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Frank Street - A Gentleman’s Club

Essai Histoire

Du salon féminin au Gentlemen’s club
L’émergence de l’homosociabilité


par Audrey Siraud , le 30 novembre 2021


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Au XIXe siècle, le salon littéraire, organisé par les femmes depuis les Lumières, se voit supplanté par le gentlemen’s club, institution d’origine britannique, exclusivement masculine. De Paris à Londres, comment expliquer cette transition au sein des élites ?

D’après Maurice Agulhon, l’idéal de galanterie française, cette forme de politesse empressée, presque séductrice, associée au respect dû à une femme de haut rang, serait né « autour de 1830 pour condamner ou du moins déplorer l’irruption d’une nouvelle sociabilité anglomane dans laquelle la “galanterie” [recule] puisque la femme, laissée au foyer, [est] exclue » [1]. Aussi, en France, pays des salons organisés par les femmes depuis les Lumières, l’engouement des Britanniques pour des établissements exclusivement masculins, les gentlemen’s clubs, est bien souvent critiqué durant le premier XIXe siècle : la vogue des cercles d’élite masculins semble causer la séparation des époux et amorcer le déclin d’une influence féminine avérée depuis des siècles dans l’aristocratie. « Les Clubs sont une importation anglaise […]. Jamais, en France, nous n’eussions inventé, pour notre plaisir, ces établissements anti-féminins [2] », affirme ainsi l’écrivain Charles de Boigne en 1846, alors qu’il étudie les mœurs parisiennes.

Pourtant, en consacrant un article au Jockey-Club, fondé en 1834 à Paris, de Boigne dévoile la fascination que suscitent ces établissements uniques en leur genre, tout comme leur popularité croissante de part et d’autre de la Manche. À partir des années 1820, qu’ils soient d’origine aristocratique ou bourgeoise, hommes d’État, diplomates, militaires, banquiers, avocats, rentiers, écrivains, scientifiques ou artistes, les représentants de l’élite (tels que Talleyrand, Napoléon III, Alexis de Tocqueville ou Charles Darwin) deviennent tous membres d’un cercle masculin exclusif, tels que l’Athenaeum Club à Londres et le Cercle de l’Union à Paris. Ces établissements imposent progressivement leur idéal d’une sociabilité entre hommes, qui finit par redéfinir l’image du parfait gentleman. Mais pourquoi une telle transition a-t-elle lieu au XIXe siècle ? Comment se justifie la progressive disparition d’une sociabilité organisée autour du salon féminin au profit d’une sociabilité exclusivement masculine, incarnée par les gentlemen’s clubs  ? Dans quelle mesure leur constitution participe-t-elle à renverser les réseaux élitaires des Lumières et fait-elle basculer les notables d’une sphère publique dite mixte à une sphère privée masculine ? Quelles conséquences cela a-t-il sur les rapports femme-homme et sur la redéfinition des identités de genre, notamment de la masculinité ?

Un tel phénomène soulève dès lors un véritable paradoxe : alors même que la seconde moitié du XIXe siècle marque l’avènement du modèle de la famille nucléaire [3], de plus en plus considérée comme essentielle à l’accomplissement d’un homme, le système proposé par les gentlemen’s clubs est une menace potentielle envers la vie de famille et conjugale. Valeur refuge, l’Athenaeum et l’Union incarnent des espaces privilégiés pour une élite masculine qui entretient une relation complexe avec son homologue féminin. Phénomène culturel pour le moins singulier, l’engouement pour les gentlemen’s clubs repose sur leur capacité à dépasser la simple réunion élitaire. À la croisée entre idéaux révolus et en construction (qu’ils soient d’ordre familial, associatif, voire politique), les cercles deviennent les symboles d’une société en mutation.

Une sociabilité unique

À l’aube du XIXe siècle, au lendemain des Lumières et de la Révolution, les années 1750-1850 marquent le passage d’une France d’Ancien Régime à une société aristocratico-bourgeoise, largement inspirée du modèle politique et social anglais, alors en réorganisation. Dès la fin des années 1780 en Grande-Bretagne, une figure nouvelle émerge à la faveur de l’industrialisation, celle du patron d’industrie, qui intègre un monde refusé à ses ancêtres roturiers en accédant à la propriété terrienne et au prestige aristocratique qui y est associé. Cette nouvelle middle class constitue la grande bourgeoisie, la gentry, qui prône la retenue dans tous ses plaisirs, en opposition à une aristocratie perçue comme débauchée – à l’image des achats outranciers de perruques, pantalons et autres accessoires du prince-régent (futur George IV) au temps des guerres napoléoniennes. Mais dans le même temps, le modèle aristocratique – celui d’une élite hiérarchisée, endogame, héréditaire, puissante, riche et influente – attire davantage la bourgeoisie qu’il ne la repousse. Une sociabilité nouvelle, inspirée des idéaux nobiliaires d’antan mais adaptée à l’essor de la middle class, se met alors en place.

