Karl Marx a souvent été considéré par les mouvements écologistes comme un productiviste, fasciné par le progrès technique et insensible à la nature. Pour J. B. Foster et B. Clark, il est au contraire urgent de réconcilier l’écologie politique avec sa critique du capitalisme.
Le marxisme est-il l’avenir de l’écologie politique ? Si cette question surprendra ceux qui découvrent le courant écosocialiste, les autres y reconnaîtront l’orientation fondamentale du travail de John Bellamy Foster : voir dans le mode de production capitaliste la cause principale de la destruction de la nature aussi bien que des vies humaines, et ramener à Marx les luttes écologistes de la gauche contemporaine. Avec Brett Clark, lui aussi professeur de sociologie aux États-Unis, ils proposent ainsi dans Le pillage de la nature un parcours qui va des études consacrées par Marx aux effets du capitalisme sur les terres agricoles, les animaux, la nourriture et la santé humaine, aux leçons que le mouvement écologiste devrait en tirer pour faire face à l’urgence des crises environnementales. Le livre est essentiellement une anthologie d’articles publiés par les deux auteurs dans la Monthly Review – revue dirigée par Foster et foyer de l’écomarxisme américain – plus ou moins réécrits et adaptés pour l’occasion. Il n’en conserve pas moins une véritable cohérence, et le lecteur y gagne la possibilité de lire les chapitres indépendamment les uns des autres, s’il y perd en répétitions parfois agaçantes pour la lecture suivie.
Si Le pillage de la nature se présente comme une réponse à l’urgence contemporaine, il consiste avant tout en études thématiques des engagements de Marx que l’on qualifierait aujourd’hui d’écologiques, les auteurs cherchant à montrer non seulement qu’il avait perçu certains de ces enjeux, mais qu’il les a théorisés en profondeur en s’appuyant sur les savoirs de son temps, grâce aux concepts de « métabolisme social », de « rupture métabolique » ou encore d’« expropriation » ou « pillage » de la nature par le capital. C’est pour eux l’occasion d’approfondir la grille de lecture écomarxiste qu’ils développent depuis plusieurs années avec Paul Burkett [1], entre autres. C’est aussi celle d’instruire plus avant le débat avec les écologistes critiques du marxisme, notamment avec « l’écologie-monde » de Jason W. Moore, jugée timidement réformiste et soluble dans l’économie de marché. Pour les auteurs, le retour à Marx, penseur de la séparation de l’homme et de la nature dans le capitalisme, est la voie nécessaire d’une écologie émancipatrice et de la lutte révolutionnaire qu’elle implique.
Marx, le guano, les pommes de terre et la famille
La pensée écosocialiste dans sa diversité s’organise autour de l’idée que le capitalisme non seulement génère la contradiction identifiée par Marx entre les forces de productions et les rapports de productions à l’intérieur de la société, mais également mine ses propres conditions d’existence en détruisant les ressources naturelles, les espaces, les formes de vie dont il dépend – ce que James O’Connor avait nommé la « seconde contradiction » du capitalisme [2]. Il y a débat cependant quant à la place accordée par Marx et Engels à cette destruction de la nature par les forces du capital : s’ils l’ont indiscutablement évoquée et condamnée, l’ont-ils vraiment théorisée et en ont-ils tiré toutes les conséquences ? Beaucoup en doutent et considèrent que la théorie marxiste doit sur ce point être, au minimum, largement complétée pour tenir compte des évolutions des sociétés et des savoirs scientifiques, dans l’esprit même de Marx et Engels. Mais d’autres, comme Foster et Clark, travaillent au contraire à mettre en évidence la place importante que tient la question du « métabolisme » entre les sociétés et la nature dans leur œuvre.
On trouve en effet chez Marx un usage notable de ce terme de métabolisme, emprunté aux chimistes de son temps, et enrichi par ses lectures du chimiste Justus von Liebig, fervent critique de l’appauvrissement des sols par l’agriculture intensive. Non seulement le matérialisme de Marx (dont les auteurs soulignent à juste titre l’héritage épicurien) voit dans l’homme une partie de la nature et dans toute société un métabolisme, un échange constant avec la nature médié par le travail, mais il théoriserait la rupture de ce métabolisme dans le capitalisme. Marx et Engels prêtent ainsi une attention indubitable à la dégradation, par la transformation des modes de production agricole et industriel, de la richesse des sols, de la santé des travailleurs, de l’air même des ateliers et des usines, de la nourriture, ou encore de la vie des familles ouvrières et des soins des mères à leurs enfants.
