Recensé : Marianne Massin, La pensée vive. Essai sur l’inspiration philosophique, Armand Colin, 2007, 227 pages, 22,5 euros.
« D’où viennent les idées justes ? », se demandait, quand il était dans sa gloire, un marxisme persuadé de maîtriser la source desdites idées. « De la pratique », répondait le catéchisme. Plus prudent, Nietzsche semble contourner le problème : « une pensée vient quand “elle” veut et non quand “je” veux » [1]. Dans un sens proche et différent, Leibniz écrivait déjà : « Quelle nécessité y a-t-il qu’on sache toujours comment se fait ce qu’on fait ? Les sels, les métaux, les plantes, les animaux, les planètes, et mille autres corps animés ou inanimés, savent-ils comment se fait ce qu’ils font, et ont-ils besoin de le savoir ? […] Nous ne formons pas nos idées parce que nous le voulons ; elles se forment en nous, elles se forment par nous, non pas en conséquence de notre volonté, mais suivant notre nature et celles des choses » [2].
On pourrait multiplier les citations. Mais il y a une réponse qu’on ne rencontrera plus guère aujourd’hui : la réponse par l’inspiration. Par métaphore, bien sûr, tout le monde dit qu’il est ou qu’il n’est pas inspiré. En tel contexte, le mot « inspiré » est à peu près vide de sens, c’est comme quand on dit « je n’ai pas été très efficace aujourd’hui ». Personne ne pense sérieusement aujourd’hui que le penseur, et plus encore le philosophe, puisse être inspiré, c’est-à-dire recevoir ses pensées d’une instance objective et extérieure à lui. Recevoir ses idées de la pratique, de la volonté de puissance, de l’inconscient, des replis de son âme miroir de l’univers, de sa puissance d’agir, de l’expérience, très bien. Mais les recevoir d’un dieu !
Cette idée a pourtant longtemps été une idée sérieuse, une idée digne de considération, une idée appuyée par l’autorité des philosophes et des poètes. C’est à cette idée que Marianne Massin, à qui l’on doit déjà un beau livre consacré à la question du ravissement [3], consacre son dernier ouvrage intitulé La pensée vive. Essai sur l’inspiration philosophique. Le projet est à la fois historique et philosophique. Grandeur et chute de la notion philosophique d’inspiration rythment la première partie du livre. La deuxième partie explore plusieurs expériences de prime abord extra-ordinaires, expériences vécues et décrites par des penseurs comme Rousseau, Platon, Nietzsche, et quelques autres. La troisième partie nous reconduit à l’ordinaire, un ordinaire dont l’extra-ordinaire n’est pas tant le contraire que la forme exacerbée.
Et si, malgré tout, il y avait quelque sens à conserver, à revitaliser, à réévaluer, après l’avoir « nettoyée » [4], la notion d’inspiration philosophique ? Sous le déni moderne de la notion, n’y aurait-il pas quelque sourde reconnaissance de sa vérité ? Et si toute pensée, même ordinaire, ne pouvait se passer d’inspiration ?
Grandeur et misère de l’ « antique notion d’inspiration »
L’emploi très affaibli du mot « inspiration » dans la langue commune trahit, selon Marianne Massin, un « triple déplacement » [5] : du religieux au mondain, de l’exceptionnel à l’usuel, de l’élévation à l’abaissement. Il faut prendre la mesure de la chute de la notion, « réveiller en nos mémoires les potentialités vives de la notion » [6].
C’est à Platon que nous fait remonter ce travail d’anamnèse. L’Ion (la métaphore de l’aimant), le Phèdre (la théorie de la mania), le Banquet (la puissance dialectique de l’amour démonique), autant de dialogues inspirés qui réfléchissent discursivement le mouvement qui les anime et dont Socrate exclut d’être l’auteur souverain. La philosophie est donc à la fois réflexion rationnelle et « sœur de la transe poétique ». Elle « présente la même oscillation entre dépossession et possession » [7]. Une tension se fait donc jour, opposant inspiration hétéronomique et labeur philosophique en quête d’autonomie, tension dont la tradition platonicienne se nourrira sans arriver à la dominer. Car comment discriminer la bonne inspiration de la mauvaise ? Quelle est la pierre de touche ? Socrate déjà se posait la question dans le Phèdre.
