Recensé : Richard A. Posner, A Failure of Capitalism. The Crisis of ’08 and the Descent into Depression, Harvard, Harvard University Press, 2009.
Richard Allen Posner est sans doute l’un des rares juges américains à exercer une influence importante dans d’autres domaines académiques que le droit. Il a en effet mené de front sa carrière de magistrat – il est actuellement juge de cour d’appel fédérale – et une carrière académique à Stanford puis à l’université de Chicago. Dans le domaine de l’économie, il est surtout connu pour être l’un des fondateurs du mouvement Law and Economics, qui étudie les lois et règlements à l’aide des outils de l’analyse économique, afin d’évaluer leur efficacité et de prédire les résultats à attendre d’une mesure donnée.
Auteur prolifique, il s’est fait connaître de l’opinion américaine à la fois par ses décisions de justice, ses multiples ouvrages portant sur les relations entre droit, morale et rationalité économique, ainsi que par le blog qu’il tient avec Gary Becker. Généralement considéré comme étant de droite sur l’échiquier politique américain, Posner se revendique comme pragmatique. Sur le plan moral, il se veut sceptique et relativiste, ce qui l’éloigne de la droite conservatrice et explique l’importance centrale qu’il accorde à la notion d’efficacité.
Le projet de Posner est de fournir, « de manière concise, constructive, non-technique, non-sensationnaliste, sans jargon ni acronyme, avec le moins possible d’anecdote, un examen analytique des principales facettes du plus grand désastre économique aux États-Unis qui se soit produit de son vivant, et du vivant de la plupart des contemporains. » Pour ce faire, l’ouvrage se divise en cinq grands moments. Dans les trois premiers chapitres, Posner explore les causes et les manifestations de la crise, allant des causes et manifestations les plus immédiates aux causes profondes. Les chapitres 4 et 5 sont ensuite consacrés à la mise en contexte et à l’analyse de la réponse gouvernementale à la crise. À partir du chapitre 6, Posner abandonne la dimension purement analytique pour adopter une démarche plus réflexive, se demandant quelles peuvent être les conséquences positives de la crise, à la fois sur l’économie et sur notre compréhension de celle-ci. Les tenants et les aboutissants ainsi posés, Posner dresse ensuite son réquisitoire, tâchant de démontrer la part de responsabilité de chacun des acteurs dans le déclenchement et le traitement de la crise. Enfin, les deux derniers chapitres constituent un exercice de prospective concernant la régulation du système financier et la rénovation idéologique du conservatisme américain.
La recherche des responsabilités
Sur la base d’une documentation abondante [1] et d’échanges avec ses collègues universitaires, Posner procède en juge. Il cherche avant tout à démêler les responsabilités individuelles et collectives dans le déclenchement de la crise. Ce faisant, il lutte sur deux fronts à la fois. Sur sa gauche, il combat l’idée selon laquelle la bulle immobilière et la crise elle-même seraient imputables à une forme d’irrationalité des agents ou à une faillite morale (appétit pour le risque, appât du gain) du secteur de la finance. Il montre au contraire que l’existence de la bulle ainsi que les conséquences de son éclatement étaient notoires dans le secteur bancaire américain, mais que chaque acteur ne pouvait faire autrement que de tirer parti du mouvement, sous peine de subir de lourdes pertes par rapport à ses concurrents. Sans décrire précisément le concept, il donne ainsi une bonne image du fonctionnement du risque systémique auquel était soumis le système financier. Sur sa droite, il cherche à convaincre les conservateurs américains, son auditoire naturel, que cette crise signe la faillite de la croyance dans la capacité autorégulatrice du marché, qu’une intervention publique massive est nécessaire pour en amortir les conséquences immédiates et que, à long terme, seule une régulation active et contraignante des marchés financiers permettrait d’empêcher la reproduction de ce phénomène.
