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Essai Économie

Dossier / Familles : nouvelles réalités, nouveaux regards

L’efficacité économique peut-elle justifier l’augmentation des droits de succession ?


par Luc Arrondel & André Masson , le 17 juin 2008


Comment inciter les ménages seniors qui en ont les moyens à transmettre plus rapidement leur patrimoine à leurs enfants ou petits-enfants ? La voie naturelle, selon les économistes Luc Arrondel et André Masson, consiste à donner l’avantage aux transferts entre vifs, aides ou donations, en accroissant l’impôt sur les héritages.

À paraître dans La question de l’intergénérationnel, sous la direction de A. Quéniart et R. Hurtubise, Éditions EHESP, Collection « Lien social et Politiques »

Dans les années récentes, une série de mesures ont été introduites en France pour limiter l’impôt sur les transmissions patrimoniales : donations Sarkozy en 2004, réforme du Code Civil en 2006, loi TEPA (pour le travail, l’emploi, et le pouvoir d’achat) en 2007. D’inspiration plutôt libérale, les objectifs déclarés visaient à améliorer l’efficacité économique, qu’il s’agisse de relancer ou soutenir la consommation des ménages, et plus particulièrement de contrebalancer l’écart grandissant entre les niveaux de vie des générations jeunes et âgées, mais aussi d’inciter les classes moyennes à l’effort et à l’investissement en faisant monter à 95 % la part des successions familiales exonérées. La contrepartie de telles mesures se situerait au plan de l’équité : l’impôt sur l’héritage se justifie le plus souvent par le désir de limiter la reproduction des inégalités d’une génération à la suivante, entre les jeunes bien-nés et les autres (section 1).

Notre thèse est que cette logique d’allégement fiscal, en vue d’accélérer la circulation du patrimoine aux enfants et petits-enfants, a atteint ses limites. Si l’on entend encore miser sur la famille pour « fluidifier des retours patrimoniaux » vers les nouvelles générations d’importance considérable, la solution appropriée consisterait au contraire à augmenter sensiblement l’impôt sur l’héritage. Certes fort impopulaire dans notre pays, la mesure ne serait plus motivée, comme naguère, par des considérations d’équité mais bien par un souci d’efficacité économique : en substance, l’argument est qu’un impôt sur les seules successions plus lourd et plus progressif redonnerait un avantage fiscal aux donations et autres transferts inter vivos, avantage relatif aujourd’hui en voie de disparition… sauf à subventionner ces transferts. Or nous savons :

  • que les ménages seniors français sont nombreux à disposer des moyens financiers requis pour procéder à ces transmissions avancées (section 2) ;
  • qu’ils réagissent à ces avantages relatifs en augmentant de manière sensible les donations à leurs enfants (section 3) ;
  • et que des réceptions précoces, en desserrant les contraintes de liquidité, s’avèrent faciliter de manière significative les projets des enfants bénéficiaires concernant aussi bien l’acquisition de leur logement, la création d’entreprise, etc. - alors que l’âge moyen de l’héritage est aujourd’hui de près de 50 ans (section 4).

Comment assurer enfin l’utilité sociale de ces retours patrimoniaux plus fluides, qui présentent toujours l’inconvénient de bénéficier à des enfants déjà favorisés lorsqu’ils s’effectuent par le canal de la famille ? L’idée serait de permettre aux parents les plus aisés d’échapper par une autre voie que familiale à l’impôt successoral, en favorisant les dons (ou legs) caritatifs à des œuvres ou fondations dûment répertoriées ; ce qui supposerait d’accroître la liberté de tester hors de la famille dans notre pays (section 5). Au total, le dispositif fiscal et législatif proposé aurait un statut hybride au plan sociopolitique, déployant un mixte de mesures aussi bien « libérales », « conservatrices » que « social-démocrates » (conclusion).

1. État des lieux : constats et controverses

Donations et héritages : les réformes récentes en France et leurs objectifs

En France, les descendants en ligne directe (enfants ou enfants représentés) sont héritiers réservataires. Cette part du patrimoine « réservée » dépend du nombre d’enfants : pour un héritier il s’agit de la moitié, pour deux héritiers les deux tiers, les trois quarts pour trois et plus. Le solde constitue la « quotité disponible » que l’on peut allouer librement par testament. Si la succession se fait ab intestat, les héritiers se la répartiront également. Cette notion de réserve, héritée du droit romain, tranche avec les règles de succession en vigueur dans les pays anglo-saxons où les parents ont la liberté de tester.

Dans son programme économique, le candidat Sarkozy déclarait : « Je veux que 95 % des Français soient exonérés des droits de succession. Quand on a travaillé toute sa vie et qu’on a créé un patrimoine, on doit pouvoir le laisser en franchise d’impôt à ses enfants ».

La loi du 21 août 2007 dite « en faveur du travail, de l’emploi et du pouvoir d’achat » (dite loi TEPA) a répondu grandement à cette proposition.