Une seconde ligne se dessine alors dans la pensée antique, celle d’Aristote ou plutôt de Théophraste [8], qui cherche non plus dans l’intervention des dieux, mais dans la complexion et les humeurs, les vraies causes des états d’inspiration. De ces deux traditions, Marsile Ficin proposera, à la Renaissance, une synthèse [9], nécessairement instable. Montaigne, pourtant sensible à l’enthousiasme poétique, se moquera des « extases et démoneries » de Socrate [10]. C’est entre Ficin et Montaigne que passerait donc la césure séparant l’« antique notion d’inspiration », toute dorée, de la mise en suspicion moderne d’une « inspiration » sans titres ni valeur.
Marianne Massin rapproche ce déclin philosophique de l’ « inspiration » de ce que l’abbé Cognet appelait « le crépuscule des mystiques », formule qu’imitera Marc Fumaroli parlant du « crépuscule de l’enthousiasme », au 17e siècle. L’inspiration, sous la plume de ses détracteurs, devient alors enthousiasme aveugle, fanatisme ridicule et dangereux. Cette historia stultitiae, pour parler comme Martial Gueroult, débouche tout naturellement sur l’article « Philosophe » du Dictionnaire philosophique de Voltaire ; elle conduit aussi à la vigoureuse lutte menée par Kant contre la Schwärmerei au nom de l’entendement sain et de la raison pure pratique. L’inspiration et ses louches puissances sont alors soigneusement contenues, tolérées aux frontières seulement, dans le discours des artistes et des amateurs d’art. Une telle virulence, fait justement remarquer Marianne Massin, s’explique aussi et surtout par la puissance des instances religieuses dans les 17e et 18e siècles.
Aujourd’hui « émancipée des tutelles religieuses » [11], la philosophie occidentale n’a plus de raison de refouler la notion d’inspiration. Car que cache ce refus, apparemment si raisonnable, d’être inspiré ? Madame de Staël saura, au tournant de deux siècles, de deux sensibilités, se méfier « de ces gens ambitieux de paraître détrompés de tout enthousiasme » [12]. La formule est jolie, la formule est profonde. Elle ne suffit pas à réhabiliter l’inspiration, mais elle ouvre un espace où la question peut être reprise. Après la « cartographie des possibles ostracismes » [13] dont l’inspiration est l’objet, il est nécessaire d’en pénétrer la structure et le fonctionnement.
« Être éprouvé par ce que l’on éprouve »
Portée aux nues ou traînée dans la boue, l’inspiration n’a pas encore été comprise. Est-elle un acte ? une forme de passivité ? Est-elle irrésistible ? Nous ne pouvons suivre le détail des subtiles analyses que Marianne Massin nous propose de Valéry refusant d’être « le flageolet des dieux » [14] mais, décidant, dans un audacieux retournement, que l’inspiration est « une attribution gracieuse que le lecteur fait à son poète » [15] ; ni les analyses non moins précises et subtiles de l’étrange « Invocation aux Muses » par laquelle Montesquieu ouvre le livre XX de L’Esprit des lois, livre apparemment peu recommandable aux Muses (on doute qu’elles puissent porter grand intérêt aux « lois, dans le rapport qu’elles ont avec le commerce considéré dans sa nature et ses distinctions » !). C’est du statut de la « position » de ses principes par Montesquieu qu’il est ici question : Montesquieu se vit comme le « scripteur » de principes qui, d’une certaine manière, se présentent et s’organisent d’eux-mêmes. L’enquête se poursuit avec Shaftesbury, Lucrèce, Malebranche, Platon, Rousseau.