Dans son verdict, Posner distingue deux responsables essentiels, Alan Greenspan et George W. Bush, et deux politiques vicieuses, l’excès d’offre de monnaie et la dérégulation des marchés financiers. Pour Posner, le premier a péché par excès de confiance dans la capacité de la Réserve fédérale (Fed) à utiliser le levier monétaire pour amortir l’éclatement des bulles spéculatives, ce qui le dispensait des douloureuses (et impopulaires) augmentations des taux d’intérêt qui auraient permis de faire éclater la bulle bien plus tôt et avec des conséquences bien moindres. George W. Bush, de son côté, porte la double responsabilité d’une politique de laxisme vis-à-vis du secteur financier, marquée par l’affaiblissement de tous les organes fédéraux de régulation de ces marchés, et d’une réponse tardive, incohérente et incompétente aux premiers signes d’une crise majeure. La responsabilité des politiques vicieuses est partagée plus largement, selon lui, par l’ensemble des politiques, financiers et économistes. Au-delà de l’aura personnelle de Greenspan, la conjonction de la faiblesse des taux d’intérêt et d’une faible inflation, ainsi que la rapidité de la reprise après l’éclatement de la bulle internet et les attentats du 11 Septembre, ont conduit la majorité des personnes concernées, tel Robert Lucas, à penser que l’on savait désormais traiter de manière satisfaisante les récessions. Parallèlement, Posner affirme que la dérégulation du secteur financier n’a pas été réalisée sur la base d’arguments économiques solides, mais sur le fondement d’une croyance dans la vertu autorégulatrice de la concurrence, qui a rendu économistes comme politiques aveugles aux spécificités du rôle de la finance.
Causes et conséquences de la crise
Les trois premiers chapitres constituent sans doute une des meilleures synthèses non-techniques sur les ressorts de la crise. Tous les ingrédients sont là : développement du secteur de la finance, fonctionnement et poids du crédit hypothécaire, dispersion d’un risque de plus en plus difficile à quantifier, endettement des banques, afflux de capitaux étrangers aux États-Unis, conflit d’intérêts des agences de notation, etc. Le talent de Posner réside dans sa capacité à articuler chacun de ces éléments afin de permettre au lecteur de se faire une idée schématique du fonctionnement de l’ensemble. Les explications techniques sont réduites au strict minimum pour comprendre ce qui se passe.
Cette synthèse souffre de deux biais. Le premier est que Posner ne maîtrise pas complètement son sujet quand il parle de macroéconomie financière. Ses nombreuses lectures lui ont donné une compétence certaine en la matière, mais sa synthèse laisse dans l’ombre des éléments d’ordre plus technique, comme le rôle et le fonctionnement des swaps (nom d’un produit dérivé financier) ou l’évaluation des risques par les banques et les agences de notation. Le second biais, constant dans l’ouvrage, est que Posner s’adresse à un lecteur américain, et considère ce qui est une crise mondiale sous le seul angle de l’économie intérieure américaine. Ainsi, l’afflux de capitaux étrangers aux États-Unis est-il attribué à la seule politique commerciale de pays exportateurs (Chine, Japon, Allemagne) voulant favoriser leurs marchandises. L’argument est au mieux incomplet pour l’Allemagne dans la zone euro, ou pour la Chine qui peine à assurer la sécurité de son épargne intérieure, ce qui conduit les Chinois à aller chercher la sécurité à l’étranger. Pour les mêmes raisons, la description des conséquences de la crise est limitée à l’économie américaine, le reste du monde étant touché par ricochet, ou invoqué comme supplétif nécessaire au plan de relance américain.
Impréparation et réponse à la crise
Depuis le début de la crise, c’est un lieu commun de dire que personne, sauf quelques oracles talentueux, ne l’avait vue venir. Citations à l’appui, Posner y montre comment la presse économique, The Economist en particulier, avait dès 2001 identifié l’existence d’une bulle immobilière et analysé les conséquences catastrophiques que l’éclatement de cette bulle pourrait avoir sur l’économie américaine. De même, il montre comment plusieurs économistes, dont le désormais fameux Nouriel Roubini, ont régulièrement averti le secteur de l’existence d’un risque de faillite systémique. À la lumière de ces éléments, on ne peut que conclure que l’existence d’un risque d’effondrement était connue dans les milieux financiers. En comparaison, les erreurs d’appréciation de Ben Bernanke, pour qui l’augmentation des prix immobiliers dérivait d’une évolution des fondamentaux et n’était pas une bulle, semblent de peu de poids.