S’appuyant sur des historiens de l’économie comme Blackburn et Polanyi parfois plus que sur Marx lui-même, Foster et Clark montrent que le capitalisme n’opère pas une transition d’une économie d’expropriation, fondée sur le pillage des terres et des ressources sans échange, vers une économie d’exploitation du travail fondée sur l’échange équivalent sur des marchés, mais que les deux forment une « dialectique de l’exploitation et de l’expropriation » (p. 37). L’exploitation génère du profit à l’intérieur du système, tandis que l’expropriation génère profit et extension du système à ses frontières, par la colonisation de nouveaux espaces, peuples, ressources ou écosystèmes. Ce faisant, il ne cesse d’aggraver la « séparation de l’homme et de la nature » et la « rupture du métabolisme » déjà dénoncées par Marx, notamment à propos de l’agriculture intensive anglaise, grande importatrice de guano du Pérou et d’ossements de toute l’Europe. Le chapitre II offre une belle étude de cas en montrant comment Marx s’est intéressé de près aux pratiques agricoles imposées par l’Angleterre à l’Irlande, jusqu’au type d’engrais et de rotation des cultures. Il a ainsi rapporté la Grande Famine de 1845-1852 à la pression sans cesse accrue sur les sols et les paysans irlandais au détriment de pratiques plus durables, et à la généralisation de la pomme de terre comme nourriture quasi exclusive des travailleurs.
Marx est toutefois souvent accusé par la gauche contemporaine d’avoir ignoré, sciemment ou non, ou trop peu développé toute une série de problèmes aujourd’hui considérés comme essentiels dans les luttes progressistes : la reproduction sociale et la charge qu’elle fait peser sur les femmes, la souffrance infligée aux animaux, la production durable d’une nourriture de qualité pour tous. Les auteurs consacrent donc un chapitre à chacune de ces questions, pour montrer au contraire que Marx (et Engels) ont bel et bien été des témoins, et même des investigateurs critiques de la dissolution de la famille ouvrière due au travail des femmes et des enfants, des maladies occasionnées par les conditions de travail et par une nourriture souvent frelatée (contenant du plomb, de la strychnine, du sulfate de cuivre, de la craie…), et même de la souffrance animale. Ils apportent ainsi indéniablement de la chair à l’analyse marxiste, et montrent de façon convaincante que les deux penseurs ont été des témoins attentifs des maux de leur temps dans leur diversité concrète, y compris ceux auxquels on ne les associe pas nécessairement. Ils passent toutefois un peu vite des intérêts, des lectures, voire des prises de position de Marx et Engels à l’idée que ces derniers auraient théorisé ces questions en leur donnant une importance comparable à celle qu’elles ont aujourd’hui, et que Marx serait à la fois un « théoricien de l’alimentation », un penseur de la reproduction sociale et un contempteur du « spécisme aliéné ». Que des auteurs postérieurs aient développé ces points à partir des intuitions et de la méthode de Marx ne veut pas dire que tout cela était déjà présent dans son œuvre, comme ils le laissent parfois entendre.
L’écomarxisme, seule écologie politique à la hauteur des enjeux ?
La deuxième partie du livre constitue un appel à rompre avec les formes d’écologie politique qui ne remettent pas en cause le caractère structurellement écocidaire du capitalisme, mis en évidence dans la première partie, et à faire de son abolition la condition d’une écologie efficace. L’argumentaire (parfois sévère) n’est pas tourné tant vers les capitalistes revendiqués que vers d’autres fractions de la gauche écologiste, en particulier celle qui épouse une forme d’écomodernisme et rejette toute décroissance, et celle qui tente de valoriser la nature à l’intérieur de l’économie de marché, en donnant un prix aux « services écosystémiques » ou à l’émission de carbone.
