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Essai Philosophie Portraits

Renversements de Monique Wittig


par Sara Garbagnoli & Théo Mantion , le 24 septembre


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Romancière, militante et théoricienne lesbienne, Monique Wittig (1935-2003) a mené une réflexion sur l’oppression dans laquelle l’hétérosexualité enferme les femmes. Inspirée par le féminisme matérialiste, son œuvre est cependant loin de se limiter à son concept-phare, la « pensée straight ».

Romancière, militante et théoricienne lesbienne, Monique Wittig (1935-2003) a mené une réflexion sur l’oppression dans laquelle l’hétérosexualité enferme les femmes. Inspirée par le féminisme matérialiste, son œuvre est cependant loin de se limiter à son concept-phare, la « pensée straight ».

Née en 1935 à Dannemarie (Alsace) et décédée à Tucson (Arizona) en 2003, la romancière et théoricienne lesbienne Monique Wittig jouit ces dernières années d’un important mouvement de redécouverte et de reconnaissance, à l’université et dans les espaces littéraires, artistiques et militants, en France comme à l’étranger. Enrichi de découvertes récentes, ce portrait articule quelques-unes des nombreuses facettes de la vie, de l’œuvre et de l’engagement de Wittig.

L’enfant prodige du Nouveau roman (1964-1967)

À 29 ans, Monique Wittig fait son entrée dans l’arène littéraire avec L’Opoponax (1964), immédiatement consacré par le prix Médicis. Porté par un « on » indéfini et inassignable, ce récit écrit à hauteur d’enfant procède à « l’exécution capitale de quatre-vingt-dix pour cent des livres qui ont été faits sur l’enfance [1] », constate Marguerite Duras. Fidèle à l’engagement des Nouveaux Romanciers à s’attaquer à ce qu’Alain Robbe-Grillet appelait les « formes périmées [2] », cette nouvelle écriture de l’enfance permet à Wittig de se hisser aux avant-postes du Nouveau Roman.

Elle se revendique ouvertement de ce mouvement dont les ténors, Claude Simon en tête (il signe un éloge sobrement intitulé « Pour Monique Wittig [3] »), reconnaissent immédiatement la promesse de renouvellement apportée par Wittig. Pour Jérôme Lindon, le directeur des Éditions de Minuit et principal architecte de ce mouvement littéraire, il s’agit là du meilleur premier roman qu’il a publié depuis Samuel Beckett. Mais cette affiliation immédiate passe sous silence un aspect pourtant central de cette « œuvre éclatante [4] ».

En effet, c’est un roman d’apprentissage d’un type particulier que Wittig signe là, car à mesure que ses protagonistes grandissent, le désir de la jeune Catherine Legrand pour son amie Valérie Borge prend forme. En creux de cette forme insaisissable et fugace (que d’aucuns nomment « opoponax ») une subjectivité perce peu à peu, jusqu’à l’éclosion finale d’un « je » lesbien qui trouve en un vers de Maurice Scève son expression : « Tant je l’aimais qu’en elle encore je vis [5] ». Si Mireille Boris, critique à L’Humanité, perçoit bien la mise en sourdine des codes millénaires de la division sociosexuelle durant l’enfance [6], la centralité du désir lesbien disparaît dans la réception du livre. C’est pourtant bien ce que Wittig essaie de faire passer dans ce qu’elle expliquera, plus tard, avoir été le sens de ce « cheval de Troie [7] » littéraire.

Au milieu des années 1960, nourrie par la Nouvelle Vague et en particulier le cinéma de Jean-Luc Godard [8], Wittig pose les jalons d’une pensée esthétique qu’elle poursuivra jusqu’à la fin de sa vie. Dans un court essai sur la discontinuité dans le cinéma de Godard, Wittig défend la création d’œuvres qui éclatent la représentation de « types » conventionnels. Les figures lacunaires qu’elle invoque alors disloquent la continuité d’action qui caractérise le récit bourgeois. Les conséquences politiques de ce formalisme, nous le verrons, seront profondes. Elle inaugure cette poétique de la lacune dans une série de pièces radiophoniques qui lui sont commandées par la radio allemande qui, depuis quelques années, sollicite des écrivains du Nouveau Roman pour investir ce médium particulier qu’est le Hörspiel.

Dans l’une d’entre elles, intitulée La Récréation ou Massage, Wittig entraîne deux interlocutrices, une jeune femme et sa masseuse, dans un délire langagier où les paroles sont frictionnées, voire violentées comme le corps de la massée. Sans arrimage autre que le mouvement propre du langage, cette explosion du discours par les mots constitue un trait caractéristique de l’intervention wittigienne. Ce rapport au « délire » de la langue, Wittig l’avait déjà remarqué chez Flaubert, vers lequel elle se tourne dans un essai de 1967 [9], et qu’elle considère comme précurseur : il a compris la manière dont la forme opère un retour critique sur le contenu. Faisant sienne cette observation, Wittig sort de ces années d’expérimentation avec un projet formel dont l’avenir radicalisera la portée politique.