Posner attribue ainsi l’impréparation du secteur et celle du gouvernement à deux raisons différentes. Pour le secteur financier, la connaissance d’un risque faible de crise systémique n’est pas un motif suffisant pour abandonner des activités à très fort rendement ou pour réduire un endettement qui permet de multiplier les gains (et aussi, comme cela s’est produit, les pertes). Tout le monde sait que, selon les termes de Keynes, le marché peut rester dans l’erreur plus longtemps qu’un acteur peut rester solvable. L’intérêt de chacun, y compris des particuliers achetant une maison en comptant sur l’appréciation de sa valeur pour rembourser un crédit très lourd, était de profiter du mouvement tant qu’il durait, et d’espérer être parmi les premiers à sauter du navire quand celui-ci commencerait à couler.
En ce qui concerne le gouvernement, le manque d’intérêt de l’administration Bush a certainement joué un rôle dans sa piètre réaction à l’éclatement de la bulle, en particulier dans l’absence d’un plan de relance fort et dans la décision de laisser Lehman Brothers faire faillite. Parallèlement, la confiance dans la capacité de la Fed à amortir la crise par des taux d’intérêt faibles s’est conjuguée avec une erreur de diagnostic, celle de croire que le gel des marchés du crédit était un simple problème d’illiquidité, et non d’insolvabilité de banques qui ne pouvaient plus rembourser leurs dettes. Cette conjonction a entraîné une réponse tardive, et à bien des égards inappropriée, à ce qui n’était plus une récession, insiste Posner, mais une dépression.
Ce dernier point constitue un des fils conducteurs les plus curieux de l’ouvrage. Posner insiste à de multiples reprises sur le fait qu’une dépression, définie comme une récession augmentée d’anticipations négatives et d’une menace de déflation, est beaucoup plus grave qu’une récession. Sur le fond, il a raison : la déflation et les anticipations pessimistes rendent inopérants les principaux instruments pouvant remédier à une simple récession. Il surcharge toutefois la notion de dépression du rappel systématique à la Grande Dépression des années 1930, conçue comme la source de tous les maux de la décennie suivante, du nazisme à la montée en puissance de l’État fédéral sous Roosevelt. Cette surcharge, difficile à comprendre pour le lecteur européen, s’explique par la haine tenace que nourrissent les conservateurs américains pour le New Deal et ses dispositifs, en particulier le renforcement des syndicats et la mise en place des prémices d’une sécurité sociale.
Ce dernier point éclaire l’analyse en demi-teinte que livre Posner du plan de relance proposé par Barack Obama. Contre ses amis conservateurs, Posner défend l’idée qu’une relance massive, même au prix d’un fort endettement et d’une augmentation des impôts à venir, est nécessaire pour sortir le plus vite possible de la dépression. Il s’attache également à montrer que la réponse monétariste est inopérante. Son appréciation du plan de relance est toutefois mitigée. Sur le côté positif, il remarque que le plan Obama tente d’utiliser simultanément tous les leviers disponibles, indépendamment des considérations idéologiques qui prédisent l’inefficacité de tout ou partie d’entre eux. Il ne se prive cependant pas de trouver les différentes mesures inégalement efficaces, et se déclare favorable au financement par l’État fédéral des dépenses d’infrastructures abandonnées, faute de rentrées fiscales, par les États fédérés. Sur cette question de l’efficacité, Posner demande souvent à son lecteur de le croire sur parole quand il affirme que tel effet, rédhibitoire pour une mesure à laquelle il s’oppose, est négligeable dans le cas d’une mesure à laquelle il est favorable. Il convient donc de prendre avec précaution cette partie de l’ouvrage, où il semble que l’auteur cède à ses a priori personnels, plutôt que de considérer la littérature d’évaluation des politiques publiques qui n’est pas, comme il semble le penser, limitée à l’analyse historique des politiques du New Deal ou de la dépression japonaise.