The Pickwick Club
the first full-page illustration by Sol Eytinge, Jr.
The Victorian Web

À ce titre, la pratique des gentlemen’s clubs est déjà bien connue des Britanniques, puisque Ben Jonson a créé à Londres la Fraternity of Sireniacal Gentlemen au début du XVIIe siècle, cercle qui réunit dans des taverns, comédiens, poètes et artistes pour des joutes verbales. Vers 1640, le mot club prend le sens d’association, en référence aux trèfles (clubs) d’un jeu de cartes, tandis que des lieux plus discrets, les cafés ou coffee-houses, permettent de débattre de questions politiques dans une relative liberté de parole. La première moitié du XVIIIe siècle est l’âge d’or de ces gentlemen’s societies, qui poursuivent le mouvement des Lumières françaises. En 1755, dans le Dictionary of the English Language, Samuel Johnson définit le « Club » comme « une assemblée de bons camarades, se rencontrant sous certaines conditions [4] ». Les premiers gentlemen’s clubs traditionnels, totalement privés, apparaissent quant à eux entre 1760 et 1780 entre Pall Mall et Saint James’s Palace à Londres. Ils prospèrent tout au long du XIXe siècle, mais les mutations sociales modifient leur composition. D’abord réservés à l’aristocratie, ils s’ouvrent bientôt à la haute bourgeoisie industrielle et à tout gentleman coopté et capable de payer une cotisation : « après tout, un club est un endroit où un homme se rend pour se retrouver parmi les siens [5] ». Ils incarnent désormais la sociabilité masculine à l’anglaise, dont l’exportation sur le sol français à partir des années 1820 déstabilise la société galante héritée des Lumières.

En effet, la société des salons parisiens se définit elle aussi dès le XVIIe siècle comme un espace urbain de sociabilité élitaire, réservé à une aristocratie soigneusement sélectionnée. En revanche, la maîtresse de maison y tient un rôle déterminant. Les salons, majoritairement littéraires au XVIIIe siècle, entendent agir sur la République des lettres, voire dans l’espace public des Lumières : en ces lieux désormais consacrés au travail philosophique, la présence des femmes laisse la place à des discussions érudites tout en empêchant les conflits. Elles sont les représentantes d’un ordre social et culturel conservateur, où le salon devient une institution dévolue à la conversation mondaine, en tant qu’annexe de la cour. En somme, les salons s’inscrivent dans les pratiques sociales de l’Ancien Régime. Il s’agit d’un « modèle national d’harmonie sociale », associant l’élégance, la douceur de vivre et l’esprit aux Lumières et à la philosophie [6]. Si un tel modèle est perturbé par la Révolution française, son existence n’est que progressivement remise en cause. Alors que quelques salons perdurent jusqu’à la fin du XVIIIe siècle, nombre de leurs caractéristiques sont reprises dans de nouvelles sociabilités, à l’image des cercles directement inspirés des gentlemen’s clubs : espaces urbains mondains, utiles à la diplomatie, où s’opèrent une sélection et un contrôle des membres, tout en offrant de multiples plaisirs et divertissements, aussi bien gastronomiques que conversationnels. Aussi, alors que la théorie des « sphères séparées » (développée dans un XIXe siècle idéalisant l’équilibre du foyer) estime que la femme d’un notable appartient à la sphère privée (soit l’environnement domestique) et le notable à la sphère publique (soit le monde du travail), des réunions entendent reproduire le processus en dehors du cadre familial stricto sensu. Les « paradis des femmes », ainsi que les nomme Antoine Lilti, sont donc rapidement concurrencés, voire remplacés par cette autre forme de sociabilité, où le « salon » devient genré : une sociabilité mondaine désormais complètement privée et exclusivement masculine.

Après 1815 et la défaite de Napoléon à Waterloo, les sociétés européennes entendent retrouver une unité et développent un réseau diplomatique auquel participent les clubs londoniens et parisiens. À ce titre, le Cercle de l’Union, fondé en 1828, souhaite favoriser le rapprochement de la France et de l’Angleterre, tandis que l’Athenaeum Club, fondé en 1824, regroupe l’ensemble de l’aristocratie intellectuelle et de la classe politique britannique. Lieux de rencontre des personnalités politiques, intellectuelles et journalistiques, ils modifient les hiérarchies sociales en soulignant l’exceptionnalité de leurs membres. Ils rassemblent ainsi des personnalités parfois radicalement opposées : l’Athenaeum réunit aristocrates et bourgeois, hommes politiques, ecclésiastiques, marchands, banquiers et une élite intellectuelle affirmée ; si l’Union réunit peu de classes sociales différentes, il amène des légitimistes à côtoyer des orléanistes et des bonapartistes. Lieux de rencontres des plus grandes maisons banquières d’alors, les deux associations infiltrent également le capitalisme financier du XIXe siècle. Ils sont donc les représentants d’une aristocratie dont ils définissent les critères – qu’ils reposent sur la richesse et le talent à l’Athenaeum (une aristocratie foncière privilégiant la plus-value de ses membres à leur origine sociale) ou sur la naissance et le titre à l’Union (un prestige mondain dont le pire châtiment serait la désocialisation) – et le lieu d’affirmation de l’homme du Monde, s’y voir admis devenant une distinction supplémentaire voire nécessaire.

En conséquence, leur influence se prolonge par-delà les murs mêmes de ces établissements : l’Athenaeum est un club majoritairement britannique avec lequel les membres voyageurs et expatriés aux quatre coins de l’Empire maintiennent un lien tout particulier ; l’Union est un cercle profondément parisien, qui entretient son cosmopolitisme par la nationalité de ses membres – s’il y a autant de Français que de Britanniques, on trouve également quelques Russes, Italiens et même des Japonais affectés à leur ambassade. Mais, le plus frappant est sans doute la répartition des membres au sein des deux capitales, dont ils investissent de plus en plus le centre-ouest, à proximité des institutions de l’État et des lieux de la mondanité. En maintenant leur prestige en dehors du club-house, ils participent à l’homogénéisation de quartiers résidentiels réservés aux élites sociales et financières. Dès lors, en vertu de telles dynamiques résidentielles, associées à leurs réseaux de sociabilité, ces notables tiennent une place toute particulière dans les relations diplomatiques des nations. De par le statut social et la profession de leurs membres, ils participent activement aux discussions préliminaires à n’importe quels conflits, traités et autres accords – comptant notamment parmi eux des membres des familles royales et impériales, comme « le prince de l’Entente cordiale », Edward VII, membre de l’Athenaeum et de l’Union. Les établissements sont prêts à s’adapter pour conserver leur influence et réussissent à se maintenir malgré la démocratisation de la société. Ils symbolisent la consécration d’un statut homosociable, entre pratiques mondaines oisives et exigences professionnelles. Ils incarnent un véritable réseau transnational, faisant d’eux les acteurs officieux de la politique des nations.