Bandeau décorant le livre L’Opoponax à sa sortie (1964)

Connivences et révolutions (1968-1970)

En 1968, Monique Wittig s’engage pleinement dans le mouvement de révolte étudiant et ouvrier. Pour elle, comme pour nombre de militantes, Mai 68 est une fabrique de radicalité, un point de rupture avec le silence ou la censure, puisque désormais les opprimés peuvent enfin prendre la parole et envisager un autre monde possible – même si femmes. En effet, Wittig sort de Mai politisée dans un sens féministe : l’expérience de la misogynie des collectifs de la gauche révolutionnaire la convainquent de la nécessité d’un mouvement de libération des femmes. Elle initie alors des réunions avec d’autres militantes, parmi lesquelles Josiane Chanel, Suzanne Fenn et Antoinette Fouque.

Mais Wittig est écrivain [10] et son investissement militant agit directement sur sa pratique d’écriture. En 1969, cinq ans après L’Opoponax, paraît Les Guérillères, chanson de geste féministe où elle fait advenir un monde d’après la domination. Le livre relate les vicissitudes d’une guerre surprenante : il s’agit d’un violent affrontement entre deux groupes, le premier est désigné par « elles », le second par « ils ». « Elles » se réfère aux personnes que l’ordre social désigne comme « différentes » et « particulières », tandis que « ils » renvoie à ceux qui sont socialement perçus comme l’incarnation du neutre. À travers son travail pronominal et l’usage intensif du « elles », Wittig tente d’universaliser le point de vue des opprimées et de le rendre général, c’est-à-dire d’en faire le point de vue humain.

Ce texte, éminemment poétique et incantatoire, place en son centre non seulement la question de l’infériorisation d’un groupe par un autre, mais aussi la violence libératrice des combats qui font arriver un monde nouveau où la domination n’a plus cours. D’autres choix formels déstabilisent le lecteur : le néologisme qu’elle choisit comme titre, la discontinuité du texte et l’écriture en fragments, autant de prélèvements dans le canon littéraire, qu’elle réécrit, de la Genèse à Lacan, en passant par Pascal et Mao Tsé-toung…

Un travail visuel inédit altère la structure du livre : chaque partie de l’ouvrage s’ouvre par une page blanche ornée d’un cercle, renvoyant à l’idée de cycle et de recommencement, et des listes de prénoms en majuscules ponctuent les fragments du texte pour signifier la naissance d’un « nous » collectif. Ces choix esthétiques sont porteurs d’une vision politique qui, bouleversant la perception conventionnelle des sujets opprimés pour en faire des subjectivités nouvelles, ne tardera pas à descendre dans la rue.

1970, c’est le temps de l’éclatement de l’action féministe. Wittig organise avec le soutien de Margaret Stephenson (Namascar Shaktini), Marcia Rothenberg et sa sœur Gille Wittig une prise de parole féministe non mixte à la faculté de Vincennes. À la suite de cet événement, elle rédige pour le mensuel gauchiste L’Idiot international un texte intitulé « Pour un mouvement de libération des femmes [11] » qui, cosigné avec ses trois amies politiques, définit les femmes dans des termes matérialistes comme « la classe la plus anciennement opprimée [12] ». Par la force de ces analyses, l’article devient le manifeste du mouvement féministe naissant.

Quelques mois plus tard, le 26 août 1970, en solidarité avec la grève générale des femmes américaines qui célèbrent ce jour-là le cinquantième anniversaire de l’obtention de leur droit de vote, neuf militantes, dont Monique Wittig, Christine Delphy et Christiane Rochefort, rentrent dans l’histoire en apportant sous l’Arc de Triomphe une gerbe « à la mémoire de la femme du soldat inconnu ». Arrêtées par la police au milieu de leur action, elles ne resteront plus silencieuses, plus invisibles : déjà dans le « panier à salade » qui les mène au commissariat, elles chantent d’une seule voix. Médiatisée, l’action devient le geste fondateur du Mouvement de libération des femmes (MLF). Désormais « plus rien ne sera comme avant », déclare Wittig dans un entretien à Actuel, et de continuer : « Le mouvement, c’est la chose la plus vitale pour nous, c’est notre survie dans cette société [13] ».

Monique Wittig, « Un moie est apparu… », Le torchon brûle, n° 5, p. 3

Figurer le lesbianisme : poétique et politique (1970-1976)

Monique Wittig participe à toutes les grandes actions du MLF. Le 5 avril 1971, son nom figure sur « la liste des 343 Françaises qui ont le courage de signer le manifeste “je me suis fait avorter” » que publie Le Nouvel Observateur. Cet appel à légaliser l’avortement en France témoigne de l’enjeu principal des combats menés par le mouvement féministe : permettre aux femmes de se réapproprier leur corps et leur sexualité. Ainsi leur désir demande à s’émanciper des termes imposés par les hommes au fil des siècles.