En revanche, il livre dans le même temps une analyse précise de la manière dont l’argument de la lutte contre la dépression est brandi pour justifier des actions qui relèvent d’autres objectifs politiques, comme la lutte contre le réchauffement climatique par exemple. Il insiste également sur le point, crucial, mais difficilement audible par les conservateurs, de l’importance des anticipations : même si l’action gouvernementale est in fine inefficace, le simple fait de faire quelque chose peut permettre de casser les anticipations pessimistes qui sont au cœur du problème propre à la dépression.
Les enseignements de la crise
Les derniers chapitres du livre se font plus courts et plus prospectifs. La recherche de conséquences positives est ainsi un inventaire à la Prévert mélangeant la réallocation de ressources (diplômés en particulier) hors de la finance, l’affaiblissement des syndicats (que Posner voit essentiellement comme une nuisance), la relance de l’épargne et de la recherche sur l’économie des dépressions, etc.
Posner revient ensuite, comme pour bien enfoncer le clou, sur le fait que la dépression est une conséquence normale de fonctionnement des marchés, et qu’il serait injuste d’en rendre responsable le gouvernement, celui-ci n’ayant fait que fournir au secteur financier la liberté et les outils que ce dernier demandait. Il affirme qu’on ne peut pas non plus compter sur le gouvernement ou ses différentes agences pour prévenir les dépressions. Cela supposerait en effet de faire éclater la bulle avant qu’elle ne donne naissance à une dépression. Non seulement les bulles sont longtemps difficiles à identifier, mais les faire éclater est coûteux et impopulaire auprès de tous ceux qui en bénéficiaient (une part significative de la population dans le cas d’une bulle immobilière). Une catastrophe qui ne s’est pas produite fournit en outre peu de dividendes politiques à celui qui a fait le nécessaire pour l’éviter. De ce fait, l’incitation des dirigeants politiques à prendre ces mesures restera chroniquement trop faible, et toute tentative de régulation en ce sens doit passer par des agences assez largement isolées du pouvoir politique.
À qui la faute ?
C’est dans cette partie que Posner dresse le réquisitoire dont les principaux éléments ont été esquissés plus haut. Si Posner y disculpe les (macro-)économistes des reproches qui leur sont le plus souvent adressés, il les blâme en revanche d’avoir laissé des partis pris idéologiques concernant la capacité autorégulatrice des marchés prendre le pas sur l’examen scientifique des données disponibles. Posner disculpe également les financiers eux-mêmes qui, dit-il, n’ont fait que ce pour quoi ils étaient payés et ce que leurs actionnaires leur demandaient de faire. Il souligne en revanche l’incapacité de la gouvernance d’entreprise à réaliser que les modes de rémunérations (bonus sans malus, parachutes dorés) incitaient à une prise de risques excessive.
Posner trouve des circonstances atténuantes aux principaux responsables gouvernementaux au moment des faits, Greenspan, Bernanke, Paulson et G. W. Bush, qu’il lie aux circonstances générales de la décennie précédente et à celles, particulières, de l’année 2008, marquée par l’élection présidentielle. Toutefois, tous ont commis une série d’erreurs graves dans la mise en place des conditions de la bulle, l’absence de plan de bataille en cas de besoin et la réponse tardive et incohérente une fois la catastrophe arrivée. Le but avoué de l’exercice n’est pas de désigner des responsables, mais au contraire de montrer comment la responsabilité de la crise est partagée au point qu’il n’y a pas à proprement parler de coupables, ni le gouvernement ni les milieux financiers en particulier, de ce qui a été selon Posner un échec du capitalisme lui-même. Seraient coupables, nous dit-il en substance, ceux qui, constatant cette défaillance du marché, s’abstiendraient de mettre en place les instruments nécessaires pour éviter une répétition de ces événements.
Et maintenant ?
L’idée de re-régulation du secteur financier, en particulier l’imposition de réserves importantes et la séparation des banques d’investissement et des banques d’affaires, n’est pas la partie la plus originale de l’ouvrage. Les différentes pistes sont présentées sans ordre et sans éléments d’évaluation de leur faisabilité ou de leurs conséquences sur le fonctionnement du système. Leur impact sur un arbitrage éventuel, dont Posner ne parle pas, entre croissance et volatilité, n’est pas abordé non plus. Ainsi, l’abondante littérature des années 1990 sur les avantages et inconvénients d’un système bancaire dual ou universel n’est simplement pas évoquée, mais évacuée au profit d’un soutien intégral à la remise en place du Glass-Steagall Act.