Le capitalisme, conformément aux intuitions du « Marx écologiste », mais sans doute plus profondément encore, ne peut s’abstenir de détruire sans retour des portions toujours plus grandes de la nature dont il a pourtant besoin, sapant ainsi ses propres bases à long terme. Mais les auteurs ne tombent pas pour autant dans un attentisme naïf qui consisterait à espérer cet effondrement imminent : ils s’efforcent au contraire de montrer combien le capital pourrait tirer parti de la raréfaction des ressources, qui permettra leur privatisation et leur revente avec profit – le tout au nom de la soi-disant « tragédie des communs » théorisée par Hardin, hypothèse très contestée selon laquelle les biens communs seraient toujours l’objet d’une surexploitation, que seule leur privatisation pourrait empêcher [3]. Foster et Clark reviennent utilement pour cela au paradoxe formulé par Lauderdale au tout début du XIXe siècle (ch. VI) :
Autrement dit, la rareté est une exigence nécessaire pour que quelque chose ait une valeur en échange, et pour augmenter les fortunes privées. Mais ce n’est pas le cas de la richesse publique, qui englobe toute valeur dans l’usage, et inclut ainsi ce qui est rare, mais aussi ce qui est abondant. Ce paradoxe a conduit Lauderdale à affirmer que les augmentations de rareté pour des éléments de vie, jusque-là abondants, mais nécessaires tels que l’air, l’eau et les aliments, si on leur attachait alors des valeurs d’échange, amélioreraient les fortunes privées individuelles, et donc les richesses du pays – conçues comme « la somme totale des fortunes individuelles » - mais uniquement au détriment de la richesse commune. (p. 155)
L’économie classique a rejeté ce paradoxe en refusant de tenir compte de la valeur d’usage, ne considérant exclusivement, à la suite d’Adam Smith et de Jean-Baptiste Say, que la valeur d’échange, et considérant les ressources naturelles comme des forces gratuites n’entrant pas dans le calcul économique. Des écologistes comme E.F. Schumacher (Small is Beautiful, 1973) ou David Harvey (Marx, Capital and the Madnesse of Economic Reason, 2017) ont fait le reproche à Marx d’avoir lui-même concentré ses analyses sur la production de valeur d’échange et de n’accorder aucune valeur à la nature. Les auteurs rappellent qu’au contraire Marx souligne, dans la Critique du programme de Gotha, que :
Le travail n’est pas la source de toute richesse. La nature est tout autant la source des valeurs d’usage (et ce sont bien elles qui constituent de fait la richesse) que le travail, qui n’est lui-même que l’expression d’une force naturelle, la force de travail humain [4].
L’aveuglement écologique d’une économie qui ignore la valeur d’usage se retrouve également, pour les auteurs, dans les propositions des écologistes qui entendent réguler la destruction capitaliste en attribuant un prix aux vivants, aux écosystèmes, aux conditions élémentaires de la vie telles qu’une eau potable et un air respirable, ou voient dans l’augmentation du prix de ces ressources la fin programmée du capitalisme. Dans leur chap. IX, « La valeur n’est pas tout », ils poursuivent ainsi un débat virulent entamé depuis au moins 2017 avec le penseur écologiste Jason W. Moore, auteur du Capitalisme dans la toile de la vie, et critique sévère du concept fostérien de « rupture métabolique » comme étant excessivement « dualiste » et « cartésien [5] ». Moore développe dans son ouvrage une analyse optimiste de l’histoire du capitalisme puisque celui-ci, dépendant de l’accès à une nature bon marché, approcherait de sa fin à mesure qu’il cause le renchérissement des ressources. Foster et Clark proposent une critique convaincante de ces théories qui refusent à la nature toute autonomie pour l’intégrer entièrement à un capitalisme-monde, et pensent en termes capitalistes lorsqu’ils cherchent à lui attribuer une valeur économique, fût-elle très élevée. Ils rappellent que des débats semblables avaient déjà préoccupé Marx et Engels face aux physiocrates, mais aussi aux premières tentatives d’intégrer l’énergie naturelle à l’économie marchande via la thermodynamique. En un mot, pour les auteurs : « Les oiseaux chanteurs disparaissent parce que leurs habitats sont détruits par l’expansion historique du système – pas simplement parce qu’ils sont considérés « sans valeur » du point de vue du marché. » (p. 237)
Le livre rappelle par un ensemble de données essentielles (mais suffisamment connues ou accessibles pour ne pas y revenir ici) l’urgence et la gravité des multiples crises écologique qui nous menacent ou, comme le réchauffement climatique ou la disparition à un rythme alarmant de la biodiversité, sont déjà sur nous. Fidèles à l’intention scientifique de Marx et Engels, les auteurs appellent à tenir compte des sciences du système Terre et des limites planétaires qu’elles ont établies. Ils se montrent donc logiquement critiques à l’égard de l’écomodernisme qui voit dans la technologie rationnellement utilisée, y compris la géo-ingénierie, une solution à tous les problèmes environnementaux (c’est l’occasion d’une autre polémique avec la revue socialiste américaine Jacobin, au ch. XI). Si les contours de la société écologique future sont à peine esquissés (notamment dans un chapitre sur « le sens du travail dans la société socialiste », qui s’appuie de manière stimulante sur l’artiste et penseur marxiste William Morris), la direction de la « longue révolution écologique » (le mot est encore de Morris) est claire pour John Bellamy Foster et Brett Clark : elle doit abolir un capitalisme intrinsèquement écocidaire et absurde, qui non seulement génère des quantités toujours croissantes de déchets, de destruction et de souffrances, mais gaspille en même temps une quantité gigantesque de valeur dans la construction de la demande de biens inutiles, par le marketing sous toutes ses formes, ou dans les budgets militaires. Ce « système construit sur le gaspillage » doit laisser place, selon la formule célèbre de Marx, à une société dans laquelle
les producteurs associés règlent rationnellement leurs échanges avec la nature, [où] ils la contrôlent ensemble au lieu d’être dominés par sa puissance aveugle et [dans laquelle] ils accomplissent ces échanges en dépensant le minimum de force et dans les conditions les plus dignes, les plus conformes à leur nature humaine [6].