Le cercle
Jean Béraud (1911), Musée d’Orsay

Dès lors, l’importance croissante de cette homosociabilité, créatrice d’un monde nouveau, a une influence directe sur les rapports entretenus entre ces hommes d’élite et leurs homologues masculins. En leur sein, une virilité nouvelle est promue dès la seconde moitié du XIXe siècle, déstabilisant les rapports femme-homme – phénomène explicité par le journaliste Louis-Désiré Véron dans ses Mémoires (1856) :

Ce culte un peu païen pour la beauté des femmes n’est plus de notre temps. […] [P]eut-être, de nos jours, entoure-t-on la jeune fille et l’épouse plutôt de respect, d’estime, que de soins et de galanterie. Les cercles, les clubs, qui se multiplient chaque jour, nous éloignent de la société des femmes […] ; elles sont forcées de s’assouplir au sans-gêne de nos mœurs et de nos habitudes, voire même à la fumée narcotique de nos cigares [7].

L’ambivalence est telle que ces lieux de vie par et pour les hommes [8] sont tantôt considérés comme des refuges, des abîmes, voire des menaces pour la vie domestique des notables, tantôt décrits comme anti-féminins, tantôt comme profondément masculins, tandis que s’affirme une séparation idéale entre sphère privée et publique.

Le club, refuge masculin ?

Au milieu du XIXe siècle, le domicile des notables est à la fois un lieu de rendez-vous professionnels et de réceptions organisées par la maîtresse de maison. Aussi, le chef de famille peut ne l’être qu’en théorie – ce que comprend à ses dépens un certain gentleman, d’après une anecdote fictive du journal Vanity Fair du 1er janvier 1881 : alors que sa femme tient salon, ce gentleman se plaint de la nuisance d’une telle réception et voit son épouse lui répliquer : « la maison d’un homme est son Club, Monsieur ; la maison d’une femme est son boudoir [9]. » Dès lors, si le club est un foyer pour l’homme d’élite, c’est parce qu’il devient un étranger à son propre domicile, où une société dirigée par les femmes semble s’imposer.

Fatigués du rythme de vie mondain, les membres cherchent donc à se divertir avant de rejoindre le domicile familial. La fille aînée de Sir Walter Scott, Charlotte Sophia, mariée depuis 1820, se félicite ainsi de voir son époux, John Gibson Lockhart, revenir de très bonne humeur de son club, tout en précisant qu’elle conserve le contrôle :

[J]e ne sais pas ce que je ferais sans l’Athenaeum. Lockhart n’est jamais aussi divertissant que les jours où il s’y rend, et c’est cinq fois par semaine, mais je ne le laisse pas y rester longtemps [10].

Dès lors, un espace privé comme le gentlemen’s club offre un refuge à des notables ne pouvant trouver le repos à leur domicile : connu de tous, il est accessible à n’importe quel étranger souhaitant s’entretenir avec eux (pour les affaires, la politique ou raisons personnelles). Le club propose aux gentlemen des alternatives au foyer familial et paradoxalement une nouvelle indépendance : les membres y travaillent, dînent, dorment parfois, passent librement leur temps à jouer aux cartes (whist, piquet et bésigue), à lire le journal ou un ouvrage de la bibliothèque ou bien à discuter autour d’un verre. Reposant sur un système de parfaite confiance entre les membres, ces activités leur permettent de développer un véritable « art social » du loisir, symbole d’un espace récréatif unique en son genre, participant à l’enrichissement intellectuel, relationnel voire financier, des membres. Ils y voient la perspective d’un moment agréable, en compagnie d’amis ou dans le silence d’une solitude choisie, ce dont témoigne le journaliste Edmond Auguste Texier dans sa Lettre du 23 mai 1851 à propos de l’Athenaeum :

Ici, l’heure du dîner est l’heure solennelle ; c’est le moment consacré au repos […]. L’Anglais, tout entier à ses affaires, n’est pas assez riche de son temps pour consacrer une demi-heure à son déjeuner. […] À cinq heures il est libre, et c’est [...] dans les clubs qu’il fête, le verre en main, sa liberté [11].

Pour certains, cette liberté prend tant d’importance que le club devient dès les années 1850 leur deuxième demeure, sinon leur principale. Les membres y sont chez ceux : eux seuls peuvent décider de ce qui y est (in)acceptable, y introduire de nouvelles règles, se plaindre du personnel, profiter des aménagements – droits immuables rappelés par le comte de Luppé au centenaire de l’Union :

Ce sont eux qui connaissent le ton du cercle, l’ont en garde, l’orientent au besoin, lui conservent son pittoresque, […] puisque l’on est entre gens de bonne compagnie, de liberté de langage, puisque l’on est entre hommes, de sans-gêne grognon, puisque l’on est chez soi et que tous ont les mêmes droits [12].