Cette question cristallise un ensemble de problèmes auxquels Wittig fait face à la fois dans la rue avec l’affaire des « trois Maria » et à sa table d’écrivain avec l’écriture du Corps lesbien, qu’elle considère comme l’« un des produits directs [14] » de son engagement au MLF. Au sein de ce dernier, entre mai 1973 et la fin de l’été 1974, Wittig organise et s’investit pleinement dans le mouvement de soutien aux « trois Maria », ces écrivaines de Lisbonne poursuivies par le régime dictatorial portugais pour atteinte aux bonnes mœurs en raison de la parution, en avril 1972, de leurs Nouvelles Lettres portugaises, où elles abordent de nombreux problèmes contemporains, allant de la sexualité des femmes à la décolonisation. L’acte d’accusation concerne le « contenu incroyablement pornographique et attentatoire à la morale publique [15] » de l’ouvrage.

En parallèle, un procès similaire s’ouvre à Paris, où deux féministes comparaissent fin 1973 pour atteinte à la morale publique à la suite de la publication dans Le Torchon brûle, le journal du MLF, d’un article intitulé « Le Pouvoir du con [16] ». Traduction très libre d’un texte paru dans un journal underground américain en 1970, Wittig le considère comme le seul texte féminin abordant la question de l’obscénité. Comment dès lors en sortir ? Comment se fait-il que lorsque les femmes écrivent sur leur désir, leur texte soit considéré comme pornographique ? Comment lutter contre la censure concrète et symbolique qui s’abat sur elles ?

C’est à ces questions que se frotte Le Corps lesbien, que Wittig publie en septembre 1973. Ce livre constitue une proposition esthétique et politique radicale. Porté par deux instances dialogiques « j/e » et « tu », cet ensemble de fragments poétiques déploie les gestes et étreintes d’amantes qui se caressent, s’interpénètrent, se dévorent et ressuscitent par passion. Le « j/e » scindé offre une nouvelle hypothèse pronominale, exprimant d’abord l’impossibilité et la déchirure d’un sujet pris dans les mailles de la domination des hommes. En effet, dans l’hétérosexualité, le lesbianisme est ce qui n’a ni nom ni existence, tant il est effacé de l’histoire littéraire et de l’histoire, tout court. Écrire le désir lesbien constitue donc un défi, celui d’extraire le corps féminin du blason de la tradition littéraire.

Pour ce faire, Wittig propose une « vision radiographique [17] » du corps et, s’affranchissant du regard masculin, réalise une nouvelle prouesse visuelle : à intervalles réguliers sont étalés, sur des doubles pages, des tableaux de mots sans marges et en grands caractères où sont énumérés organes, sécrétions, systèmes sensoriels et actions. Contre l’écriture qui réifie le corps des femmes, contre une représentation de l’homosexualité féminine « mièvre et décorative, sans danger pour l’hétérosexualité, voire récupérable par elle [18] », Wittig écrit un hymne au désir lesbien qui ne prive la passion d’aucune de ses dimensions. C’est l’autre sens que prend le « j/e » du Corps lesbien, celui d’une subjectivité qui se constitue à travers l’exaltation d’un désir non hétérosexualisé.

Jamais Wittig n’a écrit un ouvrage « avec autant de passion et d’engagement personnel [19] ». Dès le début des années 1970, elle accompagne l’émergence d’une voix politique lesbienne au sein du MLF. En 1971, elle cofonde le premier collectif lesbien Gouines rouges où se développe un lesbianisme politique. Celui-ci est en mesure d’offrir un avantage stratégique dans la compréhension de l’oppression des femmes, les lesbiennes bénéficiant d’une autonomie relative vis-à-vis des hommes.

Rapidement, ce point de vue est contesté par la plupart des militantes du MLF : il s’agirait d’une forme de division, de désolidarisation des femmes. Si les Gouines rouges se dissolvent en 1973 sans avoir réussi à visibiliser une ligne lesbienne, Wittig relance à la fin de 1974 un projet d’autonomisation politique lesbienne, cette fois dans une optique internationaliste. Elle s’engage dans la création d’une section française du Front lesbien international [20], né quelques mois plus tôt à la suite de la Conférence internationale des femmes à Francfort.

Ce projet politique s’accompagne d’ambitions théoriques nouvelles. Dès 1975, Wittig développe une connaissance historique et empirique du lesbianisme. Dans une note d’intention pour un « livre sur l’homosexualité féminine [21] », elle s’intéresse à l’effacement du lesbianisme dans l’histoire, à son mode d’existence contemporain et à venir, et à ses aspects culturels et politiques. Ce projet de constitution d’un savoir sociologique lesbien ne voit pas le jour en tant que tel, mais prend une forme inattendue.

En effet, l’utopie lesbienne de Wittig existe le temps d’un été passé en Grèce avec sa compagne Sande Zeig. Elles en rapportent leur Brouillon pour un dictionnaire des amantes (1976) qui, comme son titre l’indique, tourne le dos à l’idée d’un savoir clos sur lui-même en faveur d’un ensemble précaire, ouvert à la réécriture et à l’invention. Dans les entrées de ce dictionnaire fictif, Wittig et Zeig imaginent de nouvelles mythologies, inventent d’autres formes de société, invitant à refonder sans cesse un nouvel imaginaire politique. Mais en France, dans le champ militant, le projet d’un Front lesbien international rencontre de violentes résistances, y compris de la part des Féministes révolutionnaires, courant auquel Wittig appartient. Elle est profondément atteinte : c’est l’une des raisons motivant son départ pour les États-Unis, dans une sorte d’exil.

