vendredi 4 janvier 2008
par Ismail Ferhat
Le Parti socialiste, tant en histoire qu’en sciences politiques, suscite de nombreuses recherches, marquées par l’interdisciplinarité et l’exploration de champs novateurs. C’est ce que rappelle le dossier coordonné par Pascal Goetschel et Gilles Morin sur « le PS, nouvelles approches ». Comme le rappellent les deux historiens dans leur article introductif, l’apport des sciences humaines transforme les méthodes d’étude d’un mouvement désormais plus que séculaire.
Michel Winock propose une lecture de la place du Parti socialiste dans le système politique français après les défaites électorales de 2002 et de 2007. Celui-ci, malgré un discours souvent révolutionnaire, s’est largement intégré et identifié au modèle républicain. Aude Chamouard s’intéresse au socialisme municipal de 1900 à 1939, qu’elle analyse comme une matrice du réformisme. Noëlline Castagnez étudie la notabilisation des élus socialistes sous la Quatrième République. Les deux auteures montrent une notabilité politique croissante ; celle-ci est renforcée par la faiblesse de l’appareil face aux dirigeants fédéraux et la longévité des élus, notamment les maires et les conseillers généraux.
Gilles Morin analyse la manière dont les socialistes ont tissé des liens avec la société civile française. Il remet en cause l’idée d’un mouvement globalement incapable de tisser des rapports avec les associations et les syndicats. En effet, la SFIO, puis le PS, ont su investir des sociabilités et des milieux dont ils étaient a priori éloignés, comme les milieux laïcs. François Lafon utilise quant à lui le secrétariat général comme un moyen de déconstruire la structure de pouvoir au sein du parti. Les deux auteurs montrent combien la SFIO est victime d’une image parfois faussée.
Hélène Hatzfeld rouvre le débat sur les transformations politiques du socialisme lors des années 1970. A la suite de mai 68, une série de nouvelles idées – féminisme, écologie, autogestion – a fortement influencé le corpus idéologique du PS. Frédéric Cépède et Fabrice d’Almeida posent la question des permanences et des évolutions du militantisme socialiste. Celui-ci est bouleversé dans un parti tourné vers les élections et un univers médiatique de plus en plus présent. Carole Bachelot, pour le dernier article du dossier, propose une comparaison des groupes dirigeants du PS et du Labour. Chacun s’interroge sur les continuités, les mutations et les ruptures dans le parti depuis le congrès d’Epinay.
A travers tous ces articles, la revue Vingtième siècle invite donc à une approche renouvelée du phénomène socialiste français selon trois idées-forces : la déconstruction de certains mythes tenaces sur la SFIO et le PS, l’approche multidisciplinaire, la volonté d’analyser les réseaux para-partisans et les rapports entre culture et idéologie. Les auteurs montrent que ce champ d’études, ayant déjà suscité de nombreuses recherches, reste encore très fécond. Et ils soulignent que certains débats actuels au sein du socialisme hexagonal (médiatisation des dirigeants, rapports à mai 68, poids des notables et des fédérations, relations avec le « mouvement social ») ne sont pas récents, mais au contraire récurrents.