The Athenaeum Drawing Room
James Holland et William Taylor (1843)

Le versement de la cotisation renforce et légitime ce sentiment de propriété : les membres payent un loyer commun, permettant de financer les charges de l’établissement comme le chauffage, l’éclairage ou le personnel, voire l’installation d’un réseau téléphonique dans les années 1880 [13]. Les membres entendent ainsi pérenniser leur indépendance domestique. En 1835 déjà, l’avocat Thomas Walker affirme que la plupart des membres de l’Athenaeum vivent « dans la même liberté que dans leur propre maison [14] », réalité confirmée par le Penny Magazine en 1837 :

Ici, les membres […] sont « chez eux », entourés du confort et de l’attention d’un hôtel à la mode. Ils peuvent se promener dans leurs « clubs », y passer la journée à leur guise, en lisant ou en écrivant, dîner seuls ou en compagnie, participer à une conversation ou se retirer dans un coin avec le journal [15].

En 1887, l’écrivaine et salonnière Juliette Lamber tient un discours similaire au sujet de l’Union :

Le cercle de l’Union [...] ressemble à un salon très fermé. Il est affectionné à l’égal d’un « chez soi » par certains de ses membres qui, veufs ou célibataires, ont pris l’habitude d’y passer les deux tiers de leur existence et d’y dîner tous les soirs [16].

Palace aussi agréable qu’une résidence privée, chaque membre vient, part, reste, s’absente, dispose de domestiques dont il n’a pas la responsabilité. Il fait finalement ce qu’il veut, quand il le veut, comme il le veut, sans que personne ne puisse le contredire. À son club, il trouve calme et sérénité. Il est libre de ses mouvements et n’est pas perturbé par les charges d’un véritable foyer ou par les plus strictes conventions sociales – certains membres se permettent ainsi d’y faire la sieste, chose impensable en compagnie d’une femme d’après les codes de la bienséance : à l’Athenaeum, le diplomate Charles-René Gavard voit « quelquefois le secrétaire du club obligé d’intervenir pour rappeler un ronfleur à l’ordre ou du moins à la mesure [17] ».

Dès lors, les clubs ont une place à part entière dans la vie de ces hommes, qu’ils soient célibataires, mariés ou veufs. Selon l’historienne Amy Milne-Smith, ces centres de vie masculins s’intègrent dans le champ encore plus large de l’homosociabilité élitaire, dont font partie les public schools, les forces armées, les universités ainsi que les réseaux professionnels et de loisir. Associés autour d’un même modèle de vie sociale et familiale, ils sont d’ailleurs de plus en plus nombreux à léguer des effets personnels à leur club, comme ils le feraient aux membres de leurs familles ; que cela soit de l’argent, des livres ou plusieurs queues de billard pour le philosophe Herbert Spencer. Cette connexion entre le membre et son club se traduit enfin par l’admission de ses fils et petits-fils : à l’Union sont réunies plusieurs générations de banquiers Mallet et Rothschild, de Montmorency-Luxembourg ou La Rochefoucauld ; à l’Athenaeum, des Acland, Baring, Lawrence-Parsons ou des ducs de Bedford. La pérennité de ces associations est alors assurée par une véritable continuité générationnelle et quasi familiale. Ces établissements incarnent ainsi un idéal domestique masculin, où le notable partage un moment de repos physique comme intellectuel avec ses pairs. Au sein de cette communauté, il trouve une tranquillité unique, préservée par l’exclusivisme social et culturel de l’institution.

Échappatoire ou rejet de la société des femmes ?

Toutefois, en dépit du statut de refuge qu’ils incarnent aux yeux de leurs membres, les gentlemen’s clubs ne font pas toujours l’unanimité, car ils menaceraient l’équilibre du foyer, érigé en valeur cardinale de la bonne société bourgeoise. Si les témoignages écrits sont rares, les femmes semblent néanmoins nombreuses à exprimer leur dissentiment envers ces « enclaves masculines [18] », comme le montre le poème satirique de Thomas Hood paru en 1838 dans The Mirror, où il rédige une plainte féminine sur l’obsession des hommes pour leur club :

De toutes les combines actuelles de l’Homme
Que le temps nous amène à supporter,
Un fléau surpasse le malfaisant projet,
Qui sépare les époux !
Mes amies, elles, sont toutes d’accord ;
Elles connaissent à peine leur mari ;
Et leur cœur et leur voix s’unissent avec moi
« Nous détestons ce nom de Clubs ! » [19]

Le personnage de Mrs. Stubbs (« Madame la laissée-pour-compte ») y assimile ainsi les clubs à un fléau destructeur pour la vie conjugale. Elle affirme que les femmes vouent une véritable haine à ces temples masculins où tous les maris fuient l’ennui et les tracas quotidiens. Abandonnées, elles n’ont plus d’époux : désormais en concubinage avec leur club, ils rentrent tard dans la nuit, titubants, grognons ou guillerets, prêts à terminer leur soirée par un dernier loisir. Certes, la description est sans doute exagérée, comme dans n’importe quelle satire, mais elle repose sur une réalité : en s’opposant à l’idéal d’harmonie maritale qui se développe au XIXe siècle, le club devient l’ennemi des femmes, et la figure de l’épouse esseulée, un thème littéraire. Paradoxalement, l’attrait pour le club dévoile surtout l’imperfection de cet idéal, son ambiguïté et ses hypocrisies face à l’omniprésence des mariages arrangés au sein des élites.