La revue Questions féministes, espace d’élaboration du féminisme matérialiste

Des questions féministes aux questions lesbiennes : le tournant des années 1980

L’arrivée aux États-Unis ouvre le moment théorique de l’œuvre de Monique Wittig, qui se consacre désormais au développement d’une analyse féministe matérialiste des rapports entre les sexes. Bien qu’installée à San Francisco, elle rejoint en 1978 la revue Questions féministes, véritable chantier de cette approche, animée notamment par Christine Delphy, Colette Guillaumin et Nicole-Claude Mathieu. Celles-ci remettent en question dans leurs travaux une croyance profondément ancrée : la différence sexuelle.

En effet, pour les féministes matérialistes, les hommes et les femmes sont des groupes sociaux non pas naturels, mais naturalisés. « Hommes » et « femmes » sont en fait des classes antagonistes créées par des rapports de pouvoir et le sexe anatomique est la marque qui cristallise ces rapports sociaux (sans eux, il n’aurait aucune pertinence sociale). Au sein de ce cadre épistémologique, Wittig développe une approche de l’oppression des femmes dans des termes nouveaux.

Ainsi, ce qu’elle nomme désormais « lesbianisme matérialiste » se caractérise par la remise en question d’un présupposé jamais contesté par le féminisme avant elle : l’hétérosexualité. Cette dernière n’est ni une orientation sexuelle, ni une institution parmi d’autres, mais le présupposé qui définit nos cadres de perception. Véritable « régime politique total [22] », l’hétérosexualité repose, d’une part, sur un système de rapports sociaux d’infériorisation et d’aliénation des femmes et des personnes non hétérosexuelles, et, d’autre part, sur une structure de perception essentialiste que Wittig appelle la « pensée straight [23] ».

Celle-ci dissimule l’oppression en inscrivant la notion de « différence sexuelle » comme une donnée dans les automatismes mentaux et musculaires, hétérosexualisant les corps et les esprits et offrant à la domination un moyen de se reproduire aisément. Peut-on échapper à un tel régime politique ? À mesure qu’elle accomplit sa « révolution épistémologique [24] » dans ses articles pour Questions féministes, puis pour Feminist Issues, qui introduit l’approche féministe matérialiste aux États-Unis, Wittig investit le régime allégorique pour faire passer ses démonstrations, mais aussi ses aspirations à la fuite en dehors de l’hétérosexualité. Elle écrit des fables et des contes où elle propose moins un rapport d’analogie qu’un rapport de transformation avec le monde social dont elle propose de miner les fondements.
C’est surtout son essai intitulé « La pensée straight [25]  » (prononcé en 1978 et publié en 1980) qui fait date. Après une description précise de la violence avec laquelle les catégories de l’hétérosexualité façonnent la réalité, l’article se termine par une ouverture politique vertigineuse, devenue pour beaucoup la devise de sa pensée : « Les lesbiennes ne sont pas des femmes [26] ». Pour la comprendre, il faut se référer à ce que Wittig entend par « femmes » et « lesbiennes ».
Produit tout entier social d’un système de rapports d’oppression, le groupe des femmes se distingue et s’oppose à la notion de « la-femme [27] » qui n’est qu’un mythe élaboré par la pensée straight pour les essentialiser et occulter la domination qu’elles subissent. Parce qu’elles échappent à l’appropriation privée de la part des hommes – elles ne vivent pas en couple hétérosexuel –, les lesbiennes sont considérées par Wittig comme des « fugitives [28] » ou des « transfuges [29] » de leur classe de sexe. Il s’agit d’un avantage structurel qui permet aux lesbiennes de pouvoir se positionner existentiellement, idéologiquement et politiquement au-delà de la catégorie de sexe, de se penser comme « une non-femme, une non-homme [30] ».

Dans la mesure où leur définition ne repose pas sur une prétendue différence sexuelle, les lesbiennes de Wittig sont donc des subjectivités structurellement révolutionnaires qui peuvent « [ouvrir] sur une autre dimension de l’humain [31] ». Quand le féminisme n’adopte pas ce point de vue lesbien, il se transforme en « hétéroféminisme [32] ». Il perd sa radicalité et oublie ce qui est pour Wittig sa raison d’être, c’est-à-dire la destruction des classes de sexes et des catégories « homme » et « femme » qui y sont associées.

L’analyse de Wittig inspire la création en juin 1980 d’un Front radical lesbien (dit « groupe de Jussieu », car fondé dans cette université) qui consacre ses efforts à mener une guerre contre l’hétéroféminisme, défini comme une forme de collaboration de classe. Le point de vue porté par ce groupe, auquel participe la cofondatrice de Questions féministes, Monique Plaza, déchire le collectif de rédaction de la revue.