Une remarque mérite cependant une attention particulière : si la réorganisation du secteur peut être un moyen d’accélérer la sortie de crise, il serait contre-productif de vouloir re-réguler la finance avant d’être définitivement sorti de la dépression. En effet, la re-régulation d’un secteur constitue une entreprise de grande ampleur, qui demande beaucoup de temps, et constitue un facteur d’incertitude supplémentaire à un moment où il s’agit au contraire de restaurer la confiance dans un avenir prédictible. Sans la renvoyer sine die, Posner remarque, sans doute avec justesse, que la re-régulation du secteur ne saurait constituer une priorité tant que le risque de déflation reste présent.
Enfin, le dernier chapitre évoque les conséquences spécifiques de cette crise sur le parti républicain, touché à trois titres : dans sa partie libérale par un échec de l’autorégulation des marchés, dans son aile socialement conservatrice pas les conséquences d’une politique volontariste d’accession à la propriété, dans son aile religieuse dans la mesure où c’est sous la présidence de George W. Bush que s’est développée ce que la droite religieuse perçoit comme un système fondé sur l’envie et l’avarice. Posner appelle donc le parti républicain, marqué par un anti-intellectualisme populiste incarné par Sarah Palin, à renouer avec sa tradition d’intellectuels pragmatiques et conservateurs, prêts à dévier de l’orthodoxie budgétaire et de l’aversion aux impôts quand la situation l’exige.
Un ouvrage d’actualité
Écrit en réponse à une actualité brûlante, l’ouvrage a été rédigé très rapidement, et cela se sent. Dans son compte rendu, Robert Solow remarque que le texte semble avoir été dicté à la hâte, avec de nombreuses répétitions, incises et digressions qui interrompent le propos principal. Pour les mêmes raisons, plusieurs autres critiques de l’ouvrage s’accordent à dire qu’il a manqué à ce livre un éditeur, dont le travail aurait permis un texte plus concis, serré et mieux articulé autour des points essentiels.
La qualité matérielle de l’ouvrage, solide, compact, servi par une typographie soignée et aérée, ainsi que la vigueur de la prose de Posner, permettent le plus souvent de passer au-dessus de ces faiblesses de structure. Certaines répétitions et digressions peuvent toutefois fatiguer à la longue le lecteur qui a compris l’idée générale. La possibilité d’une rapide obsolescence de certains points est reconnue par Posner, qui a ouvert un blog dédié à l’actualisation du contenu du livre. Face à la multiplication de tels ouvrages de circonstance, souvent vite périmés, la mise en place d’un tel suivi, si elle s’avère à la hauteur du texte imprimé, doit être soulignée comme un progrès notable de ce secteur de l’édition et un exemple à suivre.
Si, en fin de compte, ce livre ne remplit pas entièrement son objectif, il n’en reste pas moins très instructif à la fois sur les mécanismes de la crise, sur les responsabilités des différents acteurs et sur la perception qu’en ont les intellectuels conservateurs américains, dont Posner est un des chefs de file. On en retire une image assez nette du fonctionnement du système financier, des causes proches et lointaines de la crise ainsi que des interactions entre les différents éléments économiques, politiques et idéologiques du problème. Cette image est biaisée, mais le biais est à la fois clair et assumé, ce qui permet de ne pas céder à la tentation de penser qu’il existerait une solution unique et simple à la situation actuelle. De même que Posner renvoie dos à dos conservateurs et libéraux (au sens américain du terme, nous dirions « progressistes »), ce livre parviendra certainement à déplaire à la fois à ceux qui pensent qu’il s’agit de la crise finale du capitalisme et qu’il est temps de « changer de système », et à ceux qui y voient l’occasion d’un retour au capitalisme industriel. Cette absence de concession à un camp comme à un autre constitue sans doute une des plus grandes qualités du travail de Posner.