Et de rappeler utilement, contre les accusations de productivisme naïf, les critiques d’Engels de l’idée moderne de domination de la nature (p. 285). Loin de constituer un objectif à repousser face à l’urgence climatique, la « lutte révolutionnaire » (p. 289) pour l’écosocialisme est aux yeux des auteurs la seule voie d’une écologie émancipatrice et efficace. À rebours des Adieux au prolétariat d’André Gorz, pionnier de l’écosocialisme contemporain, les auteurs concluent sur la constitution en cours d’un « prolétariat environnemental » rassemblant en priorité ceux qui sont les principales victimes des crises écologiques :
Cette révolte trouvera inévitablement son principal élan dans un prolétariat environnemental, formé par la convergence de crises économiques et écologiques et la résistance collective des cultures et des communautés qui travaillent – une nouvelle réalité qui émerge déjà, particulièrement dans le Sud global. Ce sera nécessairement une bataille menée de façon disproportionnée par les jeunes, vu l’énorme fardeau qu’on leur fait porter actuellement, mais la lutte doit être menée par nous tous. (p. 289)
On reste toutefois sur sa faim quant aux modalités réelles de constitution et d’organisation de ce nouveau prolétariat, par nature beaucoup plus éclaté et bénéficiant apparemment d’un rapport de force encore moins favorable que le prolétariat ouvrier du XIXe et XXe siècle.
Conclusion : sauver les vivants, ou sauver Marx ?
La relecture de Marx offerte par ce livre, qui prolonge le Marx écologiste de Foster ou La nature contre le capital de Kohei Saïto, est un apport indiscutablement utile, à la fois à notre connaissance du grand penseur du capitalisme, et aux débats contemporains sur l’écologie. Les auteurs semblent cependant parfois plus soucieux de sauver Marx de toutes les critiques que de sauver la planète. Leur tentative d’en faire une sorte de source suffisante de toute pensée progressiste et émancipatrice apparaît peu motivée sur certains cas (le féminisme ou la l’éthique animale notamment), quoiqu’elle puisse permettre de redresser la barre face à des excès opposés. Que Marx ait accordé une place à la nature dans son analyse de la société et du capitalisme, et même dans la production de richesse, et qu’il ait été conscient de certaines destructions qu’on appellerait aujourd’hui écologiques (pollution de l’eau et de l’air ou appauvrissement des sols), cela semble désormais établi. Que cette question ait tenu dans sa pensée le rôle central que les auteurs lui accordent, ce n’est pas entièrement convaincant, comme le montre d’ailleurs leur tendance à en revenir souvent aux mêmes citations de Marx, ou d’accoler à celui-ci des concepts ou des citations d’autres auteurs (d’une manière qui prête parfois à confusion), et le fait qu’ils puisent dans un très large corpus de travaux ultérieurs, ce qui fait d’ailleurs toute la richesse du livre. On peut aussi noter qu’ils se tiennent à l’écart du tournant ontologique de l’écologie, et ne cherchent pas (comme a pu le faire récemment Paul Guillibert) à justifier beaucoup leur usage des catégories de nature et de société, aujourd’hui sous le feu des critiques.
Les concepts de « rupture métabolique », d’expropriation de la nature, de dialectique exploitation (au cœur du système) / expropriation (aux frontières) sont toutefois précieux pour mettre en évidence le caractère intrinsèquement écocidaire du capitalisme, et fournissent une grille de lecture pertinente de la façon dont nos sociétés se rapportent à leurs conditions naturelles d’existence.