D’un côté les partisanes, comme Plaza, d’une position lesbienne radicale proche de celle du groupe de Jussieu, et celles, dont Wittig, Mathieu ou Guillaumin, qui souhaitent qu’une telle position ne soit pas rayée de la revue ; de l’autre côté, celles, dont Delphy, qui la considèrent comme un facteur de division au sein de la classe des femmes et la rejettent. Questions féministes se dissout en octobre 1980 et Wittig se considère privée du moyen d’expression d’un point de vue lesbien. Dans un article polémique [33], elle observe que le féminisme a claqué la porte « au nez du lesbianisme » et, profondément déçue, en tire les conséquences : « Les questions féministes ne sont pas [plus] des questions lesbiennes ».

Au milieu des années 1980, après cette période prolifique sur le plan théorique, Wittig inaugure un nouveau cycle littéraire qu’elle consacre à la réécriture des textes fondateurs de la modernité occidentale. D’abord montée aux États-Unis en 1984, puis présentée à Paris l’année suivante, sa reprise de Don Quichotte au théâtre lui permet de « lesbianiser » le premier héros romanesque de l’histoire littéraire. Wittig renoue ainsi avec l’écriture dramatique qu’elle avait abandonnée après l’expérience radiophonique des années 1960. Nourrie par le travail de Sande Zeig autour de l’incorporation des catégories straight et du mime comme pratique critique, elles développent ensemble un dispositif scénique original. Reposant sur la désynchronisation entre les gestes de Quichotte et les dialogues qui les accompagnent, elles entendent miner les conventions qui règlent mouvements du corps et action verbale afin d’élaborer une contre-gestuelle libératrice.

Cette pièce est également l’occasion, pour Wittig, d’engager une lecture rétrospective de ses années de militantisme et de travail intellectuel collectif, y compris dans ce qu’il sème d’incompréhensions et de désillusions. On se souvient que, dans le roman de Cervantès, Quichotte est rendu fou par ses lectures. Or chez Wittig, Quichotte s’abreuve de livres qu’elle écrit elle-même, des fables d’Amazones et de dames-chevaliers, comme une manière de résister aux injustices du monde. Affirmant son amour pour Dulcinée du Toboso dans des actes que son entourage trouve insensés, le héros montre que « pour le monde combattre l’injustice cela s’appelle se battre contre des moulins à vent ou donner des coups d’épée dans l’eau [34] ». Incarnation possible de la lutte lesbienne, Quichotte affronte des maux imperceptibles aux yeux des dominants et conclut : « Quand bien même le monde entier me prendrait pour folle et pas seulement ces arriérés dans le village qui n’ont jamais rien vu, je dirais que le monde entier est fou et que c’est moi qui ai raison [35] ».

La lutte contre le sens commun qui, infiltré par l’idéologie straight, rend invisible la domination et fait passer pour folles celles qui y résistent est également l’objet du dernier roman de Wittig, Virgile, non (1985). Réécriture d’un autre texte fondateur, cette reprise de La Divine comédie de Dante dans un San Francisco utopique permet au personnage « Wittig » d’opérer un regard critique sur ce qui a été, pour elle, une véritable traversée de l’enfer.

Conçu comme un « opéra des gueuses [36] » en hommage à Bertolt Brecht, le livre met en scène un personnage nommé « Manastabal, mon guide » menant « Wittig » à travers les cercles de l’Enfer hétérosexuel. Dans ce dernier séjournent des femmes en laisse, maltraitées et incapables de remettre en question leur soumission, qui voient en « Wittig » une étrangère, une lesbienne menaçante et, surtout, un bouc émissaire. Impatiente de les libérer, « Wittig » obtient quelque répit dans les Limbes, « lieu[x] de faim et d’ascétisme [car] celle qui devient lesbienne n’a rien, perd tout, perd tout avantage que peut offrir un proxénète [37] » (comprendre : un mari). Mais le sursis est bref et « Wittig » retombe vite dans la violence de l’hétérosexualité.

Virgile, non sera le livre préféré de Wittig car, guidé par « celle qui est [sa] Providence » et qui n’est jamais nommée, son personnage arrive enfin en Paradis, lieu utopique où l’attendent des « anges en chair et en os [38] » pour un banquet. Ici les mots sont « palatables [39] » : le langage se goûte et on le partage, libéré de toute violence.

Les ambiguïtés d’une réception : les années 1990

En 1990, la philosophe américaine Judith Butler porte Monique Wittig à l’attention d’un vaste public en lui consacrant un chapitre entier de son Gender Trouble [40], livre fondateur des études queer, non sans porter préjudice à la pensée wittigienne. Dans un cadre analytique hérité du poststructuralisme, Butler propose une analyse de plusieurs théoriciennes françaises, dont Wittig.