Marianne Massin quête le moment d’inspiration. Celui-ci est souvent bref (« l’illumination de Vincennes » pour Rousseau, par exemple), mais il déclenche un processus, il éveille le désir de penser. Le philosophe emploie fréquemment une description sous forme pronominale : les pensées se présentent d’elles-mêmes, comme ses principes se présentaient à Montesquieu [16]. Pourtant elles ne sont pas des effets sans cause ; elles sont précédées d’un lent mûrissement (dont on ne prend conscience qu’après-coup), elles concentrent en un instant décisif toute une histoire, tout un réseau de cheminements intérieurs. Le discontinu de l’illumination exprime paradoxalement la continuité d’un travail souterrain. Marianne Massin en appelle logiquement à Bergson, penseur de l’unité des concepts en tension, pour penser ensemble cette continuité et cette discontinuité, cette altérité (symbolisée chez Platon par la figure de Diotime) et cette mêmeté, cette passivité et cette activité. Le moment de l’inspiration est celui où le penseur se sent complètement lui-même et complètement autre que lui-même, où il s’éprouve comme étant complètement passif et pourtant suprêmement actif. « Éprouvé par ce qu’il éprouve » [17], il se vit comme l’auteur même de ce qu’il éprouve.
On comprend alors que le discours religieux (j’aimerais dire « l’idéologie religieuse ») prête ses mots à une expérience qui n’est pas, en elle-même, de nature religieuse. C’est l’une des suggestions les plus fécondes du livre. Nettoyer la notion d’inspiration, c’est peut-être lui ôter sa gangue mystique pour en dégager le noyau rationnel, si l’on nous permet de pasticher non pas tant Marx que son premier traducteur français. « On peut se demander si le divin n’est pas une manière d’exprimer, en l’habillant des termes traditionnels, la transcendance de l’exigence de vérité sur les personnes qui la servent » [18]. Nous reviendrons plus loin sur ce thème essentiel. Le sage Platon se gardait bien d’appeler « dieu » la puissance inspiratrice ; cette puissance n’est qu’un « démon », un demi-dieu, un moins-qu’un-dieu, un je ne sais quoi au fond [19]. Mais c’est Nietzsche qui analysera le mieux, avec un vif souci de probité philologique, les structures complexes de l’inspiration. Ne présente-t-il pas l’idée de l’Éternel Retour comme le don d’une véritable illumination ou révélation ? L’inspiration, c’est ce nœud impensable où, dans « l’intensité de l’émoi », se contractent « l’imposition ressentie et l’adhésion consentie, la passivité et l’activité, l’extériorité et l’intériorité » [20]. Ce nœud est aussi un nœud rythmique, « l’amplitude rythmique de l’inspiration » dont parle Marianne Massin [21]. Ce rythme est celui d’un souffle (la métaphore passe à plusieurs reprises dans le livre), et l’inspiration est d’abord respiration.
« L’extraordinaire s’enracine dans une pratique coutumière »
Mais que se joue-t-il de si important dans la notion d’inspiration ? Rien de moins que le lien intime de la philosophie à ce qui n’est pas elle. Le mot important est ici « intime ». Est intime le lien qui me définit dans mon être même et mon activité la plus propre. La philosophie, en son être intime et son activité la plus propre, se nourrit de ce qui n’est pas elle. Certains noms, qui scandent de loin en loin le livre, forment une chaîne à cet égard très signifiante : Bergson, Ricoeur, Jean Wahl, Simone Weil, mais aussi Jan Patocka et Michel Foucault. Une formule particulièrement éclairante est due à Paul Ricœur : « La philosophie veut être première sous l’angle du fondement, ou, mieux, de la fondation ; mais elle ne peut l’être qu’à condition d’être seconde du point de vue de la source, du ravitaillement existentiel, du jaillissement originel » [22]. « Ravitaillement existentiel » n’est pas une formule très heureuse, mais l’idée est profonde. L’inspiration ne serait pas seulement une « source » dont on finit par se séparer, mais une eau que l’on ne peut cesser de boire sans mourir. La philosophie aimerait commencer par elle-même, Hegel a porté à son comble cette prétention. La notion d’inspiration nous rappelle au contraire que la philosophie échappe à la volonté de maîtrise absolue, à la « clôture auto-suffisante du sujet » [23].