On sait que les droits de succession sont calculés sur la part héritée en fonction du montant reçu et du lien de parenté, et qu’il existe en outre des abattements pour certains héritiers. Dans le cas des enfants, la loi TEPA a fait passer cet abattement de 50 000 € en 2006 à 150 000 €. Les droits de succession en faveur du conjoint survivant ont été totalement exonérés (l’abattement préalable n’était que de 76 000 €). Le nouveau barème de l’impôt, sensiblement allégé, conduit par exemple à un taux marginal maximum de 40 % au-delà seulement de 1 722 105 euros pour les époux ou en ligne directe.

S’agissant des donations en ligne directe, chaque parent peut désormais verser en franchise de droit jusqu’à 150 000 € (contre 50 000 € en 2006), par bénéficiaire, tous les six ans : autrement dit, les donations inférieures à ce seuil et précédant un décès de plus de six ans ne sont pas rapportées à la succession pour le calcul des droits [1]. D’autres avantages fiscaux liés aux donations ont été adaptés à l’allongement de la vie : réduction de droits de 50 % lorsque le donateur à moins de 70 ans, de 30 % entre 70 et 80 ans.

La loi TEPA prévoit enfin des réductions d’impôts (75 % dans la limite de 50 000 euros) pour les assujettis à l’ISF effectuant des dons aux établissements publics et privés de recherche, aux fondations reconnues d’utilité publique et aux entreprises, associations, ateliers et chantier d’insertion.

Ces mesures d’allègement fiscal des transmissions ne constituaient qu’une partie de la loi TEPA, dispositif plus vaste à vocation plutôt libérale : favoriser l’emploi, l’innovation et la croissance économique et relancer la demande, en diminuant les charges sociales et les prélèvements obligatoires. Mais elles avaient aussi pour objectif spécifique de réduire le déséquilibre intergénérationnel. Citons encore le candidat Sarkozy : « la vie est mal faite : quand on est plus âgé, on a moins de besoins et plus de revenus [et de biens]. Quand on est jeune, on a beaucoup de besoins et peu de revenus. Je crois à la mobilité du capital, du patrimoine. Le problème de la France, c’est qu’on hérite trop tard. »

Un écart grandissant entre le niveau de vie des adultes jeunes et plus âgés

En France, tout particulièrement, on a assisté, sur les trente dernières années, à une dégradation relative, sinon absolue, du sort des jeunes adultes en phase d’insertion : dévalorisation des diplômes, stagnation du salaire d’embauche, difficulté d’accès à l’emploi avec un chômage élevé et la multiplication des emplois précaires. Les nouvelles générations semblent regarder passer le tapis roulant d’une croissance, même réduite, sur lequel se trouvent leurs aînés, et vivre les phases cruciales de l’existence au ralenti, tout leur arrivant avec retard : l’indépendance, l’entrée sur le marché du travail, la carrière professionnelle, l’accession à la propriété du logement, la mise en couple, les enfants, l’héritage… sans compter une retraite éventuellement différée. Après la situation euphorique des trente glorieuses, ce revirement a alimenté les débats sur la fin de l’équité générationnelle et la rupture du « pacte générationnel » : l’enjeu est de savoir si les difficultés rencontrées par les jeunes correspondent seulement à un mauvais moment à passer et à des retards temporaires, ou s’il faut craindre que les problèmes subis et les retards accumulés ne deviennent irréversibles, bouchant l’avenir des moins favorisés tout au long de leur existence.

Si elle interpelle surtout le fonctionnement des marchés, cette situation des jeunes Français apparaît d’autant plus préoccupante que l’État semble peu y remédier, consacrant ses dépenses les plus importantes, en constante augmentation, pour les plus âgés (santé, retraite) : ainsi s’explique pour une large part l’amélioration sans précédent de la situation des retraités et l’existence d’un fossé grandissant entre jeunes et vieux - un phénomène en complète rupture avec la tendance lourde qui prévalait jusque-là. Mais le plus préoccupant tiendrait à l’envolée mal contrôlée de ces transferts ascendants en raison notamment du vieillissement de la population, ce qui soulève la question de la viabilité des politiques de redistribution : l’État pourra-t-il tenir ses engagements vis-à-vis des retraités actuels et futurs sans trop augmenter les cotisations sociales en chargeant la barque déjà lourde des jeunes générations ?

Trois pensées du social, trois solutions

Ce diagnostic relatif au déséquilibre intergénérationnel, particulièrement accusé dans le cas français, est sujet à controverses quant à son ampleur, à ses causes ou à sa durée. Mais surtout, les solutions pour y remédier diffèrent largement. Pour faire court, on peut s’inspirer en partie de la trilogie proposée par Esping-Andersen (1999), opposant trois « mondes » de l’État-providence, « libéral », « conservateur » et « social-démocrate », ou mieux trois visions du monde social. En effet, si le sociologue danois cherche d’abord à élaborer une typologie idéale des régimes européens en distinguant trois zones géographiques - respectivement anglo-saxonne, continentale ou méditerranéenne, et scandinave -, nous utiliserons ici la trilogie plutôt comme une opposition de pensées philosophiques ou de paradigmes, fondés sur des a priori ou postulats « métaphysiques » incompatibles (cf. Masson, 2006b et 2007).