La reprise telle quelle du corpus du « French Feminism [41] » constitué aux États-Unis abusivement, sans considération pour l’ancrage résolument matérialiste du féminisme de Wittig, mène à un premier malentendu. Pour Butler, Wittig tomberait dans le piège d’un « humanisme problématique qui se fonde sur une métaphysique de la présence tout aussi problématique [42] », en raison de la construction de son édifice théorique autour du sujet lesbien, que Wittig chercherait à imposer comme seul sujet possible du féminisme.

De fait, si l’on extrait Wittig de son ancrage matérialiste, les philosophes ont lieu de s’interroger en ces termes. Or Wittig conçoit le lesbianisme d’abord comme un rapport social mettant en cause l’appropriation généralisée des femmes par la classe des hommes. Dans l’analyse wittigienne, l’hétérosexualité n’est pas un discours à subvertir, comme le prône Butler, mais bien un système politique (inséparable de ses concepts, la « pensée straight ») dont les lesbiennes érodent les fondements matériels et idéologiques. Chez Wittig, l’aboutissement du féminisme étant d’abolir les classes de sexe, les lesbiennes n’ont qu’une existence « figurale [43] » et n’ont pas vocation à s’imposer comme sujet hégémonique. Agissant comme révélateur d’un régime d’oppression, elles sont le point d’ancrage concret et transitoire d’une révolution épistémologique précieuse pour tout sujet en rupture avec le contrat hétérosexuel. Malgré ces incompréhensions, le travail de dénaturalisation des catégories straight opéré par Wittig n’en demeurera pas moins fondamental pour la théorie queer.

En 1992 paraît aux États-Unis The Straight Mind and Other Essays, qui rassemble les essais théoriques les plus importants de Wittig. Celle-ci insiste dans sa préface sur ce qu’elle doit à la pensée féministe matérialiste et choisit de clore l’ensemble par un essai théorique sur l’écriture de la subjectivité chez Nathalie Sarraute. Ces choix reflètent la volonté d’une mise au point, enrichie par les réflexions qu’elle a initiées quelques années plus tôt dans le cadre d’un mémoire universitaire, Le Chantier littéraire, écrit sous la direction de Gérard Genette et soutenu en 1986 à l’EHESS. Wittig y développait une analyse originale de son rapport au langage en tant qu’écrivain, mais également en tant que lectrice de Sarraute, qu’elle considère comme le « génie du siècle [44] ».

L’insertion, en conclusion de The Straight Mind, d’un essai issu de cette recherche peut être considérée comme une réponse oblique aux reproches qui lui avaient été faits de croire en l’existence d’un sujet prélinguistique. Dans des termes tributaires de la pensée d’Émile Benveniste, pour qui la subjectivation a précisément lieu dans l’exercice du langage, et à partir des textes de Sarraute [45], Wittig observe que les situations d’interlocution sont toujours le lieu d’un antagonisme qui constitue les subjectivités en présence. Lorsque des interlocuteurs communiquent, il y a lutte pour la fixation du sens et la ferme délimitation des intentions de chacun. De fait, les mots les plus immobilisants sont ceux qui font advenir la subjectivité par le langage : les pronoms. Ceux-ci sont investis par la pensée straight afin d’y faire passer la marque du genre qui particularise les femmes dans le langage. Pour Wittig, la littérature permet un autre exercice de ce dernier, visant à s’extraire de tels particularismes. L’écriture poétique autorise, l’espace d’un texte, l’émergence d’une subjectivité indéfinie, plurielle, éclatée, déchirée, exaltée, dé-marquée [46]. Ce dont témoigne la fiction de Wittig.

Le second malentendu de l’exégèse butlerienne aura donc consisté à séparer Wittig-écrivain (dont Butler ne cesse de vanter l’œuvre) d’une part, où intégrité et consistance du sujet lesbien sont constamment interrogées, et la Wittig-théoricienne d’autre part (celle qui approche le lesbianisme comme rapport social et non comme l’expression d’une identité prédiscursive).

Dans les années 1990, Wittig propose à Minuit plusieurs ouvrages dont la version française de The Straight Mind, mais Jérôme Lindon, son éditeur historique, estime que l’environnement commercial qui lui était favorable dans les années 1960 n’existe plus. Elle quitte Minuit et rejoint le catalogue de Paul Otchakovsky-Laurens avec Paris-la-politique et autres histoires en 1999. Ce recueil rassemble des nouvelles écrites entre 1963 et 1985, la plupart ayant été déjà publiées. POL s’engage à éditer une version remaniée du Chantier littéraire, hommage à Nathalie Sarraute dont la disparition en 1999 affecte Wittig au point d’en retarder la sortie.

De gauche à droite, Monique Wittig, Jacqueline Desrez et Nathalie Sarraute. Photographie prise le 1er octobre 1986 à la Maison française de New York University © La Maison française

En 2001, grâce au travail de collaboration entre Wittig, Sam Bourcier et Suzette Robichon, une version française de The Straight Mind paraît sous le titre de La Pensée straight chez Balland. Dans le même élan, un colloque autour de l’œuvre de Wittig est organisé, en sa présence. Y interviennent, entre autres, Namascar Shaktini, Louise Turcotte, Teresa de Lauretis ou encore Paul B. Preciado. Mais Wittig décède subitement en 2003 et son Chantier littéraire n’existera que de manière posthume, en 2010, aux Presses universitaires de Lyon/Éditions iXe.