Mais l’inspiration change alors de sens. Elle n’est plus seulement inspiration soudaine, déchirure dans l’ordinaire du penser ordinaire. Elle est une des faces ou des conditions de la pensée. L’inspiration est au cœur de l’ordinaire. Non pas cette inspiration dégradée et purement nominale dont traitait le début du livre, mais bien l’inspiration dans sa force et sa dignité. « L’extraordinaire s’enracine dans une pratique coutumière », dit fortement Marianne Massin [24]. L’inspiration a certes à voir avec le libre vagabondage d’un Rousseau (les Rêveries), d’un Montaigne (le Voyage en Italie, les longs trajets à cheval), d’un Diderot (Le Neveu de Rameau), mais ce vagabondage relève lui-même d’un choix et d’une « méthode » bien peu cartésienne. Le texte de Marianne Massin fait ici retour sur lui-même [25] – ou plutôt, il montre que ce sont les auteurs qui font retour sur eux-mêmes. Le même Montaigne qui condamnait les humeurs transcendantes et les démoneries de Socrate fait maintenant sa place à l’inspiration – mais c’est une inspiration sans fondement transcendant [26] ; oui, nos idées tiennent plus de la fortune que de nous, elles viennent quand nous marchons ou quand nous allons à cheval, et mieux encore dans la « conférence » ou la conversation. Toutes ces activités sont laïques et désacralisées, souligne l’auteure à très juste titre [27]. L’inspiration est pleinement humaine. Mais si ce n’est un dieu qui nous inspire, qui donc ?
Ici se tend un fil qui court tout au long du livre, et que nous n’avions pas jusqu’ici relevé : l’inspiration qu’un philosophe reconnaît devoir à un autre philosophe (Platon et Socrate, Malebranche et Descartes, Lucrèce et Épicure, Nietzsche et Schopenhauer…), voire à un poète, ou à un peintre. Nietzsche, par exemple, dresse ainsi la liste des penseurs qui l’inspirent et auquel il est redevable [28]. On voit de quoi est ici « nettoyée » la notion d’inspiration : de la religion, de ses folies, de ses superstitions. Il s’agit de « défendre l’inspiré contre les superstitieux » [29], qui ne sont pas seulement les hommes de Dieu.
L’inspiration philosophique n’apparaît plus alors comme délivrant une vérité tombée du Ciel, elle n’est plus la dictée d’un dieu. Elle est plutôt confrontation du penseur à l’altérité, elle est altération, mais « altération consentie » [30]. Elle est donc d’abord écoute, acceptation de l’extériorité, du discours de l’autre (cet « autre » fût-il en soi-même). On peut alors, en le laïcisant, relire saint Augustin écrivant dans ses Soliloques : « Quelqu’un me parla. Était-ce moi-même, était-ce un autre, était-ce à l’extérieur ou à l’intérieur ? Je n’en sais rien » [31]. La notion d’inspiration doit se penser selon des pratiques d’intersubjectivité, voire de pseudonymie [32]. Elle est non pas une méthode mais un « art » [33], un art du rythme et de la bonne respiration [34]. L’inspiration cesse alors de relever de l’aléatoire ou de la bonne fortune, sans qu’on soit pourtant jamais assuré de la trouver au rendez-vous de notre désir.
Marianne Massin conclut logiquement son travail par un « Éloge d’une philosophie inspirée et inspirante » [35]. Refusant de valider l’ostracisme dont une certaine tradition a frappé la notion d’inspiration, elle insiste sur la dimension « vivante » de la pensée pensante, sur la respiration et l’inspiration qui permettent cette vie de la pensée. La pensée n’est « vive », pour commenter le titre du livre, qu’à accepter d’être inspirée, de penser et respirer dans le rythme d’autres pensées.
