasion de l’Ukraine.
Révolutionnaire ralliée à Lénine, ministre bolchevik féministe, écrivain polyglotte, « sexuellement émancipée », intellectuelle ayant pensé la famille, l’État ou les nationalités : la modernité d’Alexandra Kollontaï (1872-1952) saute aux yeux.
Énergie, gaz, livraisons d’armes, rôle de l’État : à la suite de la guerre russo-ukrainienne, l’Allemagne redéfinit ses valeurs. Une révolution silencieuse, lourde de difficultés annoncées.
C’est aussi une bataille mémorielle qui se livre entre la Russie et l’Ukraine. Quelle est la part de l’histoire dans la reconstitution d’un sentiment national ukrainien depuis l’indépendance recouvrée en 1991 ?
Les négociations autour de la guerre en Ukraine laissent perplexe. Qui peut endosser le rôle de médiateur dans de telles circonstances ? Peut-on prendre au sérieux l’idée même de médiation, compte tenu de l’ampleur des exactions commises par la Russie en Ukraine ?
Pour justifier l’invasion en Ukraine, Moscou réécrit l’histoire du conflit au Donbass depuis 2014. L’historien russe Nikolay Mitrokhin dénonce, lui, le rôle central du Kremlin dans cet affrontement, ainsi que le pillage et la terreur organisés par les forces « pro-russes ».
Entre 1990 et 2020, tout a changé en Russie, en particulier les manuels d’histoire. De la perspective libérale pro-occidentale à la réhabilitation rampante de Staline : comment enseigner l’histoire dans la Russie contemporaine ?
L’ex-Russie soviétique est aujourd’hui l’un des pays les plus inégalitaires du monde. Le désenchantement a donné lieu à une critique sociale qui s’ancre dans une expérience vécue et partagée, de domination et d’injustice.
Octobre 17 fut la référence politique et culturelle centrale de l’époque soviétique. Cent ans après, la société russe reste toujours profondément divisée face à son passé. Le centenaire de la révolution sera-t-il ce grand moment de réconciliation nationale souhaité par le pouvoir russe ?
Trente ans après la catastrophe de Tchernobyl, comment expliquer l’affaiblissement notable des mobilisations écologistes en Russie ? Une approche socio-historienne met en valeur, par-delà la seule explication par le nouvel autoritarisme, des facteurs de longue durée : l’élitisme et la technocratie éclairée.
Une vague de nationalisme souffle sur la frontière mouvante qui sépare la Russie de l’Ukraine orientale. La tentation est grande de ressortir les vieux discours issus de la Guerre froide, mais à trop vouloir s’appuyer sur les structures obsolètes de la géopolitique, on porte un regard trop distant sur le monde, quitte à en manquer l’essentiel.
La Russie post-soviétique a connu une croissance rapide des inégalités en même temps qu’une crise démographique conduisant à l’adoption d’une politique nataliste et de valorisation de la famille traditionnelle. Comment cette situation peut-elle évoluer dans le contexte de nouvelle crise économique et géopolitique ?
La rhétorique anti-occidentale de Vladimir Poutine ne s’appuie pas seulement sur des penseurs d’avant la Révolution. Elle hérite également d’un courant nationaliste très actif dans l’Union soviétique d’après-guerre, et qui structure encore la société russe.
En Russie, l’appareil de propagande du gouvernement ne se limite pas à la sphère politique. En réécrivant l’histoire du pays, il entraîne, selon l’historienne Ekaterina Pravilova, une crise de la rationalité pour l’intelligentsia et la communauté scientifique russes. Article publié en partenariat avec la revue Public Books.
À l’heure où les experts occidentaux remarquent la montée de l’anti-américanisme en Russie, les USA s’interrogent sur les origines de cette opposition à leur égard. Avec cet essai, Eliot Borenstein explique que, contre toute attente, cette hostilité à l’Amérique naît d’une forme d’amour « qui n’ose dire son nom ». Article publié en partenariat avec Public Books.
Comment expliquer la popularité de V. Poutine en Russie ? Au delà des accusations de manipulation et de propagande, K. Clément retrace l’histoire et les caractéristiques du poutinisme, un système d’idées et de pratiques nourries de patriotisme et d’apathie politique.
Pour l’économiste ukrainien V. Vakhitov, les analyses de la crise politique ukrainienne exagèrent le poids de la tutelle russe. Le pays n’est pas aussi divisé qu’on l’affirme, partagé entre l’Ouest pro-européen et l’Est pro-russe. La révolte contre les autorités aujourd’hui est une protestation de grande ampleur contre un régime corrompu, qui confisque les richesses.
Dans un contexte de mécontentement social croissant et de crise économique, la Russie se serait-elle éveillée à la mobilisation collective ? Sur la base d’une vaste enquête réalisée dans les provinces russes, la sociologue Carine Clément insiste sur le potentiel d’auto-organisation de mobilisations venues d’« en bas », qui se multiplient sur le terrain de la vie quotidienne.
L’alternative autoritarisme ou démocratie est-elle un bon crible pour comprendre la réalité politique russe ? Stephen Holmes démontre que la Russie de Vladimir Poutine ressemble plus à celle de Boris Eltsine que les fidèles de l’un ou de l’autre ne le prétendent et explique la fonction politique des élections truquées dans la Russie d’aujourd’hui.
Déjà troublés par la reconnaissance de l’indépendance des républiques abkhazes et ossète du sud, de nombreux responsables régionaux de la Fédération de Russie remettent en cause la tutelle de Moscou, accusée de gérer la crise économique de façon autoritaire. La verticale du pouvoir, principal axe de la doctrine Poutine depuis 2000 pour maintenir son contrôle sur la Fédération, pourrait s’en trouver affaiblie.
Toute transition est-elle démocratique ? Selon Pierre Hassner, la transition que connaît actuellement la Russie sous le règne de Poutine s’oriente bien plutôt vers l’autoritarisme à l’intérieur, et la production de troubles dans les anciens pays satellites.
En remplaçant Poutine au poste de Président, Dmitri Medvedev est formellement devenu le nouveau maître de la Russie. Mais formellement uniquement, car le vrai pouvoir appartient aux groupes d’influence dont se compose le « système » créé par Poutine, et sur lequel Medvedev a peu de prise.