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Certains patients, en contexte hospitalier, formulent une demande de laisser mourir ou d’assistance en vue de mourir et quelques-uns la justifient par un jugement négatif sur la valeur de leur vie. Il ne s’agit pas pour eux, ce faisant, de témoigner simplement de l’expérience de la maladie et de la conscience qu’elle suscite de la condition de mortel. De façon spécifique, dans une telle demande, l’expérience de la condition physique présente et la considération de la condition future apparaissent comme une source strictement négative du rapport à l’existence. Le rapport à la mort, éventuellement prochaine, n’est alors pas, ou pas seulement, perçu comme source d’angoisse ; la mort semble plutôt appréhendée comme une libération d’un état qu’on n’est plus prêt à supporter.
Avant de proposer une analyse du sens que les patients confèrent à leur jugement négatif sur la vie et à la demande qu’ils fondent sur ce jugement, une tâche préalable s’impose : celle d’élucider les raisons avancées pour contester la légitimité d’une interrogation à leur égard. Le statut de la demande de laisser mourir ou d’assistance en vue de mourir comme objet légitime de réflexion apparaît incertain. Or toute posture morale, politique ou institutionnelle au sujet de ces demandes repose nécessairement sur une prise de position à cet égard : on n’entre pas de la même manière dans le débat éthique, politique et juridique sur ces demandes, selon que l’on considère ou non qu’une réflexion à leur sujet a sa raison d’être. C’est afin d’éclairer cette prise de position préalable à toute discussion que nous proposons ici une analyse des arguments invoqués pour détourner l’attention de ces demandes et en faire un objet de recherche illégitime.
Le mouvement des soins palliatifs et la délégitimation de la volonté du patient
Le premier argument est d’ordre statistique : pourquoi consacrerait-on une réflexion à ces demandes et aux problèmes moral, politique et juridique qu’elles posent, alors qu’elles sont si rares ? [1] À cette première objection, trois réponses peuvent être apportées. Tout d’abord, ces demandes et leur justification doivent être examinées comme des choix moraux dont l’illégitimité ou la légitimité ne peut être affirmées a priori. L’argument de la rareté, avancé dans le cadre d’expériences professionnelles singulières, ne s’appuie pas, en outre, sur un réel savoir statistique de son objet. L’on ignore encore aujourd’hui quelle est la véritable fréquence statistique de ces demandes en contexte hospitalier. Enfin, le fait que les demandes soient rares ou fréquentes ne modifie pas la nature des questions soulevées : ces demandes suscitent un trouble et un malaise à la fois moral, politique et juridique, dont il convient d’identifier les raisons. Du point de vue de la compréhension des enjeux éthiques et politiques liés à la formulation de ces demandes, « l’argument statistique est sans portée » puisqu’il s’agit avant tout de « cerner la forme exemplaire d’un fait ». [2]
Si l’on met de côté l’argument de la rareté, une interprétation de ces demandes, développée en lien avec le mouvement des soins palliatifs, invite également, dans un second temps, à mettre en doute la légitimité d’une réflexion à leur égard : dans cette optique, ces demandes seraient essentiellement le fruit d’une illusion du sujet sur lui-même. Pour comprendre cette interprétation, il convient de s’intéresser aux soins palliatifs. L’approche du mouvement des soins palliatifs (« hospice movement »), initié par Cicely Saunders en Angleterre après la Seconde Guerre mondiale, repose sur l’idée de « douleur totale ». Ce mouvement entend proposer un modèle de la prise en charge de la « fin de vie », centrée sur la recherche de la meilleure « qualité de vie » possible jusqu’à la mort, et le refus de hâter ou de retarder la survenue de celle-ci [3]. En France, les soins palliatifs sont apparus plus tardivement qu’en Angleterre ou aux États-Unis et se sont développés lentement jusqu’au début des années 1990 [4]. Mais ils constituent aujourd’hui un élément important du contexte hospitalier, sous la forme soit d’unités à part entière, soit d’unités mobiles.