Même si l’analyse est surtout critique et générale, elle recentre la lutte écologique sur un adversaire concret, le capitalisme, plutôt que d’en appeler seulement à un changement encore plus général de vision du monde ou d’ontologie. Elle fixe un cap aux mouvements écologistes aussi bien que socialistes, bordé par les écueils à éviter : la société nouvelle devra réguler rationnellement ses rapports avec la nature par une forme de planification tout en restant démocratique, supprimer le gâchis capitaliste de valeur et de ressources et notamment l’énorme gaspillage de la publicité, revenir sur l’extrême division du travail et retrouver les moyens de produire moins et mieux, en développant « de nouvelles possibilités de travail non aliéné et d’art sur le lieu de travail, qui permettent de récupérer à un niveau supérieur ce qui a été perdu avec la disparition de l’artisan » (p. 185), sans tomber dans l’utopie nostalgique, inventer une économie qui tienne compte des limites du système Terre et ne réduise pas la richesse à la valeur d’échange, remettre au cœur de la production la valeur d’usage et avec elle tout le travail de reproduction sociale aujourd’hui invisibilisé, et faire de la préservation de la santé humaine et animale un objectif central. Tout cela en inventant une forme nouvelle du métabolisme entre la société et la nature, une nouvelle étape d’une relation dialectique qui n’est pas vouée à un accroissement fatal et désespérant de la domination technique.
Ce livre permettra au lecteur de découvrir un autre Marx et d’entrer de manière claire et stimulante dans les débats qui partagent ou déchirent la gauche écologiste contemporaine, même s’ils sont évidemment présentés dans une perspective polémique, celle de la mouvance la plus marxiste de l’écosocialisme. Sa traduction en français par Cyrille Rivallan et les Éditions critiques contribue heureusement à rendre accessible au lectorat francophone le très vivant courant écosocialiste, celui des revues Monthly Review de Foster, Capitalism Nature Socialism de feu James O’Connor, ou Climate & Capitalism de Ian Angus, un courant avec lequel l’écologie politique doit désormais compter.
John Bellamy Foster et Brett Clark, Le pillage de la nature (2020), trad. fr. C. Rivallan, Paris, Éditions critiques, 2022. 384 p., 26 €.
Bibliographie : – Michael Löwy, Qu’est-ce que l’écosocialisme ?, Le temps des cerises, 2020
– James O’Connor “On the two contradictions of capitalism”, Capitalism Nature Socialism 2:3, 1991, p.107-109
– Paul Burkett, Marx and Nature : A Red and Green Perspective, Haymarket, 2014 (1999)
– Paul Guillibert, Terre et capital. Pour un communisme du vivant, Amsterdam, 2021
– Jason W. Moore, Le capitalisme dans la toile de la vie. Écologie et accumulation du capital, L’Asymétrie, 2020
– John Bellamy Foster, Brett Clark et Richard York, The Ecological Rift : Capitalism’s War on the Earth, Monthly Review Press, 2010
– Kohei Saïto, La nature contre le capital. L’écologie de Marx dans sa critique inachevée du capital, trad. G. Billy, Syllepse, coll. Mille Marxismes, 2021.
Pour citer cet article :
Bertrand Vaillant, « Le capitalisme écocidaire »,
La Vie des idées
, 12 décembre 2022.
ISSN : 2105-3030.
URL : https://laviedesidees.fr/Foster-Clark-Le-pillage-de-la-nature
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[1] Paul Burkett et John Bellamy Foster, Marx and the Earth. An Anti-Critique, Leyde, Brill, 2016.
[2] James O’Connor (1991) “On the two contradictions of capitalism”, Capitalism Nature Socialism, 2:3, 107-109, DOI : 10.1080/10455759109358463
[3] Garrett Hardin, “The Tragedy of the Commons”, Science, 162 (3859), 1968, p. 1243–1248.
[4] Karl Marx, Critique du programme de Gotha (1875), cité dans Le pillage de la nature, p. 164
[5] Jason W. Moore, “Metabolic Rift or Metabolic Shift ? Dialectics, Nature, and the World-Historical Method”, Theory and Society 46(6), September 2017, DOI:10.1007/s11186-017-9290-6
[6] Karl Marx, Le Capital, livre III, cité dans Le pillage de la nature, p. 267.