La pensée « libérale » croit aux marchés dont le fonctionnement serait entravé par les charges sociales et les freins à l’innovation. Pour remédier au déséquilibre intergénérationnel, elle entend donc réduire la taille de l’État-providence en diminuant de manière sensible les transferts publics ascendants, notamment les retraites, remplacées pour partie par des fonds de pension privés, et la dette publique qui pèse sur les nouvelles générations. Les dépenses subsistantes seraient réorientées vers les jeunes (éducation, formation) - du moins les jeunes « méritants » - dans un souci d’égalité des chances et de priorité à l’investissement.

La pensée « sociale-démocrate » croit, elle, que l’État doit accorder des droits sociaux élevés à tout citoyen et procéder à des redistributions égalisatrices. Pour remédier au déséquilibre entre jeunes et Seniors, elle ne fait pas confiance aux solidarités familiales et aux transferts patrimoniaux, jugés insuffisants, inégalitaires, et source de dépendance. Elle préférera ponctionner les Seniors riches en augmentant l’impôt sur la fortune et les prélèvements qui touchent les retraités (CSG), et diminuer les transferts monétaires, allocations familiales et surtout pensions, au profit de services collectifs à la personne supposés plus efficaces et équitables. Et les priorités de l’État-providence seraient réorientées vers les « nouveaux risques » - jeunes non qualifiés, familles monoparentales, jeunes parents… - ainsi que vers les dépenses « actives » d’investissement (éducation, formation professionnelle).

La pensée conservatrice croit, au contraire, aux vertus des solidarités familiales intergénérationnelles et à l’altruisme parental [2], et n’accorde qu’une confiance limitée aux marchés (de l’épargne ou de l’assurance vie) pour satisfaire les besoins des plus âgés. En conséquence, elle milite pour des pensions publiques élevées et prône un partage complémentaire des rôles entre la famille et l’État, la première s’occupant d’abord des plus jeunes (éducation, aides diverses) et le second des plus âgés (santé, retraite). Pour remédier au déséquilibre générationnel, elle voudra donc développer les politiques incitatives visant à augmenter et/ou à accélérer des retours patrimoniaux via la famille, qu’elle pare de toutes les vertus.

2. Des Seniors bien lotis (du grain à moudre pour les retours familiaux)

Comment contrebalancer l’écart grandissant entre les niveaux de vie des ménages jeunes et âgés ? Dans ce qui suit, notre propos n’est pas d’envisager comment on pourrait, au nom d’une plus grande équité générationnelle, endiguer la dérive des transferts publics ascendants - ce que voudrait notamment une logique « libérale ». Il est au départ de miser sur les retours familiaux vers les nouvelles générations - problématique plutôt « conservatrice » et surtout opposée à la pensée « sociale-démocrate ». Dans cette optique, il importe tout d’abord d’apprécier l’importance quantitative potentielle d’un tel rééquilibrage, en comparant les masses en présence, transferts publics et familiaux.

Aujourd’hui les personnes âgées de 60 ans et plus, qui constituent le cinquième de la population, perçoivent chaque année, en transferts de retraite ou de santé, près de 19 % du revenu national, soit davantage que l’ensemble des autres classes d’âge en dépenses de santé, éducation, allocations familiales, minima sociaux, chômage, etc. Les flux présentent une asymétrie très prononcée, inverse des transferts publics, et pour prendre un seul exemple, les aides financières sont au total 10 fois plus importantes vers l’aval (les seniors) que vers l’amont (enfants et petits-enfants). Les retours familiaux - aides, donations et héritages - ne représentent au total qu’un peu plus du quart (5,5 % du PIB) des transferts publics dont bénéficient les plus de 60 ans (19 %) ; et ils se font déjà plus souvent avant le décès, les flux inter vivos (aides et donations) dépassant aujourd’hui les héritages.

Il faut alors se demander s’il existe vraiment du « grain à moudre » pour augmenter ces retours familiaux : une fraction significative des ménages seniors, parmi les plus aisés, pourrait-elle donner davantage, du temps de leur vivant, à leurs enfants, i. e. aurait-elle assez de patrimoine pour en aliéner sans dommage une partie ? Il semble que ce serait particulièrement le cas en France, pour plusieurs raisons.

On entend souvent affirmer qu’il y aurait trop d’épargne dans notre pays (en tête des pays européens avec l’Allemagne et l’Italie). À vrai dire, elle est surtout mal répartie, étant en moyenne trop concentrée au sein des classes d’âge de 50 à 70 ans - et même au-delà -, avec cependant de fortes disparités au sein même de ces âges seniors : certains semblent avoir accumulé trop peu [3] ; mais nombre d’autres ménages épargneraient « trop », possédant à âge élevé des patrimoines toujours plus considérables, bien supérieurs en moyenne à ce que l’on observe dans d’autres pays développés (en dépit d’un système de protection sociale jugé plutôt généreux à l’échelle internationale), et beaucoup trop élevés pour leur propre consommation des vieux jours. Une part de cette accumulation peut assurément provenir de l’épargne de précaution face aux interrogations que suscitent l’avenir des retraites et de l’assurance-maladie ; mais une part seulement, et il serait probablement vain d’invoquer une inquiétude plus forte qu’ailleurs de nos compatriotes pour justifier les écarts observés avec l’étranger (cf. Arrondel et Masson, 2007b).