Dans ce cadre, l’interprétation est construite dans le langage de la psychologie et elle invite avant tout à considérer ces demandes comme les marques d’une illusion du sujet sur lui-même. Aussi les écoutera-t-on au mieux avec bienveillance : car la personne énonçant une demande de laisser mourir ou d’assistance en vue de mourir ne sait pas véritablement ce qu’elle dit. Dans une telle optique, une telle demande signifie plutôt le désir de ne plus souffrir. De fait, plusieurs maux physiques semblent favoriser la formulation d’une telle demande tant ils sont insupportables : par exemple, un état de cachexie confinant à une dépendance parfois totale, une dyspnée source d’inconfort et d’angoisse, des nausées et des vomissements incoercibles, spontanés ou provoqués par les traitements, ou encore des symptômes invalidants comme des épisodes d’occlusion digestives ou des signes neurologiques déficitaires [5].
Quand la souffrance n’est pas en jeu, d’autres éléments sont mis en avant : lorsqu’elle énonce une telle demande, la personne, loin de vouloir mourir, cède à un chantage, pas nécessairement conscient, de la part des proches qui la considèrent comme une charge, ou encore à une peur personnelle d’être elle-même une charge pour la société et la famille. Cette personne ne comprend pas qu’en réalité elle voudrait être accompagnée affectivement dans son cheminement vers la mort. Elle est peut-être « dépressive » et incapable d’envisager de façon lucide la nature de ses désirs et de ses besoins [6]. Elle ne parvient sans doute pas à engager le « travail du trépas », selon l’expression du psychanalyste Michel de M’Uzan, c’est-à-dire à accepter de se confronter à l’idée de sa mort prochaine [7]. Un tel discours s’attache à souligner l’ambiguïté du désir de mort, souvent manifeste dans un ultime sursaut de vie, violent et intense, à l’approche de la mort [8].
Cette perspective fait donc de la demande de laisser mourir ou d’assistance en vue de mourir un énoncé à double sens et invite à déplacer le questionnement du choix de mourir à la meilleure manière d’accompagner des personnes face à l’épreuve de la maladie incurable. En réalité, dit-on, le désir de mort affirmé par le patient dissimule autre chose que son contenu manifeste et cette « autre chose » peut et doit être prise en charge par l’institution hospitalière. Plutôt que d’accorder foi à une telle demande, il faut alors accorder un rôle central au diagnostic psychologique, psychanalytique ou psychiatrique, afin de rendre possible une prise en charge médicale de cette détresse, en sus de celle destinée à éliminer ou atténuer la douleur physique.
La personne, dans cette perspective, n’est plus réellement « compétente » car elle tient un discours qu’elle n’assumerait pas une fois traitée pour sa pathologie psychique. Il faut avant tout la traiter médicalement, prendre en charge sa souffrance psychique, afin de l’empêcher de « capituler dans son cœur et dans son âme » [9]. L’argument construit aujourd’hui dans le cadre des soins palliatifs rend ainsi suspecte la demande d’assistance en vue de mourir ou le refus de soins et moralement inacceptable une attitude médicale qui, non contente d’entendre cette demande, accepterait d’y répondre et d’« adoucir l’agonie et les souffrances de la mort » [10].
Des diagnostics de ce type n’identifient pas toujours la détresse éprouvée par les patients à de la dépression au sens strict du terme. Certains psychologues ou psychiatres se sont efforcés de proposer une grille de lecture affinée de cette souffrance psychologique. Ainsi, le psychologue américain Barry Rosenfeld invite à prendre en compte un état qui, sans être à proprement parler « dépressif », induit un comportement suicidaire ou, selon les cas, un intérêt pour le suicide assisté et l’arrêt de traitement : le désespoir (hopelessness). De la même façon, le psychiatre américain David W. Kissane a cherché à définir un état pathologique distinct de la dépression pour rendre compte du « choix de mourir ». Il le désigne sous le nom de demoralization. Pour définir cet état, il renvoie à une large palette de dispositions d’esprit qui ont en commun une incapacité ressentie à faire face à l’épreuve, un découragement, voire un désespoir, un sentiment d’impuissance et la perte du goût de vivre. Selon lui, ce syndrome de démoralisation peut être traité, dans le cadre du soin palliatif, au même titre que la dépression, de manière à la fois médicale et psychologique (à titre d’exemple, pour cette part du traitement, il évoque la possibilité de faire travailler l’individu sur le récit et l’évaluation de sa propre existence) [11]. Cependant, quel que soit le nom donné à cette détresse, elle est conçue comme une pathologie.