Aussi, dans la seconde moitié du XIXe siècle, la popularité des clubs se justifie comme le moyen de fuir une vie qui indisposerait l’homme davantage que la femme. Cette dernière, loin d’être abandonnée, s’adonnerait à ses propres activités genrées (comme la tenue du foyer, les activités manuelles et l’organisation de réceptions et de bals). Pour certains, il s’agit d’ailleurs bien plus d’un refuge que d’un rejet du sexe féminin : habitués aux enclaves homosociables, ils sont toujours entourés d’hommes et ne sont pas forcément à l’aise avec les femmes, par timidité parfois, par manque de liberté toujours. Face à l’intransigeance de l’étiquette, le club devient un abri idéal, à l’image du Colonel Rawdon Crawley dans Vanity Fair (1848) :

On a déjà dit que l’honnête Rawdon n’avait été à aucune époque de sa vie très habitué à la compagnie des dames. Avec les hommes au Club ou à la caserne, il se portait assez bien ; et pouvait monter, parier, fumer ou jouer au billard avec les plus téméraires d’entre eux. [20]

Ce repli dans un espace et des activités homosociables signale la recherche d’une échappatoire vis-à-vis d’un idéal de galanterie souvent perçu comme tyrannique. Ce phénomène est caractéristique de la profonde ambivalence des relations s’établissant entre les hommes et la vie domestique au XIXe siècle : si les clubs s’affirment comme des espaces dédiés à une nouvelle vie de famille, mais paradoxalement situés hors de la cellule familiale, ils ne disposent pas des fondamentaux de n’importe quel foyer (ne serait-ce que la vie conjugale). Alors, la menace qu’incarnerait cette supposée indépendance vis-à-vis de la société des femmes ne découlerait que d’une mauvaise interprétation [21]. Dans les faits, les archives des différents clubs montrent que si les hommes se rendent presque quotidiennement à leur cercle, ils n’y sont en général présents que de quinze à dix-neuf heures : moins d’un dixième des membres y dînent chaque soir, la plupart célibataires ou veufs. En outre, lire le journal, écrire leur correspondance, parcourir la bibliothèque ou encore jouer aux cartes avec quelques amis, sont des activités qui, d’après Thomas Walker, ne sont d’aucun intérêt pour les femmes, qui devraient au contraire se réjouir qu’elles soient pratiquées en leur absence. Enfin, à celles arguant que le luxe et le confort offerts par ces établissements ne peuvent que dévaloriser le foyer aux yeux de l’homme marié, il rétorque que la réalité d’un foyer ne peut être surpassée [22]. Un tel établissement est certes complémentaire à la vie de famille, mais il ne peut complètement la remplacer : le club est l’élément nécessaire au bon équilibre des relations conjugales et familiales ; il est un moyen d’inculquer la tempérance aux jeunes hommes, et d’habituer le célibataire à la vie domestique.

La partie de whist
Henri-Louis Brispot (1920)

Assumer le rejet de l’autre

Si les mécontentements féminins semblent réguliers, ces établissements se veulent par bien d’autres aspects davantage anti-étrangers qu’anti-féminins. En effet, les femmes ne sont pas entièrement absentes de la vie des gentlemen’s clubs. Pour remédier aux critiques, certains cercles parisiens organisent ainsi de grands dîners où sont conviées les femmes. Toutefois, l’Union y est farouchement opposée et reste un temple masculin. Rare exception, le marquis de Mirabeau prend l’habitude, à la fin des années 1850, d’y emmener sa petite nièce, devenue la femme de lettres Gyp, qui raconte en 1929 les après-midi insouciants passés dans les salons du cercle, avant de s’en voir refuser l’accès une fois arrivée à l’âge adulte :

Mon oncle Mirabeau me promenait, m’emmenait avec lui au Cercle de l’Union comme quand j’étais petite, et me faisait écrire ses lettres dans le petit salon au pied de l’escalier. Mais je ne montais plus comme autrefois dans les salons aux heures où il n’y avait personne [23].

À l’Athenaeum, au contraire, sont organisés tous les lundis de novembre à juin des conversazioni, où les femmes sont invitées dès 1824. Ensuite transférés au mercredi soir entre vingt-et-une heures et minuit, ces rendez-vous sont appréciés de certains, largement rejetés par d’autres. Le 26 février 1830, dans une lettre adressée à sa sœur Eleanor, le géologue Charles Lyell est convaincu des avantages du procédé, mais note néanmoins plusieurs critiques :

Certains de nos membres se plaignent de l’invasion et se retirent dans la bibliothèque, […] mais maintenant les femmes la remplissent tous les mercredis soir, ainsi que la salle des journaux, et me semblent examiner chaque recoin avec une sorte de curiosité avec laquelle on aimerait s’immiscer dans un harem. [24]

Alors que les femmes envahissent les espaces réservés aux membres, les ressentiments semblent s’intensifier. Pour certains, ces soirées font perdre l’essence sociale du club, et le déplaisir qu’elles procurent devient un supplice pour un certain misogyne cité par Francis G. Waugh :

Moi qui suis un ermite à ma manière, et nullement enclin à la sociabilité, je dois avouer que je n’ai jamais ressenti un tourment plus mélancolique que lorsque, pour la première fois, j’ai vu […] un groupe d’envahissantes Amazones, au cou nu et aux robes jaunes, parcourant les salons que j’espérais avoir été à jamais consacrés aux redingotes et à la modeste vertu des cravates […]. [C]’est vrai, ce mercredi n’est qu’un jour dans la semaine, mais, alors, ce jour-là nous déstabilise pour les six autres […]. D’ailleurs, quelles sottises pour le ton de notre société ! Au lieu du silence érudit qui y respirait jusque-là, ou des murmures de discussions scientifiques ou de disputes littéraires, nous entendons les charmants chuchotements de “La nuit dernière – femme charmante – beaux yeux – bon buste – jolie cheville !” [25]

Il semblerait que les réfractaires obtiennent gain de cause puisque l’on ne retrouve plus aucune mention de ces réunions après le 7 juin 1831, lorsque le Comité a pour ordre du jour l’admission des femmes lors des soirées du mercredi : la proposition n’est pas acceptée, bien qu’aucune plainte ne soit officiellement enregistrée [26]. Cet intermède de mixité de genre s’achève donc rapidement et aucune suite n’y est donnée avant 1924, année où, à l’occasion du centenaire du club, l’écrivain et journaliste Humphry Ward se félicite du retour de ces conversazioni [27]. Les portes de l’Athenaeum ne se referment néanmoins pas complètement aux élites féminines : elles y sont invitées occasionnellement. Situé à proximité de Buckingham Palace, le club est un lieu de passage des cortèges royaux : il reçoit ainsi 1 130 femmes et enfants pour assister à la parade organisée lors du couronnement de la reine Victoria le 28 juin 1838.

