Au musée d’Orsay, l’exposition « Le modèle noir, de Géricault à Matisse » cherche à rendre visible ce qu’une certaine histoire de l’art avait occulté : la place des modèles noirs dans les Beaux-arts. L’historienne de l’art Anne Lafont retrace la genèse de l’exposition et en propose une visite guidée.
Comment se fait la recherche, comment se formulent les hypothèses ? Comment s’inventent les théories ? Comment le savoir se conserve ? Comment s’exposent les œuvres ? La Vie des Idées souhaite, sous forme de podcasts, donner la parole aux acteurs de la vie intellectuelle et culturelle. Du laboratoire à l’atelier, de la bibliothèque à la scène, la Vie des Idées se met à l’écoute.
Anne Lafont est l’une des quatre membres du Comité scientifique de l’exposition. Elle est historienne de l’art, et directrice d’études à l’École des Hautes Études en Sciences Sociales. Ses travaux de recherche les plus récents ont porté sur l’imagination picturale des nouveaux citoyens noirs dans les révolutions atlantiques (L’art et la race. L’Africain (tout) contre l’œil des Lumières, Presses du réel, 2019).
Ses recherches s’orientent désormais vers l’art des Antilles françaises pendant la période coloniale et esclavagiste.
L’exposition « Le modèle noir de Géricault à Matisse », accrochée actuellement au Musée d’Orsay, représente une rupture dans la muséographie française. Elle est la première en France consacrée à la représentation des Noirs dans un grand musée de Beaux-Arts. Centrée sur la relation entre artistes blancs et modèles noirs, de la première abolition de l’esclavage aux années 1940, elle propose une rencontre, à distance de la vie coloniale, avec les modèles et les communautés noires vivant à Paris. Ses ambitions sont grandes : rendre visibles celles et ceux qui étaient jusqu’alors invisibles à l’image de Laure, faire-valoir de l’Olympia de Manet ; leur redonner une singularité et une identité au-delà du simple fait qu’ils et elles sont noirs ; les sortir de l’anonymat. Gageons que cette exposition réorientera le regard et renouvellera le questionnement de l’histoire de l’art.
Interrogée par La Vie des Idées, Anne Lafont nous explique les partis pris de cette exposition appelée à avoir des effets politiques et muséographiques durables. Elle partage avec nous le travail préalable mené par les commissaires et les membres du comité scientifique, ainsi que certaines des discussions qu’ils ont pu avoir sur le choix des œuvres. Elle nous guide ensuite dans l’exposition en s’arrêtant devant les œuvres que nous avons jugées les plus marquantes.
Cécile Debray, Stéphane Guégan et al., Le Modèle noir, de Géricault à Matisse. Catalogue d’exposition, Musées d’Orsay et de l’Orangerie / Flammarion, 2019
Anne Lafont, « La représentation des Noirs : quel chantier pour l’histoire de l’art ? », Perspective. La
revue de l’INHA, 2013-1, p. 67-73
Anne Lafont, L’art et la race. L’Africain (tout) contre l’œil des Lumières, Les Presses du Réel, 2019
Pap Ndiaye, La condition noire. Essai sur une minorité française, Calmann-Lévy, 2008
Pour citer cet article :
Catherine Guesde & Pauline Peretz, « Joseph, Madeleine, Laure et Zita : les visages noirs de la peinture française. Entretien avec Anne Lafont »,
La Vie des idées
, 10 mai 2019.
ISSN : 2105-3030.
URL : https://laviedesidees.fr/Joseph-Madeleine-Laure-et-Zita-les-visages-noirs-de-la-peinture-francaise
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