La possibilité de traiter la souffrance physique et psychologique du patient dans le cadre des soins palliatifs et l’interprétation qui en est donnée conduit à nier, au moins partiellement, la pertinence d’un questionnement sur la demande de laisser mourir ou d’assistance en vue de mourir. En effet, la cause première de la demande peut être éliminée : si la souffrance physique est curable, si l’on a aujourd’hui les moyens de mettre fin aux douleurs des « corps totalement atteints intérieurement par la maladie », au « supplice » des corps, selon les expressions de Platon et de Thomas More, la demande de laisser mourir ou d’assistance en vue de mourir perd l’une de ses raisons d’être principales [12]. L’analyse psychologique, psychiatrique ou psychanalytique de la souffrance invite à conclure qu’un tel énoncé ne relève pas d’un choix lucide et réfléchi de la personne.
Mourir un peu, revivre un peu
Peut-on défendre, malgré cette interprétation, la légitimité de constituer une telle demande comme objet de questionnement pour les sciences humaines et sociales ? Les trois éléments avancés dans cette interprétation (souffrance physique, crainte d’être une charge économique, solitude affective) suggèrent que la demande de laisser mourir ou d’assistance en vue de mourir renvoie à la difficulté que chacun peut éprouver face à la mort prochaine. Qui nierait d’ailleurs que de tels états suscitent une forme de détresse morale ? Cependant, face à cet argument, l’on remarque tout d’abord que le discours des soins palliatifs n’épuise pas l’ensemble des situations dans lesquelles une demande de laisser mourir est énoncée, puisqu’elles ne sont pas toujours le fait de patients en « fin de vie » [13].
En outre, on relève dans la communauté médicale elle-même, de manière éparse mais non négligeable, une relativisation du discours qui parle systématiquement de demandes fausses et illusoires. « Certains auteurs, rappelle le médecin Jean-Daniel Lelièvre, estiment d’ailleurs qu’un accompagnement palliatif adéquat suffit à abréger toutes les souffrances et rendent sans fondement la nécessité de réaliser une euthanasie. Cette assertion est toutefois contredite par d’autres auteurs qui estiment que les demandes d’euthanasie peuvent être encore réelles malgré la disparition de toute souffrance physique ou psychologique » [14]. Une approche nuancée semble de rigueur pour certains médecins, y compris ceux qui promeuvent le projet de soins palliatifs : la souffrance ne peut pas toujours être soulagée ; la demande de laisser mourir ou d’assistance en vue de mourir ne doit pas toujours être perçue comme l’expression d’un état psychique pathologique, comme le soulignent les médecins Patte, Wauters et Mignon dans une réflexion à propos de l’arrêt des traitements par dialyse [15]. Enfin, la demande de laisser mourir ou d’assistance en vue de mourir peut persister dans certains cas, même quand la personne est prise en charge de manière satisfaisante sur le plan à la fois matériel, médical, affectif et psychologique. Un tel constat ne remet pas en cause l’entreprise des soins palliatifs. Elle invite en revanche à élaborer un véritable questionnement sur cette demande.
Or, de ce point de vue, la demande de laisser mourir constitue moins un objet en quête de légitimité qu’un objet de recherche à constituer. L’état du savoir recueilli est encore très largement insuffisant et, au regard de celui-ci, l’on peut s’étonner du nombre et du caractère entier de la plupart des prises de position sur l’« euthanasie » : la passion qui en émane est sans doute inversement proportionnelle à la connaissance que l’on a du phénomène.