Bref, sous l’hypothèse (certes exigeante) que les systèmes de retraite et de santé bénéficient en France d’une visibilité et d’une viabilité minimales, il y aurait donc les munitions requises pour augmenter et/ou accélérer les retours familiaux. Et il y aurait aussi des raisons légitimes pour le faire, particulières à notre pays - les difficultés d’insertion ou d’épargne des jeunes ménages - ou liées à l’allongement général de l’espérance de vie. L’héritage est en effet reçu de plus en plus tardivement : de 1984 à 2000, selon les statistiques de la DGI, l’âge moyen au décès a ainsi augmenté de 5 ans et celui des héritiers a suivi la même évolution - on hérite aujourd’hui de ces parents en moyenne à 47 ans. [4]

Le graphique 1 présente pour 2004 les patrimoines bruts médians (plus représentatifs) des différentes cohortes relativement à la richesse médiane sur l’ensemble de la population. Les ménages âgés de 50 à 60 ans disposent de la richesse la plus importante, supérieure de 55 % au patrimoine médian global (soit 70 000 euros environ) ; les plus de 70 ans sont encore presque au niveau de cette médiane globale, alors que les 30 à 40 ans ne sont qu’au tiers, et les moins de 30 ans quasi inexistants. Pour une part, ces écarts reflètent certes la diffusion inégale de la propriété du logement ; mais les résultats en termes de patrimoine financier médian révèlent un déséquilibre selon l’âge comparable : si les moins de 30 ans détiennent quelques avoirs financiers, représentant 40 % de la médiane globale, les 50 à 60 ans sont 70 % au dessus, et les plus de 70 ans ont encore un patrimoine médian de 45 % supérieur.

Bref, l’augmentation ou l’accélération des retours familiaux se justifierait d’autant plus, au cours de la période récente, que cette dernière s’est accompagné d’un enrichissement relatif des seniors : pour s’enrichir durant cette période, mieux valait en effet être déjà propriétaire et actionnaire, et donc avoir plus de 50 ans. La concentration des valeurs mobilières est particulièrement frappante : en 2004, les plus de 65 ans en possèdent autant que les autres classes d’âge réunies.

3. Peut-on et comment inciter à des transmissions précoces ?

Comment inciter les ménages seniors qui en ont les moyens à transmettre plus rapidement leur patrimoine à leurs enfants ou petits-enfants ? La voie naturelle consiste à avantager, par l’impôt ou la législation, les transferts entre vifs, aides ou donations, par rapport aux héritages.

Pourquoi transmet-on à ses enfants ?

Au plan théorique, l’efficacité de telles mesures dépend surtout du motif de transmission et des imperfections des marchés du capital (actifs illiquides ou indivisibles) : elle est nulle si les transmissions sont de nature accidentelle, maximale en cas d’altruisme parental. Voici quelques brefs rappels pour le lecteur non économiste. [5]

Le legs dit accidentel résulte d’un motif de précaution face à l’incertitude de la durée de vie conjuguée à l’imperfection des marchés de la rente viagère, i.e. du désir de se prémunir dans ces circonstances contre le risque de se retrouver âgé et sans ressources : on laisse derrière soi ce qu’on aurait autrement consommé si Dieu avait prêté une vie plus longue. Cette motivation ne donne lieu qu’à des legs post-mortem, dont le montant ne sera influencé ni par la fiscalité (au moins dans certaines marges) ni par le droit successoral. Elle concerne surtout les classes modestes et moyennes, épargnants du cycle de vie (pour la retraite et la sécurité), qui forment une proportion importante de la population mais ne détiennent qu’une part modeste de la richesse nationale. Ce modèle de comportement se concilie le mieux avec une logique « sociale-démocrate », notamment parce que la taxation des héritages y crée le moins de distorsions des comportements.

Le modèle capitaliste concerne, à l’inverse, les grosses fortunes qui ne pourraient être consommées en une seule vie, et dont la motivation essentielle, d’ordre patrimonial, relève d’une logique d’entreprise, d’accumulation en soi, de pouvoir économique ou de prestige social, voire même du désir de postérité. L’impact de la fiscalité sur la transmission dépendra du motif particulier de détention : les avantages accordés aux donations pourraient accélérer la passation d’entreprise mais seront sans effet sur la richesse accumulée pour le pouvoir économique. Une législation favorable aux fondations et autres œuvres caritatives pourrait séduire certaines fortunes tout en évitant les délocalisations. À l’évidence, ce modèle s’accorde le mieux avec la vision du monde « libérale » du social.