Trois leçons de l’inspiration
On a essayé d’indiquer quelques thèmes insistants d’un livre que sa richesse rend assez difficile à résumer. Ce qu’a voulu faire Marianne Massin, c’est d’abord, selon sa très heureuse formule, « l’inventaire des héritages » [36], c’est ensuite ce qu’on pourrait appeler une herméneutique des témoignages, c’est enfin une réhabilitation de l’inspiration en philosophie. Les discours des philosophes sur leurs moments d’inspiration sont souvent plus descriptifs que proprement théoriques ; Marianne Massin cherche toujours à préserver la singularité de chaque expérience (Socrate n’est pas Rousseau, Montaigne n’est pas Nietzsche, comme d’ailleurs Baudelaire n’est pas Poe) non moins qu’à dégager des lois communes de l’inspiration. Le disparate des expériences fait partie de la singularité de ce type d’expériences ; des structures communes peuvent pourtant être dégagées, nous avons indiquées lesquelles (le lien du continu et du discontinu, de l’extérieur et de l’intérieur, de l’activité et de la passivité). Cette enquête conduit parfois l’auteure à beaucoup élargir la notion d’inspiration, jusqu’à sembler l’identifier avec l’enthousiasme et la Schwärmerei dans le chapitre 3, avec l’intuition aux pages 198-201, avec le « cœur » pascalien à la page 123. Dans ces rapprochements, la notion d’inspiration ne perd-elle pas quelque chose de son unité et de sa rigueur ? Jusqu’à quel point ces différentes notions peuvent-elles rapprochées de la notion d’inspiration ?
L’important n’est pas là, mais tient selon nous dans trois idées qui sont également trois leçons.
La première idée est que l’inspiration doit être dépouillée de ses oripeaux fantastiques pour être ramenée à la condition ordinaire de la pensée. C’est quand nous pensons vraiment qu’au cœur de notre pensée émerge la pensée qui nous surprend, qui nous illumine et nous transporte. Le mythe du génie ou du « favori des dieux » est ici vigoureusement congédié. La conception de l’inspiration ici présentée est une conception rigoureusement athéologique, parfaitement compatible avec une « culture laïque » [37]. La référence aux dieux, et déjà chez Platon, n’était qu’une manière de dire. Leçon morale, et même politique, d’égalité humaine et de défiance envers l’illuminisme, contrefaçon de l’inspiration.
La deuxième idée est assez paradoxale. L’idée d’inspiration, intégralement comprise, est une idée de modestie et non d’orgueil. Marianne Massin cite une belle formule de Pascal Quignard : « Accepter de ne pas être le père de ses pensées fut la première humilité de Socrate » [38]. Les philosophes aiment vaniteusement à croire qu’ils sont les pères de leurs pensées, et que leurs idées leur appartiennent comme leur trésor le plus intime et le plus propre, qu’on ne saurait leur emprunter sans crime. Ridicule prétention, dénoncée par un Montaigne ou un Pascal. Avouer être inspiré, c’est avouer n’être pas le maître de ses processus de pensée. « L’inspiration témoigne toujours de cette dynamique d’une pensée sans “propriétaire” » [39]. L’idée d’inspiration, bien comprise, signifie que quelque chose dans ma pensée inventive excède mes capacités et, en un sens, n’est pas « de moi ». Leçon de modestie.
La troisième idée est que l’inspiration, ainsi ramenée du Ciel sur la terre, ne vit que des pratiques dialogiques de l’humanité. La Bibliothèque et le Forum remplacent le Temple. Art de lire, art d’écouter, art de « conférer », art d’entendre, art de respirer, art du rythme partagé, l’inspiration ainsi entendue est au cœur de notre humanité. Bien loin d’isoler « l’inspiré » dans quelque étrange commerce privé avec les dieux, l’inspiration dialogique selon Marianne Massin réinscrit les plus grandes fulgurances théoriques de l’humanité dans les lois de la parole partagée, qui nous fait homme. Leçon éthique et dialectique.
Le travail de Marianne Massin est original et convaincant ; il redécouvre les potentialités d’une notion moins oubliée que refoulée, il réconcilie son lecteur avec une notion injustement tombée en discrédit. Dans son rythme et sa respiration mêmes, ce livre prêche d’ailleurs d’exemple, car il est tonique et activement inspirant.