Aujourd’hui, 75 % et 80 % de la population française meurt dans les hôpitaux, et parfois selon une temporalité très particulière : « On ne meurt plus vite et bien, comme il y a un siècle, on meurt un peu, on revit un peu, on meurt de nouveau un peu, on revit un peu » en raison des progrès des techniques médicales et des soins destinés à maintenir en vie les patients [16]. Dans certains cas, les patients énoncent une demande de laisser mourir ou d’assistance en vue de mourir. De telles demandes font l’objet d’une expression complexe. Afin de n’en négliger aucune, il faut sans doute avoir une conception large de l’expression de la demande de laisser mourir. Pour commencer, cette demande n’est pas nécessairement verbale. Elle peut aussi se traduire en actes et en gestes, comme en témoigne le cas de cette patiente, âgée de 92 ans. Elle est en maison de retraite médicalisée depuis six ans. Lorsque son mari décède, elle rejette violemment les traitements et les soins de confort : « Mme A. pleure, refuse de manger, de boire, refuse d’assurer ses soins d’hygiène et elle ne veut plus se lever. Elle veut rejoindre son mari. ’Ayez pitié, dit-elle, je veux mourir, je n’ai plus de raison de vivre’ » [17].
Bien que l’expression et la réalité du phénomène ne fassent pas consensus dans la communauté médicale, le « syndrome de glissement » doit être également mentionné ici pour rappeler que la demande ne s’exprime pas toujours verbalement. Apparue dans la littérature médicale française en 1956, cette notion renvoie à la perception d’un état dans lequel la personne semble sciemment se laisser aller vers sa propre mort. Médicalement, il s’agit d’un état de décompensation rapide de l’état général survenant à la suite d’une affection aiguë. Dans cet état, le patient est susceptible d’énoncer un désir de mourir (avec ou sans assistance médicale), refuse de s’alimenter, de boire, de se lever ou encore de communiquer. Il se montre le plus souvent passif et demande à être « laissé tranquille », qu’on ne l’importune plus avec les soins, voire qu’on le laisse mourir [18]. Dans le même ordre d’idées, les expressions de « perte d’élan vital », de « mélancolie » ou d’« émoussement » apparaissent régulièrement dans les témoignages des médecins sur des patients en « fin de vie ». Ces termes ne renvoient pas nécessairement à une réalité scientifiquement construite, mais ils suggèrent bien que les médecins perçoivent de temps à autres chez certains patients quelque chose qui s’apparente à une perte du désir de vivre.
Le droit à l’euthanasieL’histoire française des trente dernières années atteste de l’émergence de telles demandes. Elles sont connues d’un lectorat restreint à travers la littérature médicale et des enquêtes en sciences sociales et humaines, comme celles de l’anthropologue Raymonde Courtas ou de la sociologue Anita Hocquard sur les courriers envoyés à titre privé par des individus à l’Association pour le droit de mourir dans la dignité [19]. Atteignant un public plus large, une parole militante et associative relaie également de telles demandes. L’Association pour le droit de mourir dans la dignité en France a été créée en 1980 par Michel Lee Landa, romancier, poète et universitaire, à la suite des nombreux courriers reçus après la publication du texte « Un droit », où il affirmait nécessaire de reconnaître aux grands malades, aux vieillards et aux infirmes le droit de mourir volontairement et d’y être aidés [20]. Selon les termes de l’article premier de ses statuts, cette association s’est donnée pour objectif de « promouvoir le droit légal et social de disposer de façon libre et réfléchie de sa personne, de son corps et de sa vie ». Cette parole militante et associative se fait entendre de façon diverse (publication d’une brochure, Autodélivrance, rédaction d’un bulletin d’information trimestriel, réalisation de sondages en collaboration avec la SOFRES, organisation de congrès, colloques et conférences, dépôt de projets de loi, etc.).