Au cercle
Jean Béraud (1908), Petit Palais

Les premières initiatives féminines de clubs voient pourtant le jour dès le XVIIIe siècle, avec la Female Coterie (1770-1777) : mais, dans ce club mixte, l’égalité des sexes n’est qu’illusoire, l’élection d’une femme mariée impliquant l’admission de son mari (ce qui n’est pas réciproque) [28]. Il faut attendre les années 1880 à Londres que de véritables women’s clubs fassent leur apparition, à l’image du University’s Women’s Club [29], ce malgré les critiques récurrentes vis-à-vis de cette sociabilité. En France, ils n’existent tout simplement pas : la maîtresse de maison reçoit et divertit ses amies dans ses appartements, faute d’avoir déjà goûté aux plaisirs d’un cercle. Ainsi, que cela soit à l’Athenaeum, où les portes ne sont pas totalement hermétiques puisque les femmes y sont admises à de rares occasions, ou au Cercle de l’Union, où elles sont au contraire totalement fermées, la figure féminine reste exclue de ce mode de sociabilité pour la majeure partie du siècle.

Toutefois, si Humphry Ward estime qu’une telle pratique est significative de la prédominance masculine de l’époque28, il faut rappeler que, plus que d’être anti-féminins, ces clubs sont tout simplement anti-étrangers. En effet, toute personne hors des critères d’admission et non élue ne peut accéder à l’établissement. Si les femmes en sont exclues, les autres hommes le sont tout autant. Cette ambiguïté envers les visiteurs est d’ailleurs reflétée par le terme d’« étranger », utilisé pour désigner toute personne n’étant pas membre du club en question. À l’Athenaeum, une salle leur est réservée, la minuscule Stranger’s Room, alors que la question de leur admission fait continuellement débat. Ce n’est que le 11 mai 1914 que les membres sont autorisés à inviter, une fois par semaine, deux gentlemen « étrangers » à dîner dans la Coffee-Room [30]. Symbole de cet exclusivisme, le valet de pied refuse l’entrée à toute personne ne faisant pas partie de l’établissement ou n’y ayant pas été invitée : la porte d’entrée forme une véritable frontière entre le monde extérieur et intérieur à l’établissement. Une fois à son club, l’individu n’est là pour personne d’autre que les membres. Cette prérogative se retrouve d’ailleurs dans les clubs de femmes, à l’image de l’Alexandra Club, fondé à Londres en 1884 et auquel le prince de Galles se serait vu refuser l’accès alors qu’il venait rendre visite à son épouse, Alexandra de Danemark. Symbole d’un exclusivisme notoire, le club est donc avant tout un refuge vis-à-vis du monde extérieur. Aussi, la décision de l’Assemblée générale du Cercle de l’Union du 4 juin 1898 est révolutionnaire : désormais, les personnes étrangères au cercle peuvent y dîner en tant qu’invitées et ont accès à la salle de billard, à la bibliothèque et à la petite salle à manger. L’Article 3 précise même que les membres peuvent « amener à dîner des femmes de la Société [31] » : aucune n’a alors franchi le vestibule de l’Union, si ce n’est la lingère. On construit toutefois une passerelle spécialement réservée à l’usage de ces étrangers pour accéder à la salle à manger : tout en ouvrant ses portes, l’Union se protège ainsi des comportements trop intrusifs et préserve son havre de paix.

Finalement, au cours du XIXe siècle, des institutions comme l’Athenaeum Club et le Cercle de l’Union se montrent indispensables à l’existence de leurs membres et, plus largement, aux classes dirigeantes des principales capitales européennes. Si les notables fuient le foyer familial, ce n’est en aucun cas pour renier les habitudes domestiques, mais pour s’éloigner de leurs inconvénients. Les aménagements luxueux, la mise à disposition d’un personnel particulièrement performant, une intimité et une liberté incomparables permettent aux membres de se sentir comme chez eux. Pour beaucoup, il s’agit d’une véritable famille d’adoption où sont proposées des opportunités de loisir inédites et un cadre de vie complémentaire. Si les clubs sont perçus comme une menace à la vie de famille, c’est avant tout parce qu’ils fonctionnent comme un espace domestique homosociable rival et non parce que leur état d’esprit s’oppose à cette vie de famille ou même aux femmes [32]. Par la pratique de telles activités, par l’aménagement de telles commodités et par la mise en place d’un tel système domestique, l’Athenaeum et l’Union imposent leur système de sociabilité aux élites masculines et nous renseignent sur les évolutions des rapports entre les hommes et les femmes au cours du siècle. D’après le comte de Luppé, en cherchant à :

[e]xclure son prochain, jouir du commerce et de la conversation d’un petit nombre d’élus, trouver, dans un cadre familier qui rappelle le chez-soi, bonne cuisine, plaisir du jeu, bon fauteuil, abri contre l’humeur querelleuse des femmes, l’homme a enclos dans l’inviolable enceinte des cercles la satisfaction de ces légitimes désirs [33].

