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L’exposition « L’Art en guerre » au Musée d’Art Moderne de la Ville de Paris rassemble plus de 400 œuvres produites en France entre 1938 et 1947. L’une de ses deux commissaires d’exposition, Laurence Bertrand Dorléac, décrypte les enjeux historiques et artistiques d’un art marqué par l’exil, l’occupation, et les camps.

« L’Art en guerre » est une exposition rétrospective d’une période bien connue de l’histoire de France, celle de la Seconde guerre mondiale. Mais les œuvres produites au cours de cette période de conflits et d’occupation n’ont reçu que peu de visibilité jusqu’à présent. Laurence Bertrand Dorléac, Professeure d’histoire de l’art à Sciences Po où elle dirige également le groupe de recherche « art et société », est l’une des rares historiennes à s’être intéressée il y a quelques années à cette production artistique singulière, cet « art de la défaite » longtemps passé sous silence [1]. Autour de quelques œuvres choisies dans l’exposition, elle décrit ici la nature hétérogène, presque inclassable, d’une production artistique qui traduit les expériences personnelles d’artistes exilés, exclus, ou internés.

De l’angoisse qui transparaît dans les œuvres des surréalistes dès 1938 à la souffrance physique et morale qui se dégage des dessins produits dans les camps quelques années plus tard, l’exposition a pour ambition de placer ces œuvres dans leur contexte historique de départ, sans lequel leur contenu et leur technique resteraient insaisissables. En revenant sur la création d’un art officiel avec l’ouverture du Musée d’Art Moderne de Paris en 1942, elle illustre également la complexité des rapports qui existaient entre l’art et le politique jusqu’en 1945. Mais les pièces les plus marquantes de l’exposition restent sans doute les œuvres engagées, créées par des artistes en lutte contre l’ennemi et l’occupant, des œuvres restées invisibles pendant toute la durée de la guerre car dissimulées par leurs créateurs ou rejetées par les nazis et le régime de Vichy. Comment comprendre cette production artistique ? Peut-on parler d’actes de résistance alors que la dénonciation reste ici secrète et ne peut influer sur le cours des choses ? Laurence Bertrand Dorléac éclaire ces questions qui touchent à la portée artistique et historique d’œuvres produites sous la contrainte de la guerre et de l’occupation.

Laurence Bertrand Dorléac a également publié dans La Vie des Idées : « Quand l’Histoire rend fou », le 26 octobre 2011.

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Prises de vue : Ariel Suhamy. Propos recueillis

par Cristelle Terroni, le 7 décembre 2012

Pour citer cet article :

Cristelle Terroni, « Regards sur l’art en guerre. Entretien avec Laurence Bertrand Dorléac », La Vie des idées , 7 décembre 2012. ISSN : 2105-3030. URL : https://laviedesidees.fr/Regards-sur-l-art-en-guerre

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Notes

[1Laurence Bertrand Dorléac, L’Art de la défaite. 1940-1944, Seuil, 1993. Réédition, coll. L’Univers historique, Seuil, 2010

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