Il en va de même, mais dans une moindre mesure, du modèle de transferts dits paternalistes où le don ou l’héritage résulte simplement de la « joie de donner » en tant que telle − que ce soit aux siens ou à la société −, sans se soucier outre mesure du sort ou des besoins des bénéficiaires. Il est l’apanage de couches plutôt aisées de la population. Les montants transmis seraient en général sensibles à une fiscalité allégée ou à une liberté de tester accrue. Les donations augmenteraient, mais de manière limitée, avec les avantages différentiels qui leur seraient accordées en matière d’impôt.

Dans le modèle de Becker (1991), les transferts sont, au contraire des cas précédents, motivés par des considérations familiales : les parents, supposés altruistes envers leurs enfants, retirent un gain d’utilité de l’augmentation de bien-être potentielle de leur progéniture consécutive aux transferts accordés. Les transmissions visent ainsi à rapprocher les niveaux de vie entre parents et enfants - compensation intergénérationnelle - ainsi qu’entre frères et sœurs - compensation intragénérationnelle : plus un enfant a des ressources propres élevées, par rapport à ses parents ou sa fratrie, moins il recevra. En outre, les transferts devraient intervenir lorsque les enfants en ont le plus besoin, sous forme d’aides ou de donations entre vifs. Les mesures avantageant fiscalement les donations ont l’efficacité maximale si ce modèle prévaut : les parents y recourront davantage plutôt que de léguer leur fortune au décès. On est bien dans le cadre le plus favorable au paradigme « conservateur » : les retours familiaux sont parés de toutes les vertus puisque motivés par l’altruisme de parents qui savent et font ce qui est le mieux pour leurs enfants.

L’expérience du passé

À l’aide de différentes sources couvrant une longue période (enquêtes patrimoniales Insee depuis 1986, statistiques de la DGI depuis 1950, etc.), mais aussi d’expériences plus récentes (donations Sarkozy), nous avons montré [6] que les pratiques de transmission des ménages français répondent favorablement, à court et à long terme, aux avantages fiscaux accordés à la donation : l’efficacité des mesures fiscales incitatives a été considérable, même si elle est loin d’être aussi élevée que ne le prédit le modèle beckerien d’altruisme parental. [7]

Mises en place durant l’été 2004 (Loi du 9 août relative au soutien à la consommation et à l’investissement), les « donations Sarkozy » qui permettent des dons d’argent (aux enfants, petits-enfants, neveux ou nièces) en franchise de droits ont connu ainsi un succès indéniable [8]. Initialement prévue jusqu’en mai 2005 pour des dons n’excédant pas 20 000 € (par bénéficiaire et par donateur), cette mesure a été prolongée jusqu’en décembre de la même année, pour un seuil porté à 30 000 €. Destinée à « encourager les jeunes générations à consommer », elle devait pallier le fait que les enfants, supposés plus dispendieux, héritent de plus en plus tard : 42 ans en moyenne en 1984, 47 en 2000 (l’espérance de vie étant parallèlement passée de 73 à 78 ans). Ce type de donation a rencontré un public important. On a compté près de 1 600 000 d’actes enregistrés fin 2005, correspondant à un montant global de 26 milliards d’euros, soit approximativement le patrimoine transmis chaque année au décès sur la période récente.

Comme le montre le Graphique 2, cette sensibilité de la pratique des transferts entre vifs à la législation fiscale s’observe tout autant pour les donations traditionnelles - dons manuels exclus [9]. Ainsi en 1981, le nombre de donations a augmenté de 28 % parce que les ménages anticipaient l’instauration de l’impôt sur les grandes fortunes (IGF). À l’époque courait également la rumeur d’une éventuelle suppression des réductions fiscales. La diminution du nombre de donateurs entre 1981 et 1987 correspond de même à une période où certains avantages ont été supprimés. À partir de 1992, date à laquelle les donations précédant le décès d’au moins 10 ans n’entraient plus dans le calcul des droits de succession (à condition qu’elles ne dépassent pas un montant de 300 000 francs), le nombre de donations est monté de 140 000 en 1992 à 345 000 en 2000, date où elles ont atteint un sommet ; depuis 1996, l’augmentation s’expliquerait aussi par l’élargissement des réductions fiscales aux donations vers les petits-enfants. Cette forte croissance (11 % par an en moyenne) s’est cependant interrompue en 2000, et a été suivie d’une baisse (- 8 % par an en moyenne) - une inversion de tendance qui pourrait s’expliquer par un phénomène de « saturation » chez les parents susceptibles d’avancer la transmission du patrimoine en profitant de ces coups de pouce fiscal.

Une proposition iconoclaste

Un faisceau d’indices donne effectivement à penser que l’on serait arrivé en France au bout de cette logique d’incitation fiscale ou législative à des transmissions précoces : le nombre de donations diminue dans les années 2000 et le sursaut engendré par les donations Sarkozy pourrait se révéler éphémère. Qui plus est, la hausse considérable (le triplement) d’abattements identiques pour les transmissions entre vifs et au décès réduit sensiblement l’avantage relatif de la donation sur l’héritage. Si l’on considère que nombre de transferts inter vivos (aides financières, petits dons en argent, services divers) ne sont déjà ni taxés, ni même réglementés, et que les donations sont de moins en moins imposées, il n’existe plus qu’un moyen d’avantager les transmissions entre vifs - à défaut de les subventionner : sans toucher à la fiscalité des donations, alourdir sensiblement la taxation des (gros) héritages.