En somme, avec les gentlemen’s clubs, l’espace de loisir est redéfini au prisme d’une domesticité idéale. Ce n’est pas tant un lieu de rencontres et d’échanges, qu’un refuge ordonné : les règles empêchent toutes (mauvaises) surprises et assurent un cadre de vie respectable et respecté. Ces cercles masculins n’ont tout simplement pas la même vocation que les salons du XVIIIe siècle. Ils ne sont donc pas tant un rejet de la femme que des codes associés à la présence de n’importe quel étranger. Les membres cherchent à (re)trouver une liberté de mouvement dans une société gouvernée par le bon ton et la courtoisie, faisant de ces établissements des alternatives plutôt que de véritables remplacements aux salons et aux rythmes excentriques de la vie mondaine. Par leur exclusivité, ils sont bien plus qu’une sociabilité d’un nouveau genre : ils influencent les rapports femme-homme et deviennent un mode de vie à part entière, l’incarnation d’une nouvelle indépendance domestique, une communauté homosociable, voire de véritables entités familiales associatives, que chaque établissement est fier de mettre en valeur à l’échelle locale comme internationale.

par Audrey Siraud, le 30 novembre 2021

Aller plus loin

Pour aller plus loin
• Valérie CAPDEVILLE et Éric FRANCALANZA, La sociabilité en France et en Grande-Bretagne au Siècle des Lumières. L’émergence d’un nouveau modèle de société – Tome III : Les espaces de sociabilités, Paris, Le Manuscrit, « Transversales », 2014.
• Alain CORBIN, Jean-Jacques COURTINE et Georges VIGARELLO (dir.), Histoire de la virilité, Paris, Éditions du Seuil, « L’univers historique », 2011.
• Diana KENDALL, Members Only : Elite Clubs and the Process of Exclusion, Lanham (Maryland), Rowman & Littlefield Publishers, Inc., 2008.
• Amy MILNE-SMITH, London Clubland : A Cultural History of Gender and Class in Late Victorian Britain, New York, Palgrave Macmillan, 2011.
• John TOSH, A Man’s Place : Masculinity and the Middle-Class Home in Victorian England [1999], New Haven (Connecticut) et Londres, Yale University Press, 2007.

Pour citer cet article :

Audrey Siraud, « Du salon féminin au Gentlemen’s club. L’émergence de l’homosociabilité », La Vie des idées , 30 novembre 2021. ISSN : 2105-3030. URL : https://laviedesidees.fr/Du-salon-feminin-au-Gentlemen-s-club

Nota bene :

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Notes

[1Maurice AGULHON, Le Cercle dans la France bourgeoise (1810-1848). Étude d’une mutation de sociabilité, Paris, Armand Colin, «  Cahiers des Annales  », n°36, 1977, p. 52.

[2Charles de BOIGNE, «  Le Jockey-Club  », Le Diable à Paris. Paris et les Parisiens. Mœurs et coutumes, caractères et portraits des habitants de Paris, Paris, J. Hetzel, 1846, p. 237.

[3Voir Catherine HALL et Leonor DAVIDOFF, Family Fortunes. Hommes et femmes de la bourgeoisie anglaise (1780-1850) [1987], Paris, La Dispute, «  Le genre du monde  », 2014.

[4«  An assembly of good fellows, meeting under certain conditions  ». Samuel JOHNSON, «  Club  », Dictionary of the English Language, Londres, W. Strahan, 1755.

[5«  A club, after all, is a place where a man goes to be among his own kind  ». Anthony LEJEUNE et Malcolm LEWIS, The Gentlemen’s Clubs of London [1979], Londres, Parkgate Books, 1997, p. 19

[6Antoine LILTI, Le Monde des salons. Sociabilité et mondanité à Paris au XVIIIe siècle, Paris, Fayard, 2005, p. 58.

[7Louis-Désiré VÉRON, Mémoires d’un bourgeois de Paris, Paris, Librairie Nouvelle, 1856, vol. V, p. 326.

[8Amy MILNE-SMITH, «  A Flight to Domesticity  ? Making a Home in the Gentlemen’s Clubs of London (1880- 1914)  », The Journal of British Studies, n°45, octobre 2006, p. 807.

[9«  A man’s house is his Club, Sir  ; a woman’s house is her boudoir  ». Amy MILNE-SMITH, «  A Flight to Domesticity  ?  », art. cit., p. 807.

[10«  ‘Well,’ said Mrs. Lockhart, ‘I don’t know what I should do without the Athenaeum. Lockhart is never so entertaining as the days he looks in there, and that is five times a week, but I don’t let him stay there long.’  ». Sir Charles LYELL, Life, Letters and Journals of Sir Charles Lyell, Bart., Londres, John Murray, 1881, vol. I, p. 362.

[11Edmond-Auguste TEXIER, Lettres sur l’Angleterre (Souvenirs de l’Exposition universelle), Paris, Librairies Garnier Frères, 1851, p. 113

[12Comte de LUPPÉ, Plaisirs de Cercle : Le Centenaire de l’«  Union  », Extrait du Correspondant du 25 février 1929, Paris, Imprimerie Louis de Soye, 1929, p. 15.

[13Archives privées de l’Athenaeum Club, Dossier COM 23/1/2 – Annual Report (1886), 20 avril 1886  ; Annual Report (1898), «  Report on the Question of Enlarging the Club-House  », 9 mai 1898  ; Archives privées du Cercle de l’Union, Dossier 38 – Immeuble 11 boulevard de la Madeleine.

[14«  Many of these are to be met with every day, living with the same freedom as in their own houses  ». Thomas WALKER, The Original, Blanchard Jerrold, Londres, Grant & Co., 1874, vol. II, p. 134.