Depuis les années 1930 au moins, l’histoire sociale française est ponctuée par des prises de parole à ce sujet. Ainsi, avant la création de l’Association pour le droit de mourir dans la dignité, les années 1970 ont été le témoin de plusieurs initiatives. Par exemple, un manifeste favorable à la liberté de mourir a été publié par Le Figaro du 1er avril 1974, traduction d’un texte paru initialement dans The Humanist : trois prix Nobel , Jacques Monod, Linus Pauling et George Thompson, s’y déclaraient partisans de l’euthanasie, affirmant qu’aucune morale ne saurait interdire à quiconque de mettre fin à sa vie et qu’il serait « barbare et cruel » de maintenir une personne en vie contre sa volonté et de laisser une place à la « souffrance inutile » dans une société civilisée.
Plus récemment, la demande de laisser mourir s’est exprimée à travers des témoignages, comme ceux de Vincent Humbert et de Chantal Sébire, des fictions ou des documentaires. On peut citer quelques exemples de ces derniers, empruntés à l’année 2005 : le 1er novembre, la soirée Théma de la chaîne de télévision franco-allemande Arte, consacrée aux décisions en fin de vie, donnait à entendre le témoignage de personnes ayant indiqué que, dans tel ou tel état pathologique, elles préféraient ne pas être maintenues en vie, de familles prenant la décision d’interrompre un traitement pour un proche et d’équipes médicale confrontées à la question du choix du maintien en vie du patient. Quelques mois auparavant, le 20 mai, France 2 avait diffusé à 22h40 un documentaire intitulé « Le choix de Jean » : on y découvrait le citoyen de la Confédération helvétique Jean Aebischer, atteint d’une tumeur au cerveau, décidant de mettre fin à ses jours et s’adressant pour ce faire à l’association EXIT qui fournit une aide au suicide selon un protocole défini dans ses statuts [21]. Enfin, au cinéma, le film Mar Adentro du réalisateur espagnol Alejandro Amanabar relatait la même année l’histoire d’un marin tétraplégique qui a réclamé pendant de nombreuses années une assistance en vue de mourir. Ramon Sampedro avait lui-même publié un témoignage écrit en 1996 pour faire état de sa condition et justifier sa revendication : Mourir de vivre [22].
Nous avons donc affaire à une demande dont nous prenons connaissance sur un mode hétéroclite et non systématique, émanant de locuteurs différents. Elle est appréhendée de manière directe ou indirecte, à travers des témoignages privés ou publics, dans des discours dont les finalités et les supports sont variés. Nous disposons surtout à son égard de témoignages individuels et n’avons qu’une faible connaissance statistique de sa fréquence. Elle fait l’objet d’études qui se veulent moralement neutres (on songe ici aux travaux en sciences sociales), mais aussi, et c’est le cas le plus fréquent, de prises de position passionnées. Il reste donc beaucoup à faire pour obtenir une vision d’ensemble fiable des demandes de laisser mourir.
La difficulté d’y parvenir est grande. Le psychologue américain Barry Rosenfeld indique que, même aux États-Unis où les enquêtes en sciences humaines et sociales ont connu un développement plus important qu’en France, de nombreux problèmes subsistent, liés aux méthodes de recherche et à la nature même de l’objet. Ainsi, les enquêtes sont souvent menées à partir du témoignage que les médecins font du discours de leurs patients plutôt qu’à partir de ceux-ci, ce qui rend l’interprétation de la parole du patient sujette à caution. Lorsqu’on interroge les patients à propos du suicide assisté ou de l’euthanasie, plusieurs éléments, comme la sanction pénale de certaines pratiques, font obstacle à une parole libre. Enfin, la comparaison des études statistiques montre que leurs réponses varient significativement selon qu’ils se trouvent ou non dans un contexte décisionnel, et selon la nature de leur maladie (les états de démence ou de délire, en particulier, rendent complexe le recueil des données) [23].
De ce fait, la plus grande prudence est requise dans l’interprétation : la demande de laisser mourir ou d’assistance en vue de mourir est un objet de recherche légitime, mais son élaboration requiert encore beaucoup d’effort de la part des chercheurs en sciences sociales et humaines comme de la communauté médicale.