La mesure n’est certes pas dans l’air du temps et apparaît en outre très impopulaire dans notre pays où « toucher à l’héritage, c’est comme toucher à la famille » [10]. Aussi, avant de se lancer dans une réforme de ce genre, faut-il s’assurer qu’elle en vaut vraiment la peine en vérifiant déjà que des transmissions précoces améliorent véritablement, comme on peut s’y attendre, le bien-être des enfants bénéficiaires.

4. Les transmissions précoces sont-elles utiles pour leurs bénéficiaires ?

Dans un monde parfait, l’échéancier des réceptions patrimoniales aurait peu d’effet sur les comportements du bénéficiaire qui pourrait toujours emprunter au taux du marché sur ses espérances d’héritage. Dans le monde réel, le législateur comme nombre de parents donateurs entendent faciliter les projets d’insertion familiale, professionnelle, ou patrimoniale (achat d’un logement) du jeune bénéficiaire en lui mettant le pied à l’étrier. [11]

Les économistes distinguent en fait deux cas polaires (cf. Arrondel et Masson, 2007a). Le premier, dit « effet Carnegie », est celui où les transmissions reçues entraînent une augmentation de la seule consommation courante et peuvent par ailleurs engendrer une baisse de l’offre de travail - selon une logique de rentier qui se contente de vivre sur son magot. Le cas opposé est celui où un transfert patrimonial précoce favorise au contraire - en levant les contraintes de crédit ou en apportant la mise de fond nécessaire - les projets d’insertion à plus longue échéance du jeune bénéficiaire : accession à la propriété, mise en ménage ou création d’une famille, obtention d’un métier stable, ou même création d’entreprise.

Les données biographiques et rétrospectives de l’enquête « Patrimoine » 2004 de l’Insee montrent que l’on se situe clairement dans le second cas, favorable aux transmissions précoces. On est même proche de la situation, idéale pour notre démonstration, où l’héritage attendu (les « espérances d’héritage ») auraient un effet négatif sur la réalisation du projet d’investissement considéré, l’héritage déjà reçu un effet plutôt positif, et les aides ou donations reçues un effet positif beaucoup plus important.

Détention et acquisition (en propre) du logement principal [12]

La probabilité d’être propriétaire ou accédant pour le ménage représentatif est de 59,8 %. Pour un ménage n’ayant bénéficié d’aucun transfert de la part de ses parents, cette probabilité n’est que de 53,6 %. Si le ménage a bénéficié d’une donation, la probabilité incriminée s’élève à plus de 75 %, alors qu’elle n’est que de 56,9 % si le ménage ne l’est pas. L’effet va dans le même sens, mais en moins accusé, entre héritier et non héritier : les probabilités respectives sont de 67,3 % et 56,9%. Le rôle des dons ponctuels d’argent est plus limité mais significatif (63,1 % contre 59,4 %). En revanche, les espérances d’héritage ont plutôt un effet négatif (non significatif).

L’influence positive des transmissions patrimoniales, sous toutes leurs formes, sur la propriété du logement est donc avérée, avec un effet particulièrement fort pour les donations ; reste que d’autres déterminants demeurent prépondérants (ressources, composition familiale, lieu de résidence etc.).

On obtient des conclusions analogues pour la probabilité d’avoir acquis par soi-même son logement (et non par héritage ou donation) avec, là encore, une influence prépondérante de la donation reçue : la probabilité d’être propriétaire passe ainsi de 52 % pour un ménage qui n’a rien reçu de ses parents à 69 % pour un ménage donataire.

Création ou reprise d’entreprise (non familiale)

Les transferts intergénérationnels précoces favorisent-ils la création d’entreprise ? Toujours à partir de l’enquête Insee « Patrimoine » 2004, nous avons testé cette hypothèse sur un échantillon d’individus non agriculteurs, âgés de 20 à 50 ans − les plus aptes à devenir entrepreneurs. Au sein de cette population, on dénombrait 4,3 % de créateurs d’entreprise et 2,8 % de repreneurs d’entreprise non familiale. Parmi les différents transferts (dons ponctuels d’argent, versements réguliers d’argent, donations, héritages), c’est seulement le fait d’être donataire qui favorise le passage au statut d’entrepreneur : la probabilité de créer une entreprise sans l’aide d’une donation est de 4,1 %, elle monte à 6,5 % pour les donataires ; si l’on cumule les créations et les reprises d’entreprises, on passe de 6,9 % d’entrepreneurs non bénéficiaires d’une donation à 9,3 % chez les donataires (les espérances d’héritage ont là encore un effet propre négatif mais non significatif).

Bien sûr, ces effets de la donation reçue doivent être relativisés, d’autres facteurs exerçant, à ressources données, un rôle plus important : la probabilité de créer son entreprise s’élève à 19,1 % pour les fils ou filles d’entrepreneur (soit 4 fois plus que pour les enfants de salariés) ; un titulaire d’un troisième cycle ou un diplômé d’une grande école a deux fois plus de chance (soit près de 9 %) de se mettre à son compte.