[15«  Here the members are in their own houses – they are “at home,” surrounded by the comforts and attention of a fashionable hotel. They can stroll down to their “clubs,” pass the day as they please, reading or writing, dine singly or in company, join in conversation, or retreat into a corner with the newspaper  ». THE PENNY MAGAZINE [anonyme], «  A Looking Glass for London, n°X  », Monthly Supplement of the Penny Magazine, n°323, 15 avril 1837, p. 139.

[16Paul VASILI (comte de) [pseudonyme de Juliette LAMBER], La Société de Paris, Paris, Nouvelle Revue, 1887, vol. I, p. 453.])

[17Charles-René GAVARD, Un diplomate à Londres : lettres et notes (1871-1877), Paris, E. Plon, Nourrit et Cie, 1895, p. 85-86.

[18Valérie CAPDEVILLE, «  The Ambivalent Identity of Eighteenth-Century London Clubs as a Prelude to Victorian Clublife  », Cahiers victoriens et édouardiens [en ligne], n°81, 1er juin 2015, §24.

[19«  Of all the modern schemes of Man / That time has brought to bear, / A plague upon the wicked plan, / That parts the wedded pair  ! / My female friends they all agree / They hardly know their hubs  ; / And heart and voice unite with me / ‘We hate the name of Clubs  !’  ». Thomas HOOD, «  Comic Annual – Spirit of the Annuals : Clubs, Turned up by a Female Hand  », The Mirror of Literature, Amusement and Instruction, Londres, J. Limbird, n°873, vol. 31, 1838, p. 7.

[20«  It has been told before that honest Rawdon had not been much used at any period of his life to ladies’ company. With the men at the Club or the Mess-room, he was well enough  ; and could ride, bet, smoke, or play at billiards with the boldest of them  ». William Makepeace THACKERAY, Vanity Fair : A Novel without a Hero, Londres, Bradbury & Evans, 1849, p. 437.

[21«  I am aware that such is not the view which ladies are disposed to take of the subject, but I think they judge from a misapprehension of facts […]. The objections I have heard stated are – that clubs make men independent of female society, the effects of which are already sensibly felt  ; that they prevent men from thinking of marrying  ; and that, if they do marry, the luxury and comfort they have enjoyed at so easy and cheap a rate render them discontented with home  ». Thomas WALKER, The Original, op. cit., vol. II, p. 138.

[22«  When ladies suppose that the luxuries and comforts of a club are likely to make men discontented with the enjoyments of domestic life, I think they wrong themselves. One of the chief attractions of a club is, that it offers an imitation of the comforts of home, but only an imitation, and one which will never supersede the reality  ». Ibid., vol. II, p. 141.

[23Du temps des cheveux et des chevaux, Paris, Calmann-Lévy, 1929. Cité dans Patrick de GMELINE, De l’Union au Nouveau Cercle, le Nouveau cercle de l’Union : 175 ans d’histoire, Paris, Éditions de Venise, 2003, p. 22-23

[24En langue originale, «  Some of our members grumble at the invasion, and retreated into the library, which was respected at first, but now the women fill it every Wednesday evening, as well as the newspaper room, and seem to me to examine every corner with something of the curiosity with which we should like to pry into a harem  ». Sir Charles LYELL, Life, Letters and Journals, op. cit., vol. I, p. 263.

[25«  I, who am a hermit in my own way, and by no means too inclined to sociality must confess that I never felt a more melancholy pang than when, for the first time, I beheld […] a party of invading Amazons, with bare necks and yellow gowns, sweep across the chambers I had hoped would have been for ever sacred to frock coats and the modest virtue of cravats […] true, that Wednesday is only one day in the week, but, then, that one day unsettles us for the six others […]. Besides, what mischief to the tone of our society  ! Instead of the learned silence hitherto breathing around, or the murmurs of scientific discussion or literary dispute, we hear the suaves susurri of “Last night – charming woman – beautiful eyes – good bust – pretty ankle  !”  ». Francis G. WAUGH, The Athenaeum Club and its Associations, Londres, tirage privé, 1894, p. 9.

[26«  Took into consideration the Special Summons for the day, “To consider the expediency of admitting Ladies on the Wednesday Evenings in June”, and a proposition to the effect that Ladies be admitted was no agreed to  ». Archives privées de l’Athenaeum Club, Registre COM 1/4 – General Committee Minute Book n°4 (1831-1834), «  Minute, 7th June 1831  », p. 39.

[27«  It should be added that these were very successful for a number of years  ; but it is significant of the masculine predominance of those days that ladies were not invited. A contrast indeed to the crowded conversazione of 1924, which was the most brilliant feature of our Centenary Celebrations  ». Humphry WARD, History of the Athenaeum (1824-1925), Londres, tirage privé, 1926, p. 27.

[28Valérie CAPDEVILLE, «  The Ambivalent Identity of Eighteenth-Century London Clubs  », art. cit., § 23.

[29David DOUGHAN et Peter GORDON, Women, Clubs and Associations in Britain, Londres, Routledge, 2006.

[30Archives privées de l’Athenaeum Club, Registre COM 1/27 – General Committee Minute Book n°25 (1910-1919), «  Annual General Meeting, 11th May 1814  », p. 40.

[31Archives privées du Cercle de l’Union, Registre 11 – Délibération du Comité et du Sous-Comité (2 avril 1890 au 10 janvier 1900), «  Règlement institué en conséquence du vote émis par l’Assemblée générale du 4 juin 1898  ».

[32En langue originale, «  Thus any threat to family life from clubs was because they functioned as a rival homosocial domestic space, not because their spirit was antithetical to domesticity  ». Amy MILNE-SMITH, «  A Flight to Domesticity  », art. cit., p. 818.

[33Comte de LUPPÉ, Plaisirs de Cercle, op. cit., p. 5.

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