Wittig disparue, Wittig retrouvée

Depuis, l’œuvre de Monique Wittig circule dans les espaces académiques, militants, littéraires, artistiques. La radicalité de sa pensée politique, la puissance de son geste d’écriture, mais également sa théorie littéraire font d’elle notre contemporaine. Wittig interroge et renouvelle nos approches de la littérature, de la théorie politique, des questions féministes, lesbiennes, trans et des études minoritaires plus largement.

Les thèses consacrées à son œuvre sont de plus en plus nombreuses et plusieurs colloques témoignent de l’intérêt grandissant qu’elle suscite à l’université : un second colloque autour de son œuvre a lieu à Lyon en 2009 et impulse la publication du Chantier littéraire l’année suivante. En 2019, à l’occasion de l’ouverture des archives de Wittig à la Beinecke Library, aux États-Unis, une conférence internationale se réunit à Yale University.

Enfin, les vingt ans de sa disparition, en 2023, sont l’occasion d’une double rencontre internationale entre les universités de Berkeley et Genève. Cette même année est marquée par de nombreux événements dans le monde entier : lectures publiques, expositions, conférences, mais également la réédition, en poche, du Corps lesbien pour les cinquante ans de sa parution. Car l’effervescence est également éditoriale : à partir de 2014, Minuit réédite en format poche les romans de Wittig. En 2022, les éditions Gallimard rendent de nouveau disponible Le Voyage sans fin, initialement paru dans la revue lesbienne Vlasta en 1985.

Enfin, 2024 s’est ouverte par la publication, chez Minuit, de Dans l’arène ennemie, recueil inédit de ses textes et entretiens qui permet de suivre au plus près le développement d’une œuvre littéraire, théorique et politique sur plus de trente ans.

par Sara Garbagnoli & Théo Mantion, le 24 septembre

Aller plus loin

Monique Wittig, L’Opoponax, Minuit, 1964 (coll. « double », 2014)
Monique Wittig, Les Guérillères, Minuit, 1969 (coll. « double », 2019)
Monique Wittig, Le Corps lesbien, Minuit, 1973 (coll. « double », 2023)
Monique Wittig et Sande Zeig, Brouillon pour un dictionnaire des amantes, Grasset, 1976 (coll. « Les cahiers rouges », 2011)
Monique Wittig, Virgile, non, Minuit, 1985 (coll. « double », 2024)
Monique Wittig, Paris-la-politique et autres histoires, P.O.L, 1999 (coll. « #formatpoche », 2023)
Monique Wittig, La Pensée straight, Balland, 2001 (Éditions Amsterdam, 2018)
Monique Wittig, Le Chantier littéraire, Presses universitaires de Lyon/Éditions iXe, 2010
Monique Wittig, Le Voyage sans fin, supp. à Vlasta, 1985 (Éditions Gallimard, coll. « L’imaginaire », 2022)
Monique Wittig, Dans l’arène ennemie. Textes et entretiens 1966-1999, édition présentée, établie et annotée par Sara Garbagnoli et Théo Mantion, Minuit, 2024.

Pour citer cet article :

Sara Garbagnoli & Théo Mantion, « Renversements de Monique Wittig », La Vie des idées , 24 septembre 2024. ISSN : 2105-3030. URL : https://laviedesidees.fr/Renversements-de-Monique-Wittig-6277

Nota bene :

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Notes

[1Marguerite Duras, « Une œuvre éclatante », France Observateur, 5 novembre 1964. Repris en postface de L’Opoponax, Minuit, 2018, p. 263.

[2Alain Robbe-Grillet, Pour un nouveau roman, Minuit, 1963, p. 114.

[3Claude Simon, « Pour Monique Wittig », L’Express, 30 novembre-6 décembre 1964.

[4Marguerite Duras, « Une œuvre éclatante », art. cit.

[5Monique Wittig, L’Opoponax [1964], op. cit., p. 262.

[6Mireille Boris, « Un film sur la plasticité enfantine », L’Humanité, 19 décembre 1964.

[7Monique Wittig, « Un mouvement de masse, mais féministe », entretien avec Josy Thibaut, 1979. Repris dans Dans l’arène ennemie. Textes et entretiens 1966-1999, éd. établie par S. Garbagnoli et T. Mantion, Minuit, 2024, p. 157.

[8Monique Wittig, « Des films lacunaires », The New Statesman, 15 juillet 1966. Repris dans Dans l’arène ennemie, op. cit., p. 23-28.

[9Monique Wittig, « À propos de Bouvard et Pécuchet », Cahiers de la compagnie Renaud-Barrault, 1967. Repris dans Dans l’arène ennemie, op. cit., p. 29-40.

[10Nous employons la forme neutre du nom, conformément au projet wittigien (cf. Monique Wittig, « La marque du genre », Feminist Issues, 1985. Repris dans La Pensée straight [2001], Amsterdam, 2018, p. 143).