5. Comment rendre socialement utiles les retours patrimoniaux ?

Accélérer les retours familiaux est donc efficace au plan individuel ; mais l’est-il autrement pour la société dans son ensemble, peut-on escompter un avantage collectif de mesures incitatives à des retours précoces ?

Deux arguments, d’ordre différent, militent en ce sens, surtout dans le contexte français. D’un côté, la transmission plus rapide des richesses et du pouvoir économique aux jeunes générations serait en soi porteuse d’un message symbolique fort, révélant le poids que la société accorde à la jeunesse et à son avenir, sa volonté de passer le témoin aux cadets et d’organiser une succession plus harmonieuse des générations. De l’autre, elle aurait des conséquences positives sur le marché de l’emploi des jeunes, particulièrement sinistré en France, s’il est vrai, par exemple, que les jeunes dirigeants ont tendance à embaucher en priorité d’autres jeunes.

À côté de ces gains, probables ou avérés, il faut cependant mettre en regard les coûts des mesures incitatives proposées : soit en terme d’efficacité et donc d’incidence fiscale, si l’alourdissement des droits de succession désincite à l’épargne intergénérationnelle pour ses enfants, ou stimule l’évasion fiscale (y compris par l’expatriation) ; soit surtout en terme d’équité, tant la donation apparaît une pratique de riches et un vecteur privilégié de la reproduction des inégalités, avantageant encore les jeunes des milieux favorisés.

Comment profiler les mesures fiscales afin d’éviter ces deux écueils, i.e. comment garder les effets positifs d’une transmission accélérée du patrimoine familial sans créer de réactions perverses ni renforcer les inégalités ? La solution voudrait que l’on ne se contente pas d’alourdir le taux d’imposition des héritages mais que l’on augmente également sa progressivité. Elle impliquerait, en compensation, de multiplier pour les parents aisés les possibilités d’échapper à l’impôt, non seulement en taxant peu les donations familiales (surtout précoces), mais aussi en favorisant, par une exonération partielle ou totale, les dons ou legs caritatifs effectués à des œuvres ou fondations dûment répertoriées - en faveur notamment de la formation ou de l’insertion des jeunes des milieux déshérités. Ce qui supposerait d’accroître la liberté de tester hors de la famille, en limitant davantage le droit à l’héritage et la réserve des enfants, surtout au-delà d’un certain montant (cf. Masson, 2006a).

On voit l’idée directrice de ce dispositif qui ne chercherait pas simplement à « prendre aux riches ». Quelle que soit la voie adoptée par les Seniors fortunés - à qui un large éventail de choix serait offert -, le gouvernement serait gagnant, soit que ses recettes augmentent grâce à l’impôt successoral, soit que le déséquilibre générationnel se résorbe quelque peu en raison de l’augmentation des retours familiaux, soit encore que l’initiative privée procède d’elle-même à des investissements considérés d’intérêt public, en faveur des moins favorisés.

Conclusions

Nous avons proposé une mesure fortement impopulaire : l’alourdissement sensible des droits de succession. Moyennant les échappatoires introduits (exonération des donations familiales précoces et des dons ou legs caritatifs), ce dispositif fiscal et législatif pourrait pourtant contribuer à générer un rééquilibrage intergénérationnel à la fois efficace, en multipliant les retours patrimoniaux vers l’aval, et équitable, en ne favorisant pas la reproduction des inégalités.

Juger de ce dispositif, quelque peu hétéroclite, à l’aune des trois paradigmes de l’État-providence inspirés de la trilogie d’Esping-Andersen (1999) conduit d’ailleurs à des conclusions remarquables : l’ensemble des mesures proposées semble traverser d’une certaine manière les trois pensées du social, pourtant contradictoires dans leur prémisses, en empruntant à chacune :

  • la proposition d’alourdir et de rendre plus progressif l’impôt sur l’héritage recevra l’approbation d’Esping-Andersen et de nombreux "sociaux-démocrates", mais sera saluée également par tout un courant libéral-libertaire ;
  • le fait d’augmenter la liberté de tester hors de la famille, en encourageant les dons ou legs caritatifs, est une mesure typiquement « libérale » ;
  • mais la volonté initiale d’augmenter ou d’accélérer les retours familiaux est, elle, clairement d’inspiration « conservatrice ».

Ajoutons enfin qu’une question importante n’a guère été abordée ici parce qu’elle nécessiterait de trop longs développements : l’accélération des retours patrimoniaux, au sein ou hors de la famille, pourrait être enrayée du fait des inquiétudes suscitées par l’avenir des systèmes publics de retraite ou de santé, ou du désir des Seniors de se prémunir contre les risques du grand âge. Autrement dit, pour être pleinement efficace, le dispositif proposé en matière de transmissions devrait être complété par d’autres mesures favorisant le développement de l’assurance dépendance, la visibilité, la viabilité et la redistributivité du système de retraite etc.

par Luc Arrondel & André Masson, le 17 juin 2008

Aller plus loin

Références bibliographiques

Arrondel L. (2006), « Transmission du patrimoine et impôt successoral », Informations Sociales, 134, 42-53.

Arrondel L. et Laferrère A. (2001), « Taxation and Wealth Transmission in France », Journal of Public Economics 79, 3-33.

Arrondel L. et Masson A. (2006), « Altruism, Exchange or Indirect Reciprocity : What Do the Data on Family Transfers Show ? », in Handbook on the Economics of Giving, Reciprocity and Altruism, vol. 2, J. Mercier-Ythier J. et S. C. Kolm eds., North-Holland, Amsterdam, p. 971-1053.

Arrondel L. et Masson A. (2007a), « Solidarités publiques et familiales », in Une jeunesse difficile : portrait économique et social de la jeunesse française, D. Cohen ed., Cepremap, 6, Éditions de la rue d’Ulm, Paris, p. 107-190.

Arrondel L. et Masson A. (2007b), Inégalités patrimoniales et choix individuels. Des goûts et des richesses..., Économica, Paris.

Becker G.S.(1991), A Treatise on the Family, Enlarged Edition, Harvard University Press, Harvard.

Esping-Andersen G. (1999), Les trois mondes de l’Etat-providence, PUF, Paris, (épilogue inédit) ; version anglaise, The Three Worlds of Welfare Capitalism, 1990.

Masson A. (2006a), « Famille et héritage : quelle liberté de tester ? », Revue française d’économie, XXI (2), p. 75-109.

Masson A. (2006b), « Logiques sociales rivales entre les âges et les générations », Informations sociales, 134, "De génération à génération", p. 100-115.

Masson A. (2007), « Les avatars de l’altruisme familial », in Repenser la solidarité au XXIe siècle, S. Paugam ed., PUF, Collection le lien social, Paris, p. 289-314.

Liens :

 Conférence d’André Masson à L’Université de tous les savoirs, sur Famille et Héritage

 Articles d’André Masson en ligne sur EconPapers

Pour citer cet article :

Luc Arrondel & André Masson, « L’efficacité économique peut-elle justifier l’augmentation des droits de succession ? », La Vie des idées , 17 juin 2008. ISSN : 2105-3030. URL : https://laviedesidees.fr/L-efficacite-economique-peut-etre

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Notes

[1À titre d’exemple, des parents ayant trois enfants et voulant profiter de ces dispositions, pourraient transmettre chacun 450 000 € tous les six ans en franchise de droits. Néanmoins, cette exonération fiscale ne dispense pas du report de ces donations à la succession pour le calcul de la réserve.

[2Altruisme parental au sens économique : les parents se soucient du bien-être de leur progéniture. Dans les variantes les plus familialistes, les parents sont ainsi supposés constamment savoir, vouloir et faire ce qu’il y a de mieux pour leurs enfants (en terme d’éducation, d’aides ou de transferts patrimoniaux).

[3En France, comme dans la plupart des pays développés, près d’un quart des ménages n’épargnent pas assez pour leurs vieux jours, compte tenu de leurs droits à la retraite  ; aussi leur consommation paraît-elle enregistrer une chute sensible au passage à l’inactivité (Arrondel et Masson, 2007b).

[4Les familles françaises auraient déjà fait des efforts pour compenser ce retard en avançant les transferts : l’âge moyen des donateurs a moins augmenté au cours de la période et, différence d’âge intergénérationnelle aidant, l’âge moyen des donataires a même diminué, de 39 ans à 37,5 ans (Arrondel et Masson, 2007a).

[5Cf. Arrondel et Masson (2006).

[6Arrondel et Masson (2007a).

[7Les études étrangères, américaines en particulier, aboutissent à des résultats tout à fait comparables (cf. Arrondel et Masson, 2006).

[8Les avantages fiscaux de ces donations étaient accordés seulement sous réserve que le donataire soit majeur  ; mais ils pouvaient se cumuler avec ceux des autres donations.

[9Soumis à la même législation que les donations, le don manuel, non constaté par un écrit, s’opère par la remise de la main à la main d’un bien mobilier : argent liquide, bijoux, automobile, titres au porteur, etc.

[10Cf. Masson (2006a). Dans les enquêtes récentes que nous avons menées avec l’institut TNS-Sofres en 2002 et 2007, cette impopularité se révèle massive, plus de 90 % des interviewés se déclarant favorables à un allégement général des droits de succession.

[11Dans la législation récente, les donations versées sont exemptées de droits de mutation si elles sont affectées dans les deux ans à la création d’une entreprise. Les ménages français donateurs citent parmi leurs motivations : éviter les problèmes de partage entre les enfants (40 %), profiter des avantages fiscaux (25 %), mais aussi aider au financement d’un projet des enfants - achat d’un logement, création d’entreprise… (près de 25 %).

[12Les effets propres indiqués sont calculés pour des valeurs données des autres caractéristiques du ménage : revenus, espérance d’héritage, catégorie sociale, âge, diplôme, lieu de résidence etc.

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