[11Monique Wittig, « Pour un mouvement de libération des femmes », L’Idiot international, mai 1970. Repris dans Dans l’arène ennemie, op. cit., p. 41-70.

[12Monique Wittig, « Pour un mouvement de libération des femmes », art. cit., p. 43.

[13Monique Wittig, « Monique Wittig et les lesbiennes barbues », entretien à Actuel, janvier 1974. Repris dans Dans l’arène ennemie, op. cit., p. 101.

[14Monique Wittig, « Monique Wittig et les lesbiennes barbues », art. cit., p. 100.

[15Acte d’accusation délivré le 12 décembre 1972 par le procureur en charge du procès.

[16Le torchon brûle, n° 2, 1971. Consultable ici.

[17Monique Wittig, « Une vision radiographique du corps », entretien avec Laurence Louppe, Chroniques de l’art vivant, décembre 1973. Repris dans Dans l’arène ennemie, op. cit., p. 93-99.

[18Monique Wittig, « Une vision radiographique du corps », art. cit., p. 96.

[19Monique Wittig, « Le Corps lesbien réexaminé », propos recueillis par Melinda Camber Porter, The Paris Post, 1976. Repris dans Dans l’arène ennemie, op. cit., p. 153.

[20Ilana Eloit, Lesbian Trouble : Feminism, Heterosexuality and the French Nation (1970-1981), thèse de doctorat, The London School of Economics and Political Science, 2018. Consultable ici.

[21Monique Wittig, « Projet pour un livre sur l’homosexualité féminine », 1975. Repris dans Dans l’arène ennemie, op. cit., p. 144-150.

[22Monique Wittig, « Discours pour le prix David Kessler », 1995. Repris dans Dans l’arène ennemie, op. cit., p. 297.

[23Monique Wittig, « La Pensée straight », Questions féministes, 1980. Repris dans La Pensée straight, op. cit., p. 67-77.

[24Monique Wittig, « Introduction », La Pensée straight, op. cit., p. 17.

[25Monique Wittig, « La Pensée straight », art. cit.

[26Monique Wittig, « La Pensée straight », art. cit., p. 77.

[27Monique Wittig, « On ne naît pas femme », Questions féministes, 1980. Repris dans La Pensée straight, op. cit., p. 67-77.

[28Monique Wittig, « Introduction », art. cit., p. 13.

[29Monique Wittig, « On ne naît pas femme », art. cit., p. 65.

[30Monique Wittig, « On ne naît pas femme », art. cit., p. 57.

[31Monique Wittig, « Paradigmes », Homosexualities and French Literature, éd. G. Stambolian et E. Marks, Cornell University Press, 1979. Repris dans La Pensée straight, op. cit., p. 107.

[32Monique Wittig, « Les questions féministes ne sont pas des questions lesbiennes », Amazones d’hier, lesbiennes d’aujourd’hui, 1983. Repris dans Dans l’arène ennemie, op. cit., p. 245.

[33Monique Wittig, « Les questions féministes ne sont pas des questions lesbiennes », art. cit., p. 245.

[34Monique Wittig, Le Voyage sans fin [1985], Gallimard, 2022, p. 62.

[35Monique Wittig, Le Voyage sans fin, op. cit., p. 114.

[36Monique Wittig, « Discours pour le prix David Kessler », art. cit., p. 298.

[37Monique Wittig, « Je ne suis pas une femme », entretien à EMMA, 1986. Repris dans Dans l’arène ennemie, op. cit., p. 268.

[38Monique Wittig, note d’intention, quatrième de couverture, Virgile, non [1985], Minuit, 2024.

[39Monique Wittig, « Le lieu de l’action », 1982. Repris dans Dans l’arène ennemie, op. cit., p. 222.

[40Judith Butler, Gender Trouble. Feminism and The Subversion of Identity, Routledge, 1990.

[41Christine Delphy, « L’invention du “French Feminism” : une démarche essentielle », Nouvelles questions féministes, n° 17, 1996. Repris dans L’Ennemi principal, t. 2, Syllepse, 2009, p. 315-354.

[42Judith Butler, Trouble dans le genre. Le féminisme et la subversion de l’identité [1990], trad. C. Kraus, La Découverte, 2005, p. 242.

[43Teresa de Lauretis, « When Lesbians Were Not Women », On Monique Wittig : Theoretical, Political & Literary Essays, éd. N. Shatktini, 2005, p. 57.

[44Monique Wittig, « J’ai connu la guillotine », entretien avec Claire Devarrieux, 1999. Repris dans Dans l’arène ennemie, op. cit., p. 330.

[45Sur la lecture wittigienne de Sarraute, voir Annabel L. Kim, Unbecoming Language. Anti-Identitarian French Feminist Fiction, The Ohio State University Press, 2018.

[46Sur la pratique du démarquage chez Wittig, voir Dominique Bourque, Écrire l’inter-dit : la subversion formelle dans l’œuvre de Monique Wittig, L’Harmattan, 2006.

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